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Crash sur les salaires

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© Neil Labrador/Archives

Les autorités zurichoises estiment que le personnel naviguant d’AirBaltic, opérant sous la bannière Swiss, n’est pas considéré comme détaché. Le syndicat kapers vient de déposer un recours.

Début septembre, la Direction des affaires économiques du canton de Zurich a statué que les employés de cabine d’Air Baltic n’étaient pas considérés comme du personnel détaché, bien qu’ils opèrent au départ de Zurich sous la bannière de Swiss et dans des avions de la même compagnie. 
Les autorités prétendent qu’en dehors de la maintenance au sol, le contrat de wet lease avec Air Baltic ne présente aucun rapport avec la Suisse qui justifie l’application de salaires suisses.
Le syndicat du personnel de cabine kapers est tout de suite monté au créneau, dénonçant avec la plus grande fermeté une décision jugée lourde de conséquences. «Affaiblir la protection du personnel navigant, c’est ouvrir les vannes au dumping salarial dans tous les secteurs, dénonce Sandrine Nikolic-Fuss, présidente du personnel de kapers. Faire entrer les standards de dumping dans les airs, c’est les amener aussi au sol.» Le syndicat, aux côtés d’anciens employés, a déposé un recours auprès du Tribunal administratif du canton de Zurich le 16 septembre.

Salaires divisés par deux

Revenons sur les faits. Depuis 2022, la compagnie lettone Air Baltic vole pour le compte de Swiss au départ de Zurich. On appelle cela du wet lease. Les équipages portent l’uniforme d’Air Baltic, mais fonctionnent au sein de l’appareil opérationnel de Swiss. Les salaires, en revanche, sont conformes aux standards lettons, à savoir environ 1500 francs bruts par mois, contre 3868 francs pour le salaire de base en Suisse, soit entre deux et trois fois moins. 
Or ils assument les mêmes responsabilités que les équipages Swiss: assurer la sécurité des passagers, participer aux briefings et effectuer les contrôles sécuritaires de la cabine, coordonner l’embarquement, appliquer les procédures d’urgence et d’évacuation et prodiguer, le cas échéant, les premiers soins médicaux. Ils sont formés à la lutte contre l’incendie à bord, à la gestion et à la désescalade de passagers agressifs ou violents, ainsi qu’à la protection de l’équipage et des passagers en situation de crise.

Différence d’interprétation

Pour kapers, cette inégalité de traitement n’est pas tenable. Le Seco est saisi. «Après deux ans de procédure, ce dernier ainsi que l’Office de l’économie du canton de Zurich ont statué que c’était bien du détachement de personnel» rapporte la syndicaliste, aussi maître de cabine chez Swiss depuis 26 ans. Mais Swiss et Air Baltic ont attaqué cette décision en déposant un recours auprès de la Direction de l’économie du canton de Zurich – laquelle a finalement rendu un jugement contraire aux premières instances.»

En effet, bien que les équipages d’Air Baltic opèrent des vols Swiss au départ et à destination de Zurich, y effectuent leurs briefings, y séjournent plusieurs jours d’affilée, y assurent des services de réserve et logent dans des hôtels, l’autorité nie tout rapport significatif avec la Suisse, nie la notion de travailleurs détachés et donc les obligations qui en découlent. 

«Le travail suisse est externalisé, exerçant une pression à la baisse sur les salaires, et les emplois locaux sont progressivement remplacés par du personnel employé à moindre coût via des contrats hors du cadre légal suisse, alarme la présidente de kapers. Cette pratique exploite leur travail et sape la protection salariale en Suisse. Quant aux mesures d’accompagnement, qui étaient censées empêcher le dumping salarial, le cas d’Air Baltic démontre que, dans les faits, elles échouent.»

Revendications

Dans ce contexte de turbulences, kapers a plusieurs exigences. Tout d’abord, que les mesures d’accompagnement et de lutte contre le dumping salarial soient strictement appliquées, tout comme la protection des emplois en Suisse contre ces modèles de sous-enchère. «Nous prônons qu’à travail égal, il y ait un salaire égal et une protection égale», conclut Sandrine Nikolic-Fuss, qui revendique par ailleurs aucun contournement du droit du travail suisse dans l’aviation. «Enfin, nous demandons des droits syndicaux pleins et entiers pour les équipages étrangers en wet lease, lorsqu’ils sont déployés en Suisse.» 

Une «erreur manifeste» selon les syndicats

De son côté, l’Union syndicale suisse (USS) dénonce un jugement «erroné et inacceptable» qui «accentue la pression sur les salaires dans l’aviation». Pour la faîtière, qui réagit par voie de presse, les vols opérés par Air Baltic pour le compte de Swiss relèvent clairement d’un cas de détachement de personnel. «Dès lors, les salaires suisses doivent prévaloir. Ce nouveau revers infligé à la protection des salaires n'est pas une première: la Direction des affaires économiques zurichoise avait déjà refusé par le passé d’intervenir contre la pression sur les salaires et le dumping salarial, dans le commerce de détail, l’industrie des machines ou la construction». Les syndicats s’opposent fermement à ce que Swiss externalise ses vols à des sous-traitants qui ne versent pas de salaires suisses. «La pression sur les salaires est déjà énorme aujourd’hui. Swiss recrute de plus en plus à l’étranger, le revenu de nombreux travailleurs et travailleuses ne leur permettant plus de vivre à Zurich. Si l’on autorise les entreprises suisses à employer du personnel à des salaires plus bas en recourant à des sous-traitants étrangers, la pression sur les salaires ne fera qu’augmenter.» La seule issue à cette faire selon l’USS est que soient appliqués des salaires suisses chez Air Baltic. 

Zoom sur kapers

Le syndicat kapers, kapers Cabin Crew Union de son nom complet, a été fondé en 1971 et est la plus grande association représentant les équipages de cabine des compagnies aériennes en Suisse. kapers s'engage à défendre les droits de ses membres et à améliorer leurs conditions de travail, tant au niveau national qu’international. Il est membre de l’Union syndicale suisse (USS) depuis une vingtaine d’années. 

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