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La Loi sur l’égalité est insuffisante

inégalités salariales
© Thierry Porchet

Unia exige des analyses salariales régulières et obligatoires pour toutes les entreprises ainsi que des contrôles et des sanctions efficaces à l’encontre des entreprises qui n’agissent pas contre les discriminations salariales. 

Plus de 50% des employeurs manquent à leurs obligations d’analyser l’égalité des salaires, pointe un rapport. Unia réclame urgemment une nouvelle révision de la loi.

Le constat est édifiant: plus de la moitié des entreprises ne prennent pas leurs responsabilités en matière d’analyse de l’égalité salariale. C’est ce qu’a révélé le Conseil fédéral le 7 mars, en se basant sur un bilan intermédiaire mené par l’Office fédéral de la justice (OFJ).

Pour rappel, conformément à la modification de la LEg adoptée par le Parlement en 2018, les entreprises de 100 salariés et plus doivent réaliser une analyse interne de l'égalité des salaires, et ce depuis le 1er juillet 2020, dans un souci de garantir le même salaire pour un même travail.

L'employeur a trois obligations: tout d'abord, il doit réaliser une analyse visant à déterminer s'il existe dans son entreprise des inégalités de salaires systématiques non explicables entre les femmes et les hommes; il est ensuite tenu de faire vérifier l'analyse par un organe indépendant; et enfin, il doit en communiquer les résultats aux employés.

Il s’avère qu’un cinquième des entreprises n’a pas procédé à de telles analyses, qu’un tiers d’entre elles n’a pas fait vérifier les analyses et que la moitié n’a pas publié les résultats… L'étude indique que les causes potentielles du phénomène sont le manque de conscience du problème, le manque de connaissance des obligations légales et l'absence de sanctions en cas de manquement. L’Union syndicale suisse (USS) le déplore dans un communiqué de presse, mais elle avait vu juste: «Ce sombre bilan confirme malheureusement ce que les syndicats ont martelé depuis le début des débats sur la révision de la LEg: les mesures non assorties de contrôles ni sanctions ne suffisent pas.»

Plus de contrôles et des amendes!
Selon Unia, qui a également réagi par voie de presse, ces résultats sont aussi décevants que scandaleux. «La révision de la loi n’a pratiquement pas endigué les différences de revenus discriminatoires. Surtout, les entreprises ignorent les inégalités salariales et le mandat de la Loi sur l’égalité qui est en soi déjà insuffisant.»

Pour le syndicat, qui est aussi membre de la coalition contre les discriminations salariales, une nouvelle révision de la Loi sur l’égalité s’impose de toute urgence. Les revendications sont les suivantes: des analyses salariales régulières et obligatoires pour toutes les entreprises, quelle que soit leur taille; des contrôles par les pouvoirs publics et des sanctions efficaces à l’encontre des entreprises qui n’agissent pas contre les discriminations salariales; et enfin, que les résultats soient clairement communiqués au personnel.

L’USS appelle les employeurs qui n’ont pas respecté la loi à la mettre impérativement en œuvre. «Le Conseil fédéral et le Parlement doivent également agir rapidement pour corriger la situation. Pour les syndicats, il est incompréhensible que le Conseil fédéral ait décidé d’attendre l’évaluation finale de la LEg prévue pour fin 2027 avant de proposer des mesures pour atteindre l’égalité salariale. Le rapport d’évaluation intermédiaire publié le 7 mars dresse un bilan bien assez clair pour justifier tout de suite des mesures plus contraignantes pour les entreprises.» 

Des salaires plus hauts pour les femmes!

Plantons le contexte. Deux tiers des femmes travaillent à temps partiel et se chargent toujours des deux tiers du travail de care non rémunéré. Cela se traduit en définitive par des pertes de salaire importantes, de la pauvreté et la dépendance économique. Les femmes gagnent en moyenne toujours 1354 francs de moins par mois que les hommes, soit 16,2% (valeur pour 2022). Par ailleurs, selon la dernière enquête suisse sur la structure des salaires, près de la moitié de la différence de rémunération entre les sexes, secteurs privés et publics confondus, ne s’explique pas par des facteurs objectifs, comme la branche, la formation ou l’âge. Cette part inexpliquée n’a jamais été aussi haute depuis le début des analyses en 2012.
Les syndicats s’accordent à dire que les femmes, en Suisse, doivent pouvoir vivre correctement de leur travail sans aucune discrimination.
«Même avec un CFC en poche, quatre femmes sur dix gagnent moins de 5000 francs par mois, et une sur quatre doit même se contenter d’un salaire de moins de 4500 francs», dénonce l’USS. «C’est pourquoi les mesures de contrôle dans les entreprises doivent s’accompagner d’une offensive de revalorisation salariale générale dans les professions majoritairement exercées par les femmes.» Pour la faîtière syndicale, des salaires d’au moins 5000 francs après l’apprentissage et d’au moins 4500 francs pour tout le monde doivent devenir la norme. C’est dans des secteurs comme la prise en charge d’enfants, les soins aux personnes âgées ou le commerce de détail qu’une telle revalorisation est la plus urgente. 

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