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«Ceux qui sont contre l’immigration, devraient voter pour une récession»

Homme sur une estrade
©Thierry Porchet

Le président de l'Union syndicale suisse (USS), Pierre-Yves Maillard, lors de son intervention au congrès d'Unia. 

Président de l’Union syndicale suisse, Pierre-Yves Maillard a fait un passage remarqué sur l’estrade du congrès d’Unia.

«Je suis toujours impressionné par la discipline et par la qualité des interventions des militantes et militants, surtout après deux nuits qui, pour certains d’entre vous, ont été assez festives.» Pierre-Yves Maillard, qui a participé en partie à la partie récréative évoquée, s’est surtout fait remarquer par un passage enlevé au congrès de Brigue. Courte mais saignante, son allocution du 25 octobre – reportée d’un jour à la suite d’un imprévu – a pointé quelques enjeux majeurs en matière de luttes syndicales et de débats politiques qui occupent le pays. Avant d’y plonger, le Vaudois a félicité le syndicat pour le choix du Valais comme siège de son grand rendez-vous. «Ce canton a été une terre ouvrière pour la construction des barrages, des ponts et des tunnels qui ont marqué l’essor économique de notre pays. Ces grands chantiers ont été menés à bien par des ouvriers d’ici mais aussi et surtout par des ouvriers venus d’ailleurs.» 

Contrer l’UDC
L’ombre de la tragédie de Mattmark a surgit alors inévitablement, à soixante ans d’une catastrophe qui a coûté la vie à 88 personnes, dont 56 Italiens. Ce passé dramatique doit retentir dans les esprits, aujourd’hui encore, c’est ce qu’a souhaité l’invité: «A ceux qui perdent la mémoire, il faudra rappeler cette histoire lors de la prochaine initiative de l’UDC pour une Suisse à 10 millions. Depuis plus de cinquante ans, on vote régulièrement sur l’immigration et l’asile. Le principal parti de droite en a fait son principal thème de campagne et depuis des décennies, la politique suisse ou la population acceptent des mesures qui vont petit à petit dans le sens de ce parti.» 

Aux mesures restrictives, voire xénophobes, qu’offre au peuple la formation agrarienne, Pierre-Yves Maillard a opposé le constat que font depuis longtemps les forces progressistes. A savoir que la croissance de l’immigration est étroitement liée à la croissance économique d’un pays. C’est parce que la conjoncture en Suisse se porte bien que les employeurs – dont une part conséquente est issue du parti de droite ou vote dans ce sens – font appel à la main-d’œuvre étrangère. Dès lors, une évidence doit s’imposer à tout le monde: «Celles et ceux qui veulent vraiment une baisse de l’immigration, devraient voter pour une récession. Pour plus de chômage, moins de recettes pour l’AVS et moins de recettes pour les services publics. Et donc pour plus de pauvreté et plus d’austérité pour les habitants de notre pays.» Voilà à quoi conduira, si acceptée, la dernière initiative de l’UDC. Avec, pour corollaire, le retour en force des permis de séjour au rabais et des statuts de plus en plus précaires pour les migrants. «Les travailleurs et travailleuses viendront tout aussi nombreux depuis l’étrangers, mais ils auront moins de droits et seront davantage exploités, en accroissant la concurrence avec celles et ceux qui travaillent déjà en Suisse. Il faut limiter cette concurrence et mieux protéger les salaires, c’est la stratégie que nous développons depuis trois décennies.»

Protéger les salaires
Cette même orientation est appliquée dans les négociations avec l’Europe. Le président de l’USS a souligné que les syndicats ont réussi à mettre en échec le premier accord cadre, qui aurait fragilisé l’ensemble du dispositif de protection des salaires. Dans le nouvel épisode des relations avec l’Europe, il est désormais crucial de se battre contre la libéralisation du marché de l’énergie électrique, voulue par les derniers accords. «Ici, nous n’avons pas de compromis à faire sur une libéralisation qui a été une catastrophe partout où elle a été mise en œuvre.» Il est crucial aussi d’éviter toute atteinte contre la protection des salaires. «Dans ce domaine, nous pouvons continuer de décider de l’intensité des contrôles, de manière paritaire avec les représentants des salariés et des patrons.» S’ajoute l’exigence exprimée par l’USS de la mise en place de quatorze mesures internes de compensation dans des domaines spécifiques, un paquet déjà accepté par le Conseil fédéral et mise en consultation. 

Dans une économie nationale qui affiche les signes d’une prospérité solide, Pierre-Yves Maillard a pointé, pour conclure, la paupérisation d’une partie de la population. Celle à qui on demande de travailler davantage et qui se retrouve à la fin de l’année avec moins d’économies qu’au début. Contre cette détérioration et contre les solution «fascisantes et d’extrême droite» qu’offre les employeurs, l’intervenant a salué l’action cruciale des syndicats. «Nous sommes la thérapie qu’il faut à cette société, pour qu’elle soit plus démocratique et sociale.» 

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