Une carte alimentaire mensuelle pour manger mieux
Dans le cadre de rencontres informelles avec des représentants de milieux associatifs et syndicaux, le réseau pour une Assurance sociale alimentaire a invité Pierre-Yves Maillard.
Présenté il y a une année aux médias, le réseau pour une Assurance sociale alimentaire (ASA), portée par des citoyens notamment issus de l’alimentation et de la paysannerie, poursuit sa réflexion.
Pour mémoire, l’ASA a pour ambition d’offrir à chaque habitant une carte alimentaire de 80 francs par adulte par mois et de 40 francs par enfant, à faire valoir dans des épiceries de quartier, dans des marchés ou des fermes. Les produits et les lieux conventionnés seront choisis de manière participative et démocratique.
Le financement du système fait écho à celui de l’AVS, à savoir une cotisation sur le salaire de l’employé et de l’employeur. Mais d’autres possibilités sont en discussion.
Quid du financement?
«Le premier pilier est un modèle. Mais la question d’une cotisation des salariés et des patrons essuie déjà des critiques», souligne Alberto Silva, maraîcher et secrétaire politique d’Uniterre, co-initiateur de l’ASA avec Josef Zisyadis, directeur de la Fondation pour la promotion du goût et homme politique de gauche.
Pierre-Yves Maillard, président de l’Union syndicale suisse (USS), estime qu’une participation de 1,8% (moitié à charge de l’employé et moitié à charge de l’employeur), comme le propose le projet initial, est relativement élevée dans un contexte où une hausse de cotisation sera nécessaire à terme pour les besoins de l’AVS. Un taux beaucoup plus bas permettrait de dégager des montants déjà importants, selon lui, ce qui offrirait aux consommateurs la possibilité de manger localement en partie et aux paysans d’obtenir de nouvelles ressources. «Mais d’autres modes de financement davantage redistributifs sont à évaluer: telles des cotisations sociales prélevées sur les dividendes – très peu taxés – ou sur les grosses fortunes, précise le conseiller aux Etats, à l’initiative des PC familles et de la rente-pont dans le canton de Vaud. Les revenus des travailleurs, comme ceux des paysans, baissent. Le sujet est brûlant avec la hausse des coûts dans l’alimentation et la conscience des inégalités salariales et sur la fortune. Ce projet est intéressant, il touche les préoccupations des gens.»
Caisse genevoise
A Genève, une expérience pilote – la Caisse genevoise de l’alimentation – se met déjà en place. Joël Mützenberg, semencier à Genève, relate l’avancée de ce projet. A la suite de l’inscription dans la Constitution genevoise du droit à l’alimentation en juin 2023, deux comités citoyens ont vu le jour à Meyrin et dans le quartier des Pâquis. Le système mis en place devrait inclure de 100 à 200 personnes, dans un premier temps. «En France et en Belgique, il existe déjà des groupes de plusieurs milliers de personnes – sur la base de cotisations volontaires – qui expérimentent une telle proposition. Mais nous sommes encore loin d’un système universel, souligne Joël Mützenberg. Actuellement, les discussions tournent autour des produits conventionnables ou non.» Les supermarchés sont d’emblée exclus, ainsi que les produits réfrigérés. Et Josef Zisyadis de résumer: «L’ASA est bon pour le consommateur, mais représente aussi un levier énorme pour réorienter la production de l’alimentation.» K
* Le 29 mars prochain, de 10h à 14h, le réseau pour une Assurance sociale alimentaire (ASA) organise une rencontre à Lausanne, à la Maison de quartier sous-gare (Dapples 50). Au programme: une présentation du réseau de l’ASA par Alberto Silva et Josef Zisyadis; l’état de la situation sur le droit à l’alimentation à Genève par Léa Winter, coordinatrice de la Caisse genevoise de l’alimentation; la présentation d’expériences belges et françaises; des interventions de parlementaires; et une discussion publique sur l’évolution du projet.
Davantage d’informations sur:
Assurance-alimentaire.ch
Calim-ge.ch