La piste plébiscitée des vacances...
Stress, troubles anxieux, sentiments négatifs, dépression: près de deux tiers des jeunes en apprentissage souffrent de problèmes psychologiques, 61% exactement qui rencontrent des difficultés survenues durant leur formation ou aggravées dans ce contexte. Et ce sans bénéficier d’une aide adéquate. Sans pouvoir s’assurer de la compréhension de l’entreprise formatrice face à leurs soucis personnels. Voilà ce que révèle une enquête réalisée par WorkMed auprès de plus de 45000 apprenties et apprentis. Le centre de compétence de psychiatrie du travail a ausculté la santé mentale de cette population. Et, s’il estime que l’apprentissage a un effet positif en la matière, il souligne l’importance de prendre des mesures en faveur de jeunes en détresse psychique. Un sentiment de nécessité largement partagé par les syndicats parvenus aux mêmes conclusions. Unia en particulier avait réalisé, bien qu’à une autre échelle, un sondage pointant les pressions, l’épuisement et le risque de décrochage des apprentis. Avec des journées souvent interminables ainsi que des cours et des examens surchargeant encore le bateau. Et laissant planer l’ombre du surmenage. Un comble à cet âge, alors que ce premier pas dans la vie active devrait non pas décourager les nouveaux arrivants, mais susciter leur enthousiasme. A travers la possibilité d’apprendre un métier en principe librement choisi, de gagner un peu d’argent et d’acquérir de l’autonomie.
La santé mentale des apprentis reste largement tributaire de l’accompagnement et de l’écoute des personnes formatrices. Valoriser les compétences du jeune, lui faire confiance, lui témoigner de la reconnaissance jouent un rôle majeur dans la construction de l’estime de soi. Et dans le début d’un parcours professionnel réussi.
Sans surprise, l’enquête précitée met en évidence le lien entre le degré de satisfaction des sondés et un climat de travail agréable, le soutien de l’équipe comme celui des maîtres d’apprentissage et du corps enseignant. Ces conditions semblent pourtant, près d’une fois sur deux, faire défaut. Seuls 56% des interviewés recommanderaient sans hésiter leur entreprise à l’aune de ces critères. Un chiffre qui laisse pour le moins songeur.
Dans tous les cas, les jeunes confrontés à des difficultés devraient bénéficier d’un suivi spécifique gratuit, confidentiel avec garantie d’anonymat. Un investissement pour l’avenir. Le nombre des 18-24 ans percevant des rentes AI en raison de problèmes psychologiques ne cesse d’augmenter. La préservation de la santé des apprentis passe aussi par davantage de vacances. Une lettre ouverte dans ce sens a été adressée au Conseil fédéral. Plus de 167000 personnes l’ont déjà soutenue, plaidant en faveur de huit semaines de relâche. Rien d’exagéré dans la requête, sachant que les gymnasiens en bénéficient de treize. Une différence de traitement, à la sortie de l’école obligatoire, parfaitement injuste. Comme si les apprentis n’avaient pas autant besoin de repos, alors que leur énergie et leur concentration sont autant sollicitées que leurs pairs en classe. Ces deux mois réclamés auraient aussi pour effet de limiter les défections – un quart des adolescents intégrant la filière abandonne en cours de route – et de remotiver les candidats potentiels. Pilier central de l’économie suisse et de son système éducatif, l’apprentissage dual se révèle en effet en perte de vitesse, et devient moins attractif. Autant dire qu’il reste une importante marge de progression pour éviter que la formule que d’autres pays nous envient ne s’essouffle. Et qui, dans ce cas, compterait aussi les entreprises parmi les perdants...