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Bientôt des OGM de nouvelle génération dans nos assiettes?

Machine agricole dans un champ.
© Thierry Porchet

Le projet de loi du Conseil fédéral est accusé, par ses détracteurs, de vouloir faire entrer les OGM dans nos champs et dans nos assiettes «par la petite porte». Cette nouvelle génération d’OGM ne serait en effet pas aussi inoffensive que le prétend le conseiller fédéral Albert Rösti.

Le Conseil fédéral veut autoriser les aliments produits grâce aux dernières techniques du génie génétique, mais les opposants jugent les garde-fous insuffisants.

Les dernières avancées du génie génétique font débat en Suisse. Alors que les OGM (organismes génétiquement modifiés) sont toujours sous le coup d’un moratoire, le Conseil fédéral veut autoriser la commercialisation d’aliments produits par le biais des nouvelles techniques génomiques (NTG). Mais d’aucuns jugent que les garde-fous envisagés pour réglementer ces «nouveaux OGM» sont insuffisants, et que le principe de précaution doit s’appliquer à eux comme aux autres. 
De quoi parle-t-on? D’une technique permettant de couper l’ADN – baptisée «CRISPR-Cas9» – qui a valu en 2020 le prix Nobel à ses inventeurs. Alors que les OGM de première génération sont produits en introduisant aléatoirement des gènes d’une espèce dans le génome d’une autre, pour lui attribuer de nouvelles caractéristiques, les «ciseaux moléculaires» (comme on appelle le nouveau procédé) servent à modifier le patrimoine génétique d’un organisme en découpant des parties précises de son ADN. Dans les deux cas, le but affiché est le même: créer des plantes plus productives ou plus résistantes aux maladies ou à la sécheresse, par exemple.

Vraiment sans risques?
Chargé par le Parlement de réglementer les NTG, le Conseil fédéral a mis en consultation, au début d’avril, un projet de loi qui est accusé, par ses détracteurs, de vouloir faire entrer les OGM dans nos champs et dans nos assiettes «par la petite porte». Le fait que ce nouveau procédé dépende d’une législation à part est controversé. En charge du dossier, le conseiller fédéral Albert Rösti estime, lui, que cela n’a rien à voir avec les OGM classiques, puisque le projet de loi exclut la transgénèse (mélange des patrimoines génétiques de deux espèces, qui reste toutefois techniquement possible avec «CRISPR-Cas9»). Le ministre affirme donc que c’est moins risqué.
Mais selon l’Alliance suisse pour une agriculture sans génie génétique (ASGG), c’est loin d’être sûr. «Le fonctionnement de l’ADN est encore mal maîtrisé et avec le CRISPR-Cas9, on va engendrer des modifications génétiques non souhaitées, représentant un risque pour la santé et pour l’environnement», craint Luigi D’Andrea, directeur de l’ASGG. Pour lui, ce projet de loi est une coquille vide: «Il ne dit pas concrètement comment effectuer l’évaluation des risques et garantir la traçabilité pour permettre le libre choix des consommateurs.» L’ASGG déplore par ailleurs le fait qu’il ne règle pas non plus la question des brevets, ce qui fera augmenter le prix des semences et exposera à des poursuites judiciaires les agriculteurs dont les champs auront été «contaminés» par pollinisation. «Le vrai but des multinationales de l’agroalimentaire n’est pas d’améliorer des variétés de plantes, mais de privatiser le vivant», dénonce Luigi D’Andrea.

Intitulé trompeur
Albert Rösti se veut rassurant, en proposant de prolonger jusqu’en 2030 le moratoire sur les OGM classiques, qui expire à la fin de cette année. Il espère en outre faire oublier que les «ciseaux moléculaires» restent une forme de manipulation génétique, en intitulant son projet «Loi sur les végétaux issus des nouvelles technologies de sélection», une appellation jugée trompeuse par l’ASGG. 
Ayant déjà senti monter la pression du lobby du génie génétique ces dernières années, les opposants ont lancé en juin 2024 une initiative populaire pour inscrire dans la Constitution le fait que les NTG doivent être soumises aux mêmes règles que les OGM de première génération, et pour limiter la portée des brevets. Soutenue par de nombreuses organisations dont Bio Suisse, StopOGM, Greenpeace, Uniterre, Pro Specie Rara ou l’ASGG, elle a déjà récolté près de la moitié des 100 000 signatures requises jusqu’au 3 mars 2026.

Pour signer l’initiative: protection-des-aliments.ch 

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