Une centaine de personnes sont venues soutenir un jeune militant inculpé pour avoir manifesté pacifiquement dans les locaux des Retraites populaires
Une audience d’instruction pas comme les autres s’est déroulée au Tribunal des mineurs de Lausanne mardi 18 juin. Devant le bâtiment, une centaine de personnes sont réunies pour soutenir Zakaria Dridi, militant du mouvement de la grève du climat suisse, gymnasien de bientôt 18 ans et candidat au Conseil national sous la bannière du POP, parti dont plusieurs des membres étaient d’ailleurs présents.
Les faits remontent au 15 mars dernier. Pendant la manifestation pour le climat à Lausanne (qui a rassemblé environ 15000 personnes, plus de 50000 en Suisse), des militants entrent dans les locaux de la société de prévoyance professionnelle et d’assurance vie Retraites populaires, afin d’attirer l’attention sur les investissements fossiles «climaticides» des caisses de pension et des banques. Quelques instants plus tard, la police arrive et leur donne l’ordre de partir. De la centaine de manifestants au début de l’action ne reste plus qu’une quinzaine de personnes qui s’asseyent en signe de protestation. Leurs identités sont relevées, dont celles de Zakaria Dridi, unique mineur. Peu de temps après, il est le premier à être convoqué devant la justice, à la suite d’une dénonciation des autorités publiques représentée par la police pour «empêchement d’accomplir un acte officiel». Alors que les Retraites populaires, elles, n’ont pas déposé plainte.
«Nous estimons que cette répression est un acte judiciaire purement politique», dénonce le mouvement qui n’est pas le seul à le penser. A ses côtés, des militants d’Extinction Rebellion, des antispécistes et… l’ancien chef de la police lausannoise, Marc Vuilleumier, membre du Grand Conseil, qui souligne: «Avec tout le respect que je porte à la police, on assiste à une volonté de casser quelqu’un, voire un mouvement. Des jeunes qui manifestent pour le climat, c’est plutôt bien, non?»
Dénoncer l’injustice
Avant d’entrer dans le tribunal, Zakaria Dridi qualifie cette situation de ridicule et se dit heureux d’être soutenu par ses camarades. Près de lui, sa mère, convoquée elle aussi, dit être «choquée qu’on s’attaque à un mineur qui s’engage pour une cause touchant tout le monde». Vers 14h, tous deux, accompagnés de leur avocate Me Loucy Weil, entrent dans le tribunal. L’audience n’est pas publique, mais les slogans de la centaine de personnes présentes doivent résonner jusque dans la salle: «Zakaria! Zakaria! Zakaria!» «Et 1 et 2 et 3 degrés, c’est un crime contre l’humanité!», «Politique t’es foutue, les gens sont dans la rue!»
Julie Magnollay, jeune militante pour le climat, prend la parole: «Nous sommes ici pour soutenir notre camarade et dénoncer l’injustice. Son action est courageuse et pacifiste pour sauver la planète. Un gymnasien de 17 ans qui rate son année, car il met sa lutte écologiste au-dessus de ses études, qui a le courage d’exprimer publiquement une vérité irréfutable afin d’espérer non pas un monde meilleur, mais seulement un monde pour demain. En le condamnant, vous condamnez celles et ceux qui se battent pour la vérité. C’est une tentative d’intimidation. L’Etat essaie de nous criminaliser. Aurait-il peur de notre colère? De notre force? Qu’on lui sauve la vie? Nous ne céderons pas face à la répression.»
La popiste Anaïs Timofte, vice-présidente du POP Vaud, dénonce aussi l’incohérence d’un système qui poursuit un jeune écologiste, alors que les multinationales polluent en toute impunité et ne sont jamais inquiétées.
Une heure environ après son entrée, Zakaria Dridi sort sous les acclamations. «A priori, je risque une amende pour un acte de résistance passive», explique le jeune homme. Son avocate, Me Loucy Weil, précise: «Il a admis les faits. Soit d’être resté assis dans les Retraites populaires. La question est de savoir si c’est pénal ou non, s’il est resté dans la légalité ou non. Y a-t-il eu atteinte à l’autorité publique, représentée dans ce cas par la police? Nous allons exposer nos arguments juridiques.» A suivre…