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Les plus précaires sont davantage touchés par le Covid-19

Distribution de nourriture.
© Thierry Porchet

La Patinoire des Vernets à Genève accueille tous les samedis des milliers de familles, essentiellement des femmes et des enfants, victimes de la disparition de toute source de revenu. Après des heures d’attente, elles y reçoivent un colis alimentaire.

Une étude a été menée début mai par Médecins sans frontières et les HUG auprès des nombreuses personnes démunies présentes à la distribution alimentaire de Genève

Baisse de revenus ou encore perte d’emploi, beaucoup de personnes sont tombées – ou se sont enfoncées – dans la précarité à cause du coronavirus. Pour preuve, à Genève, depuis le début de cette crise sanitaire, le nombre de personnes ayant recours aux dispositifs d’aide alimentaire a quadruplé. Lors de la distribution alimentaire du 2 mai, Médecins sans frontières et les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) ont mené une enquête auprès de cette population précarisée, révélant que leurs conditions de vie accroissent les risques de mauvaise santé liés au Covid-19.

Plus en détail, 534 personnes ont accepté de répondre au questionnaire, majoritairement des femmes, âgées en moyenne de 44 ans, et 52% d’entre elles étaient des personnes migrantes sans statut légal. Un participant sur dix vit dans un hébergement collectif ou dans la rue et 48% des répondants ont décrit une situation de surpeuplement dans leur logement, surtout pour les sans-papiers, dont 11% vivent à plus de quatre personnes par pièce.

Accès aux soins limité

Concernant l’accès aux soins, 40% avaient une assurance maladie et seuls 10% des sans-papiers étaient couverts. Au cours des deux derniers mois, 10,4% des personnes avaient renoncé à des soins médicaux, à 58,6% pour des raisons économiques ou l’absence d’assurance, alors que la crainte d’être infecté sur le lieu de soins était également fréquemment mentionnée. De manière générale, les personnes sans papiers et les résidents étrangers avec permis de séjour se déclaraient moins souvent en excellente ou très bonne santé que les autres. De plus, 15,6% des répondants notaient une dégradation de leur santé depuis le début de l’épidémie.

En matière de craintes, presque 9 personnes sur 10 se disent très ou au moins un peu préoccupées par la situation liée au Covid-19. Les principaux motifs sont la situation financière (70,3%), l’emploi (64,1%), la situation dans le pays d’origine (58,7%), l’accès à l’alimentation (54,2%) et la crainte d’être contaminé (54,2%).

Mal-logement

A travers cette étude, il apparaît clairement que les populations précaires ont été davantage contaminées et que le risque de transmission est plus important. En effet, 3,4% des participants rapportent avoir eu un test positif, alors que le canton avait recensé à ce moment-là 5000 cas confirmés, à savoir 1% de la population.

Au total, 8,8% des personnes interrogées disent avoir partagé leur logement avec une personne malade du Covid-19 ou présentant des symptômes évocateurs. «Cela suggère une exposition et une transmission importante du virus au sein de cette population», constate l’enquête, qui va plus loin. Sur les 90% des personnes qui affirmaient qu’en cas de symptômes compatibles avec le Covid-19, elles feraient un test de dépistage, seules 26,1% des personnes qui avaient présenté de tels signes l’avaient effectivement fait. «Cette discordance suggère que, même quand la volonté d’accéder au test est présente, des facteurs externes en limitent l’accès», indiquent les auteurs de l’étude. Les principaux obstacles au test évoqués étaient, de nouveau, d’ordre financier et l’absence d’assurance maladie. Enfin, parmi les 69 personnes avec des symptômes évocateurs d’une infection ou un diagnostic Covid-19 confirmé, seules 58% avaient pu partiellement ou complètement respecter les consignes d’isolement. Les raisons? Un logement trop exigu et la nécessité de continuer à s’occuper de sa famille étaient les principales difficultés rencontrées.

Population vulnérable

L’enquête conclut sur les nombreux facteurs de vulnérabilité de cette population face au Covid-19, à savoir le mal-logement impliquant une proximité avec des gens malades et le peu de possibilités de respecter les consignes d’isolement et de quarantaine, mais aussi les difficultés d’accès aux soins et le fréquent renoncement à ces derniers pour des motifs économiques et l’absence d’assurance maladie. Cette étude «souligne l’importance d’un fort soutien social, médical et économique à cette population jusqu’à la reprise de l’activité économique et de l’emploi».

Les mêmes droits pour tous

Dans un communiqué du 12 mai, l’UDC s’est empressée de rebondir sur cette étude. «Il semble que ces migrants accélèrent la propagation du coronavirus», a osé le parti d’extrême-droite, pointant du doigt les «villes suisses dirigées par la gauche et les écologistes» qui accueilleraient trop de sans-papiers à ses yeux. «L’UDC invite la Confédération à intervenir enfin sévèrement. Les migrants entrés illégalement en Suisse et les nouveaux arrivants sans visa ou permis de séjour doivent être systématiquement refusés aux frontières.» 

Le Collectif de soutien aux sans-papiers de Genève s’est dit consterné par ces propos, insistant sur le fait que c’est bien la précarité, et non l’absence de statut, qui accroît l’exposition au virus. Depuis de nombreuses années, associations de terrain et syndicats ne cessent d’alerter les autorités et le public sur le fait que l’absence de statut légal est un facteur de fragilité majeur pour les personnes concernées. «Le seul véritable moyen de diminuer les vulnérabilités et les risques qui en découlent est de permettre aux personnes d’accéder à un statut de séjour stable, comme l’a démontré l’expérience de l’opération Papyrus. Ce n’est qu’alors qu’elles pourront défendre leurs droits et accéder sans entraves aux services qui leur permettront de ne pas être affectés de manière disproportionnée par une crise telle que celle-ci.» Dans l’intervalle, les membres du Collectif en appellent à la mise à disposition de logements pour que les distances sanitaires puissent être respectées, l’accès généralisé au dépistage et à des soins gratuits, et des mesures renforçant le soutien social à ces populations particulièrement fragiles.

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