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Nous les avons fait plier!

Par leur lutte, les travailleurs de Prebeton ont arraché un plan social

Après deux jours de grève, les salariés de Prebeton ont fait plier le géant irlandais des matériaux de construction. Un géant dont la stratégie est l'acquisition d'entreprises et le sacrifice des salariés pour engranger davantage de profit. Le plan social est sous toit. Reste à l'appliquer.

«Le soulagement et la joie de samedi dernier sont toujours d'actualité», relevait Armand Jaquier, secrétaire régional d'Unia Fribourg, lors de l'assemblée des travailleurs de Prebeton à Avenches le 18 juin, réunis pour prendre connaissance des résultats de la séance de «rédaction» du plan social tenue la veille. Un plan social arraché par une lutte dure, qui avait débuté le 9 juin par un débrayage, suivi le jeudi 12 juin par le lancement d'une grève illimitée après la tentative de vol des outils de production par la direction (voir notre dernière édition). Un accord sur un plan social avait été trouvé le samedi 14 juin. La grève était levée, mais tout n'était pas encore gagné...
Ce samedi-là, les négociations entre les syndicats Unia et Syna, la commission du personnel et la direction d'Element SA, propriétaire de Prebeton et membre du groupe irlandais CRH, s'étaient déroulées sous la médiation du président et du vice-président de la commission paritaire de la CCT de la branche. Les syndicats ont réclamé un plan social alors que la direction se positionnait en faveur d'une aide au cas par cas. Les médiateurs ont alors fait une proposition, à prendre ou à laisser, dans la demi-heure. Même si elle n'était pas à la hauteur de leurs attentes, syndicats et représentants du personnel l'ont acceptée. Car, explique Armand Jaquier, c'était la première fois que le groupe CRH disait oui à un plan social, qu'il était malgré tout acceptable, et surtout parce qu'un refus aurait signifié une grève très dure, dont l'issue n'aurait rien apporté aux travailleurs.

Irrespect total de la direction
Or le mardi suivant, la direction a tenté de revenir sur ses engagements. «Mépris, suffisance, dédain terrible», Armand Jaquier n'est pas avare de mots pour qualifier l'attitude de la direction. «Ils voulaient limiter au minimum les bénéficiaires, revenaient sur tout», note-t-il. «C'était très dur, nous avons dû nous battre pour chaque point», ajoute Marildo Pagnotto, président de la commission du personnel.
Finalement, syndicats et personnel ont réussi à faire signer un plan social dont ils sont satisfaits. 44 travailleurs sur les 49 employés d'Avenches en bénéficieront. Seuls des cadres en sont exclus. Les trois ouvriers victimes de graves accidents, licenciés en avril, toucheront aussi le plan social, malgré la tentative de la direction de les en soustraire. «Ces personnes ont perdu une partie de leur corps à cause du stress dans cette entreprise, et la direction les considère déjà comme des invalides. C'est ignoble!» s'indigne Armand Jaquier.

Plan social satisfaisant
Valable deux ans, le plan social prévoit des indemnités pour toutes les personnes qui n'auraient plus de travail à Avenches ou à Tavel, autre site d'Element SA. Les indemnités seront calculées en fonction de l'âge, de l'ancienneté, et des responsabilités familiales. Les travailleurs qui refuseront de se rendre à Tavel bénéficieront aussi du plan social. Une retraite anticipée sera accordée aux ouvriers de plus de 62 ans. Et les employés acceptant d'aller à Tavel toucheront 8 francs par jour pour les repas.
Lors de l'assemblée, les syndicats ont encore informé les travailleurs de leurs droits face à une direction peu claire sur les échéances, car si certains ont déjà reçu leur congé, d'autres ne savent toujours pas ce qu'ils vont devenir. Le site doit fermer fin juin, et seule la ligne des garages occupant 7 ou 8 personnes devrait être maintenue quelques mois. Soulagés par l'issue de leur lutte et prêts à parer à de nouvelles surprises, les travailleurs vont aussi célébrer dignement leur victoire, lors d'une grande fête début juillet.

Sylviane Herranz