Témoignage
«Ma vie est ici», Kader*, 17 ans.
«Je suis arrivé en Suisse le 10 août 2019. Avant, j’étais à Paris. Je viens d’Algérie, j’ai parcouru onze pays à pied pendant un an et trois mois avant d’arriver en Europe. Chez moi, ce n’est pas la guerre, mais même en faisant les meilleures études, à la fin il n’y a pas de travail, ou alors, c’est pour gagner 100 francs par mois. Ma famille est restée au bled. Je suis venu ici car on m’a dit: “Tu verras, en Suisse, il y a de l’argent partout, même par terre.” Je me suis vite rendu compte que ce n’était pas vrai. A Genève, j’ai d’abord été logé à l’hôtel Aïda, c’était la galère… Il y avait la gale, des punaises de lit… Maintenant, je suis dans un foyer depuis trois semaines. Nous sommes 19 au total, deux par chambre, et il y a quatre douches. L’été dernier, j’ai fait deux demandes: l’accès à l’école et au sport, ainsi qu’une consultation médicale et je n’ai toujours rien eu. Je ne touche aucune aide financière. Je suis présent au Grütli parce que je demande qu’on soit traité dignement et qu’on ait tous les mêmes chances.
Ma vie est ici, je n’ai pas envie de partir, c’est ici que je veux être. Je veux parler un français parfait, comme les gens d’ici. Je veux faire partir d’un club de sport, travailler, me marier, avoir des enfants. Je veux m’intégrer, vivre avec les Suisses, comprendre leur culture. Rester dans ce foyer avec des gens comme moi ne me fera pas avancer, je veux découvrir des choses. Je m’intéresse à l’histoire de Genève et j’ai couru la Course de l’Escalade. J’aide aussi les autres jeunes qui dorment dans la rue, car je suis passé par là, je sais ce que c’est. Je pense que j’aimerais faire du social plus tard.»
*Prénom d’emprunt.