«Méfions-nous d’une nouvelle entourloupe»
Denis Gravouil, secrétaire confédéral de la CGT et responsable de la protection sociale, répond à nos questions.
Qu’est-ce qui a fait plier le gouvernement français?
Deux éléments ont été déterminants. D’abord, l’illégalité du mode de calcul, un tel coefficient ayant déjà existé par le passé dans un règlement européen annulé en justice, et, ensuite, la formidable mobilisation de nos syndicats en Suisse, au Luxembourg, en Belgique et en France, ainsi que d’associations de frontaliers. Des élus ont été saisis, la colère était très grande: à toute vitesse dans un contexte politique français très fragile, le gouvernement a battu en retraite.
Quels sont les points sur lesquels les syndicats devront être vigilants?
Le décret qui met en œuvre les nouvelles règles doit être publié avant le 31 décembre 2024 par le nouveau gouvernement. Méfions-nous d’une nouvelle entourloupe tant que cela n’est pas fait. Par ailleurs, nous aurons un délai de deux mois pour saisir la justice afin de contester des dispositions du texte final. Nous sommes entrain d’y réfléchir.
La CGT est le seul syndicat à s’être opposé à cette réforme: pourquoi?
Il faudrait leur poser la question. La CGT est la seule organisation à rassembler les chômeurs dans une structure spécifique pour défendre leurs droits particuliers. Nos collègues, en souhaitant échapper comme nous aux réformes terribles des gouvernements Macron, ont cru pouvoir négocier avec le patronat. Mais celui-ci n’a qu’une visée: baisser les droits pour baisser les cotisations patronales. La CGT s’est retrouvée seule à proposer d’autres solutions, comme l’augmentation des contributions sur les plus hauts salaires, sans succès.
Que dire de cette solidarité syndicale européenne?
Nos confédérations coopèrent activement sur des discussions générales, comme les évolutions du droit européen, les directives européennes et à l’OIT, mais aussi concrètement en organisant des permanences communes pour les travailleuses et les travailleurs frontaliers ou migrants.
Le travail commun, notamment dans les zones frontalières, des zones d’activité de plus en plus connectées, a permis de sonner l’alerte très rapidement pendant les négociations, puis de communiquer ensemble, d’interpeller les élus, les gouvernements, et d’informer les frontaliers. Cette fois-ci, cela concerne l’assurance chômage, mais il y aura d’autres occasions de batailler ensemble sur les salaires et les conditions de travail par exemple. Toutes nos organisations voudront continuer cette coopération très utile.