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AVS 21, «réforme dévastatrice et irrespectueuse»

Banderole lors d'une manifestation féministe: AVS 65 ans c'est toujours non!
© Thierry Porchet

Les syndicats et la gauche s’opposent à la réforme AVS 21. Selon leurs calculs, en travaillant une année de plus, les femmes perdraient l’équivalent d’une année d’AVS, soit, sur la base du revenu médian, environ 26000 francs.

En vue de la votation du 25 septembre, les référendaires ont lancé la campagne contre la révision de l’AVS et le relèvement de l’âge de la retraite des femmes à 65 ans

Les organisations à l’origine du référendum contre AVS 21 ont lancé leur campagne en vue de la votation du 25 septembre. 150000 signatures avaient été déposées en mars dernier contre cette nouvelle révision de l’AVS visant à garantir son équilibre financier jusqu’à l’horizon 2030 en repoussant notamment l’âge de départ à la retraite des femmes de 64 à 65 ans. Au cours d’une conférence de presse donnée le 1er juillet, la gauche et les syndicats ont expliqué toutes les bonnes raisons de glisser un «non» dans l’urne.

En travaillant une année de plus, les femmes perdraient donc l’équivalent d’une année d’AVS, soit, sur la base du revenu médian, environ 26000 francs. Inacceptable sachant qu’elles touchent déjà des rentes un tiers moins élevées que celles des hommes. «Près d’un tiers des femmes ne perçoivent aucune rente du 2e pilier. Et, pour autant qu’elles aient une caisse de pension, leur rente ne représente environ que la moitié de celle des hommes», a rappelé la présidente d’Unia, Vania Alleva.

Si les femmes cotisent moins, elles triment «autant, sinon plus que les hommes», si l’on prend en compte le travail non rémunéré, déclare, de son côté, Léonore Porchet, conseillère nationale écologiste et vice-présidente de Travail.Suisse. «Leur travail gratuit, mais infiniment précieux pour la société doit être reconnu.» Les femmes sont, en outre, victimes d’inégalités salariales entraînant un manque à gagner de l’ordre 825 millions par an pour l’AVS. «Des mesures efficaces pour lutter contre cette discrimination seraient donc plus rentables qu'une augmentation de l'âge de la retraite des femmes», estime la Vaudoise. Si les rentes des femmes sont moins élevées, c’est aussi parce qu’elles sont employées dans des branches à bas salaires, comme le souligne Vania Alleva: «Dans les branches typiquement féminines, les rentes des caisses de pension se situent généralement entre 500 et 800 francs par mois.»

Payer plus...

C’est là aussi que le travail est le plus pénible. «Pour de nombreuses femmes, travailler dans les soins, la restauration, aux caisses des magasins et dans la logistique représente un effort physique incroyable. Quand on a tous les jours mal au dos, aux bras et aux pieds, une année c’est très long», considère la syndicaliste.

C’est dans le groupe d’âge des plus de 60 ans que l’on dénombre le plus de personnes inscrites au chômage, dès lors repousser le départ à la retraite ne peut qu’aggraver cette situation. «Même dans les secteurs où les employeurs se plaignent de la pénurie de main-d’œuvre qualifiée, le nombre de femmes âgées au chômage a fortement augmenté. Montrez-moi un employeur qui embauche une femme de 64 ans», pointe Vania Alleva, en qualifiant AVS 21 de «réforme dévastatrice et irrespectueuse».

Si les femmes et, par extension, les couples devaient toucher moins de rente, cela ne nous empêchera pas de payer plus! Le Conseil fédéral et la droite veulent en effet apporter un financement additionnel à l’AVS via la TVA. Le taux ordinaire serait relevé de 0,4 point portant la taxe à respectivement 8,1%. «Cumulée avec la hausse brutale de primes maladie prévue, cette augmentation accablera la population de 4 à 5 milliards de prélèvements obligatoires supplémentaires qui s’ajouteront aux 10 milliards de l’inflation», note, pour sa part, Pierre-Yves Maillard, le président de l’USS. Une personne au salaire moyen doit s’attendre à une baisse de revenu de 1600 francs par an. Ce financement additionnel fait l’objet d’une votation séparée, raison pour laquelle il est appelé à voter deux fois «non» le 25 septembre.

AVS 21 n’est qu’une première étape

AVS 21 serait partie intégrante d’une stratégie visant à affaiblir les deux premiers piliers, dénonce le socialiste: «Les banques, les assurances et leurs relais politiques ont lancé le combat frontal contre nos retraites. L’attaque porte à la fois sur l’AVS et la LPP, elle doit réduire la part de marché de l’AVS et de la LPP dans la prévoyance vieillesse et faire de la place au 3e pilier qui permet l’accumulation de profits. En même temps que les demandes d’économies dans l’AVS s’accumulent, les projets d’augmenter les facilités fiscales pour cotiser au 3e pilier se multiplient.»

AVS 21 n’est qu’une première étape, préviennent la gauche et les syndicats. Le Parlement a demandé au Conseil fédéral de lui soumettre une nouvelle réforme des retraites d’ici à 2026 qui pourrait entraîner un relèvement de l’âge de référence. La retraite à 66 ou 67 ans est déjà programmée.

Or, l’espérance de vie en bonne santé n’est que de 69,8 ans pour les hommes et 70,8 ans pour les femmes, selon les derniers chiffres datant de 2017. Pas de quoi profiter longtemps de la retraite, surtout pour les personnes ayant connu les conditions de travail et de vie les plus pénibles. Les 82% des personnes de 65 ans et plus avec une formation supérieure se déclarent en bonne santé, contre seulement 58% de celles ayant suivi la scolarité obligatoire.

Avocate, économiste ou gestionnaire de fortune, les femmes de droite qui sont montées au créneau pour défendre AVS 21 jouent dans la première catégorie. Selon une enquête du Blick, le Centre, le PLR et l’UDC ont reçu 150000 francs chacun de l’Union patronale pour mener campagne en faveur d’AVS 21. La droite patronale va injecter des millions pour nous faire avaler la pilule AVS 21, mais si le camp progressiste est largement moins doté, il peut s’appuyer sur ses arguments.

En 2017, dans le cadre de Prévoyance vieillesse 2020, le peuple avait déjà refusé de faire travailler les femmes plus longtemps. Ce paquet proposait une augmentation des rentes de 70 francs.

Cette fois, la compensation prévue ne concerne que les femmes âgées de 55 ans et plus au moment de l’entrée en vigueur de la réforme, qui toucheront un maigre supplément mensuel de 50 à 160 francs suivant les revenus.

Les créateurs de l’AVS «avaient de l’ambition pour notre pays et une forme de respect pour le monde du travail», deux qualités qui, le déplore Pierre-Yves Maillard, sont en train de disparaître. «Par notre campagne, nous voulons les reconquérir.»


Site de campagne sur: avs21-non.ch

Les finances de l’AVS sont saines

Ne faut-il tout de même pas prendre des mesures pour faire face au «papy-boom» et au grand nombre de départs à la retraite prévu? Selon les projections de l’Office fédéral des assurances sociales, l’AVS entrera dans le rouge dès 2025. Il devrait manquer 15,9 milliards de francs d’ici à 2032. Sauf qu’on peut douter de ces prévisions. Le Conseil fédéral commet en effet des erreurs de calculs à répétition. En 2011, les autorités prévoyaient que la fortune de l’AVS allait fondre vers 2020. Or, l’an passé, le fond de compensation AVS a été augmenté de 2,6 milliards de bénéfices pour atteindre 47 milliards, son plus haut niveau de l’histoire. «En dix ans, la marge d’erreur du Conseil fédéral aura été de vingt milliards environ. Et cela continue: entre l’année passée et maintenant, ses prévisions jusqu’à 2032 ont été corrigées de plus 16 milliards», indique Pierre-Yves Maillard, qui assure que les finances de l’AVS sont «saines».

De l’argent, il y en a. L’USS et le Parti socialiste ont lancé au printemps une initiative afin qu’une partie des gains de la Banque nationale soient reversés à l’AVS. L’institution a accumulé plus de 1000 milliards. De quoi, non seulement garantir l’avenir de l’AVS, mais aussi augmenter les rentes. La gauche et les syndicats ont d’ailleurs déposé l’année dernière une initiative pour une treizième rente AVS sur laquelle nous voterons l’année prochaine. Nombre de rentiers doivent se débrouiller avec un revenu situé en dessous du seuil de pauvreté, c'est là que se situe le vrai problème des retraites en Suisse, estiment en substance les opposants.

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