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Veuf, il doit quitter la Suisse...

Goce Gjorseski, travailleur macédonien, se bat pour garder son permis B

«Nous avons appris le décès de votre épouse survenu le 1er septembre 2005. En vertu des directives fédérales en vigueur, le but de votre séjour est atteint. Nous avons donc l'intention de vous refuser le renouvellement de votre autorisation de séjour et de vous impartir un délai pour quitter notre territoire.» Cette ignoble missive du SPOP, le Service de la population du canton de Vaud, Goce Gjorseski l'a reçue en août 2006, soit presque un an jour pour jour après le décès subit de son épouse, Suissesse, emportée par un cancer foudroyant. C'est le coup d'assommoir pour ce travailleur macédonien affecté par la difficile épreuve du deuil de son épouse avec qui il s'est marié en avril 2004.

Scandaleux!
«Ce qu'écrit le SPOP est scandaleux, pas un mot de condoléance, rien», relève, estomaqué, Eric Voruz, syndicaliste et syndic de Morges. «J'ai écrit au SPOP en septembre, avec l'appui du syndic d'Yverdon où habite Goce Gjorseski pour qu'ils renouvellent son permis B. La réponse est arrivée, fin décembre. Négative. Et il a deux mois pour partir!» Comme il l'avait fait, avec succès, pour la famille Jakupi de Morges, Eric Voruz reprend la lutte contre l'arbitraire du droit des étrangers. Parce que cette histoire le choque, et parce que Goce Gjorseski est un travailleur apprécié, membre du syndicat Unia.
Goce Gjorseski est arrivé en Suisse comme requérant d'asile en juin 2002. Quelques mois plus tard, il rencontre sa femme, une Suissesse, qu'il épousera le 7 avril 2004. Sa femme avait une fille d'un premier mariage, elle-même maman de deux enfants. Comme le dit la pétition adressée au Grand Conseil pour que Goce Gjorseski puisse garder son permis de séjour, sa fille, qui vit elle aussi à Yverdon, reconnaît pleinement son beau-père, et ses deux enfants sont heureux de rencontrer régulièrement leur «grand-papa».

«Chauffeur du mois» chez DPD
Des liens familiaux se créent et se développent et Goce s'investit aussi beaucoup dans son travail. D'abord comme paysagiste, puis dans la restauration et, dès décembre 2004, dans une entreprise de transports de la région lausannoise qui travaille pour DPD, entreprise de livraison des colis. Il est vite reconnu par son employeur pour ses qualités professionnelles. Il lui confie, en plus de son emploi de chauffeur, de nombreuses responsabilités comme la gestion des heures d'un groupe d'employés, la gestion de leurs tournées dans plusieurs régions, celle de l'entretien des véhicules, la tâche de relais pour les questions administratives entre les deux entreprises, ainsi que la formation des nouveaux chauffeurs. Tant son patron de l'entreprise sous-traitante que le responsable qualité de DPD Suisse le soutiennent dans sa démarche pour le renouvellement de son permis B, rappelant dans des courriers la qualité et le sérieux exemplaire de son travail, ses relations appréciées avec ses collègues et les clients. En deux ans, il a aussi été nommé à deux reprises «chauffeur du mois» par les services centraux de DPD.

Travailleur honnête
Goce Gjorseski est révolté par ce qui lui arrive alors qu'il est en Suisse depuis 4 ans et demi, bientôt 5 ans. «Je respecte toutes les lois, je ne vole pas, ne suis pas un trafiquant, je paie mes impôts, pourquoi n'ont-ils pas tenu compte de ma personnalité, regardé si je travaille ou pas? Et je suis encore marié, je n'ai pas divorcé!» s'indigne-t-il alors qu'il ne comprend pas pourquoi les autorités n'ont pas pris en compte tout cela, sa qualité de bon travailleur, de personne honnête. Il se dit déterminé à se battre pour rester, et sauver ce qu'il a pu construire ici avec son épouse, malgré la terrible épreuve de sa disparition alors que personne ne s'y attendait.
Le cas de Goce Gjorseski arrive hélas fréquemment. Si le mariage dure moins de 5 ans, plus de permis... Il ne s'agit pas là de l'application avant l'heure de la nouvelle loi sur les étrangers, qui devrait entrer en vigueur en 2008 et qui va encore durcir le tout, mais de la loi actuelle. Cependant, la jurisprudence a déjà pris en compte des cas de décès durant le mariage et permis à certaines personnes de rester en Suisse. C'est là-dessus que mise son avocat, Me Rossel de Morges, pour déposer un recours auprès du Tribunal administratif contre la décision du SPOP. Pour lui, un large soutien à ce travailleur est également indispensable. D'où l'importance de la pétition au Grand Conseil lancée avec l'aide d'Eric Voruz et le soutien de la commission Suisses-Etrangers de Morges. «Le droit des étrangers est ignoble, note Me Rossel. Face à la terrible pression des candidats à l'immigration dans notre pays, on peut comprendre les motivations à la contenir, mais on aboutit à des situations personnelles impossibles à accepter.»

Sylviane Herranz

La pétition en faveur de Goce Gjorseski peut-être obtenue à l'adresse:
eric.voruz@bluewin.ch