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Bombes à retardement

Alors que les ravages du changement climatique se font plus que jamais sentir, TotalEnergies avance dans son projet Eacop (East African Crude Oil Pipeline) qui prévoit la construction du plus long oléoduc chauffé (à 50 degrés pour éviter la solidification du pétrole) de l’Ouganda à la Tanzanie. Soit 1443 kilomètres de conduites. Les mobilisations et les plaintes déposées devant les tribunaux par de nombreuses organisations environnementales et de défense des droits humains n’ont pas (encore du moins) réussi à stopper le mastodonte. Les premiers forages ont commencé en janvier en Ouganda. Depuis juillet, des routes et des puits pétroliers se construisent dans le parc naturel des Murchison Falls, faisant fuir nombre d’éléphants. Ceux-ci mettent en danger les cultures des communautés avoisinantes, en proie déjà aux inondations provoquées par les travaux de terrassement pour la construction de l’usine, et aux accaparements préalables de certaines terres.

Ce projet d’envergure n’est, pourtant, que la pointe de l’iceberg de l’extractivisme mortifère de TotalEnergies. La multinationale est impliquée dans plus d’une trentaine de projets d’extraction d’énergies fossiles écocidaires dans 14 pays. Le rapport publié le 25 octobre par Greenpeace France intitulé «Les bombes climatiques de TotalEnergies, la forêt derrière l’arbre Eacop» est sans appel. Des «bombes», car leurs émissions de gaz à effet de serre prévues se chiffrent en milliards de tonnes de CO2. Par ailleurs, bon nombre de projets se trouvent à moins de 50 kilomètres de zones de biodiversité protégée et souvent dans des Etats en guerre ou jugés «autoritaires».

Depuis 2015, TotalEnergies est impliquée plus largement dans l’acquisition de nouvelles licences d’exploration fossile pour 84 projets, faisant fi du rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) demandant l’arrêt du développement de nouvelles infrastructures fossiles. Une action en justice avait été déposée en 2020 déjà par une coalition d’ONG et de seize collectivités publiques, dont les Villes de Paris et de New York, pour obliger TotalEnergie à s’aligner sur l’Accord de Paris. Or, en juillet dernier, elle a été jugée irrecevable par le tribunal de Paris pour des questions de procédure. En septembre, des associations ont cette fois déposé une plainte pénale pour «homicide involontaire», entre autres accusations. Reste que la multinationale a de quoi s’offrir des avocats et des lobbies puissants. En 2022, elle a réalisé 19,5 milliards d’euros de bénéfice. Et si la société française se targue de placer le développement durable au cœur de sa stratégie, les énergies renouvelables ne représentent encore que 0,2% de sa production. Face à ce cynisme sans fond, peut-on encore espérer des décisions, à hauteur de la crise, des responsables politiques lors de la COP 28 prévue dans quelques semaines… à Dubaï?

Le rapport complet sur: greenpeace.fr