Dans une pétition munie de 24000 signatures, l’ONG Public Eye demande au Conseil fédéral des mesures concrètes contre la corruption
«Monsieur le Conseiller fédéral, c’est à vous de jouer! Il faut en finir avec les sociétés-écrans anonymes, la corruption et le blanchiment d’argent. 24000 personnes soutiennent les revendications de Public Eye.» La pétition remise par l’ONG à Berne mercredi 19 janvier était accompagnée d’une action virtuelle: une pluie de 24 millions tombant sur le Palais fédéral pour «corrompre» le ministre des finances Ueli Maurer. Un juteux «pot-de-vin» constitué de 24000 faux billets, soit autant que les signatures de la pétition, valant chacune 1000 francs, à l’effigie du ministre pour qu’il agisse contre la corruption «made in Switzerland».
Pour Public Eye «la Suisse et sa place financière jouent un rôle central dans la quasi-totalité des scandales de corruption internationaux. Les populations et les pays du Sud en sont les grands perdants.» Au niveau mondial, la perte estimée est de 3600 milliards de dollars chaque année. Une image: rien qu’un milliard, en billets de mille empilés, atteint 130 mètres de hauteur, soit celle du jet d’eau de Genève…
La pétition demande que la Suisse établisse un registre public des bénéficiaires économiques des entreprises. «Cela permettrait d’identifier les personnes qui se cachent derrière des sociétés-écrans et autres constructions juridiques. La publication de ces noms est l’une des mesures les plus efficaces pour lutter contre la criminalité économique. Plus de cent pays se sont déjà engagés à mettre ces informations à disposition du public. Mais la Suisse est toujours à la traîne», dénonce Public Eye.
Etendre la loi sur le blanchiment
Des obligations de diligence raisonnable doivent également être imposées aux conseillers et conseillères de sociétés-écrans. Déjà en 2016, rappelle l’ONG, les révélations des «Panama Papers» avaient mis en lumière le rôle d’avocats et de fiduciaires suisses dans la création et l’administration de ces constructions juridiques qui «servent souvent à dissimuler des activités illégales ou illégitimes». «Pour y mettre un terme, la Suisse doit étendre la portée de sa loi sur le blanchiment d’argent», explique Public Eye. Or au printemps dernier, la majorité bourgeoise du Parlement a refusé d’étendre cette législation.
Après les révélations des «Pandora Papers», plusieurs interventions de parlementaires ont été déposées pour demander que les lacunes du dispositif de lutte contre le blanchiment d’argent et la corruption soient enfin comblées. La motion du socialiste neuchâtelois Baptiste Hurni demande par exemple l’introduction d’un registre public des ayants droit économiques des sociétés (offshore) et de trusts. «Les organes législatifs se voient ainsi proposer divers instruments efficaces pour rendre la Suisse moins attrayante pour le blanchiment d’argent et autres actes criminels», écrit Public Eye. Au niveau international également, une révision pour renforcer la transparence est en cours. Elle est dirigée par le Groupe d’action financière (GAFI), organe qui définit les normes minimales en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et contrôle leur application dans ses 37 Etats membres, dont la Suisse qui en fait partie.
Plus d’informations sur: publiceye.ch