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Salaire minimum: Bienne et Berne font bouger les lignes

Le comité, qui réunit partis de gauche, associations progressistes et syndicats, a présenté son initiative le 1er Mai sur la place Centrale de Bienne.
© Alain Meyer

Le comité, qui réunit partis de gauche, associations progressistes et syndicats, a présenté son initiative le 1erMai sur la place Centrale de Bienne.

Après les cantons, les villes prennent la défense du salaire minimum à bras-le-corps. Bienne et Berne viennent de lancer des initiatives après Zurich et Winterthour

L’heure du rattrapage a sonné dix ans après le camouflet infligé par le peuple suisse, à 76%, à l’initiative pour la reconnaissance d’un salaire minimum sur tout le territoire. Les cantons de Neuchâtel, Jura, Genève, Tessin et Bâle-Ville ont depuis sauté le pas. D’autres initiatives cantonales devraient passer aussi par les urnes en Valais, Fribourg, Soleure, Vaud et Bâle-Campagne. Une lame de fond est à l’œuvre. A Zurich et à Berne, ce sont les villes qui prennent les devants. Celles de Kloten, Zurich et Winterthour avaient déjà enclenché le mouvement avec des résultats probants l’an passé. Pour rappel, un salaire minimum fixé à 23,90 francs l’heure a été plébiscité en juin dernier à près de 70% à Zurich. Une revalorisation concernant 20000 salariés. A Winterthour, la population s’était prononcée à 65% en faveur de l’initiative syndicale réclamant 23 francs l’heure. Le vote de Kloten s’était conclu en revanche par un échec. A Zurich, des recours ont été déposés, mais rejetés déjà par le Conseil de district. La question de la légitimité qu’ont les villes d’instaurer un salaire minimum pourrait être tranchée in fine par le Tribunal fédéral, alors que ce régime aurait déjà dû entrer en vigueur dans les deux villes en janvier. Ce retard n’empêche pas d’autres d’insister. Pour le 1er Mai, la gauche plurielle a lancé simultanément à Berne et à Bienne deux initiatives populaires qui exigent un salaire décent pour vivre, peu importe la branche, pour tout travail sur le territoire communal. 

«Le problème à la racine» 

Celui-ci a été fixé à 23,80 francs l’heure pour les deux cités avec indexation automatique chaque 1er janvier. Aux socialistes, Verts et syndicats se sont joints des mouvements d’entraide comme Caritas. A Bienne, le collectif afroféministe CABBAK a aussi fait sien ce combat. Face aux faibles rémunérations dans l’hôtellerie, la restauration rapide, le nettoyage, le commerce de détail, le travail domestique ou les services de livraison, «les femmes noires et migrantes subissent une triple pénalisation», s’insurge Ruth Kilezi, l’une de ses membres. «Pour garantir leur maintien sur sol suisse, elles sont enclines à accepter des emplois précaires à bas salaire par nécessité, ce qui les pousse dans la précarité avec des effets sur leur santé et sur leur retraite», explique-t-elle. Argument repris par Anna Tanner, active dans le social et députée socialiste au Grand Conseil bernois. A Bienne, sa ville, où le taux de personnes devant recourir à l’aide sociale est l’un des plus élevés du pays, «il faut prévenir la pauvreté et protéger les working poor qui travaillent à 100% mais ne parviennent pas à vivre de leur paie, les obligeant à cumuler les jobs». Au risque d’y laisser leur santé. «Le salaire minimum est une mesure de politique sociale prenant le problème à la racine», argumente-t-elle. Déposer une motion au Grand Conseil l’a d’ailleurs effleurée. «Nous avons réfléchi à lancer cette initiative au niveau cantonal, mais les chances d’aboutir étant minces à cause d’un Parlement à droite, nous avons opté pour les villes en espérant un effet boule de neige.» 

CCT comprises 

A Bienne, ce salaire plancher, dont ne bénéficieront pas les apprentis, les stagiaires et les moins de 18 ans pour les jobs d’été par exemple, s’appliquerait également aux branches liées par des conventions collectives de travail (CCT) et par des contrats-types. Un partenariat social est demandé regroupant au sein d’une commission consultative autorités locales, syndicats et patronat. La Ville, ou un organe désigné par celle-ci, pourrait se charger du contrôle des employeurs. Si des infractions sont observées, elles pourraient faire l’objet de signalements de la part des employés auprès d’un service d’accueil. Les entreprises auraient 30 jours pour s’expliquer. Sans quoi ce sera l’amende, voire une suspension des marchés publics. A Bienne comme à Berne, les initiants ont maintenant six mois pour récolter des signatures. Présent le 1er Mai à Bienne, le président de l’Union syndicale suisse, Pierre-Yves Maillard, a salué les deux tentatives. Dans la foulée, il a menacé de lancer un référendum pour contrer la droite sous la Coupole fédérale, qui s’affole que cette vague mette à mal les CCT et la paix du travail. 

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