Non à l’affaiblissement des analyses salariales !

D'après les statistiques officielles, l’écart salarial moyen entre les femmes et les hommes s’élève toujours à environ 17,5% dans le secteur privé, dont près de la moitié ne peut pas s’expliquer objectivement.
Une motion de la droite adoptée au Conseil national vient remettre en question la méthodologie des analyses de salaires, compromettant davantage l’égalité entre les femmes et les hommes.
Le Conseil national a récemment adopté la motion du PLR Peter Schilliger qui demande d’exclure de l’analyse de l’égalité salariale les indemnités pour travail en équipe. Alors qu’il a été récemment démontré que les entreprises n’en font pas assez pour contrôler les salaires et corriger les inégalités, Unia monte au créneau contre cette nouvelle tentative d’affaiblir les analyses salariales.
Quel est l’enjeu de cette motion? «Elle prétend qu’il faudrait exclure de l’analyse les indemnités pour travail en équipe, qui seraient généralement non discriminatoires», explique Unia dans un communiqué de presse. «Pour le conseiller national PLR, le problème ne serait donc pas une question d’égalité mais simplement de composition des équipes: si plus d’hommes en font partie et qu’il y a beaucoup de travail en équipe ou de nuit, alors les analyses seraient déformées et le résultat défavorable pour les entreprises concernées.» Pour le syndicat, ce discours patronal ne tient pas la route, insistant sur le fait que les analyses salariales doivent porter sur l’ensemble du salaire, et que les primes d’équipe en font partie. D’ailleurs, ces indemnités peuvent représenter une discrimination salariale en cas d’écarts injustifiés, comme le soulignait le Conseil fédéral fin 2023 au sujet de cette motion qu’il appelait à rejeter: «Le potentiel de discrimination ne réside pas seulement dans le calcul du montant des indemnités, mais aussi dans le fait, par exemple, que certaines indemnités soient réservées aux personnes travaillant à temps plein ou que dans une même entreprise, les indemnités soient régies par des règles moins avantageuses pour des métiers ‘typiquement féminins’.»
Nouvelle attaque patronale
Pour Aude Spang, secrétaire à l’égalité chez Unia, la manœuvre viserait «au mieux à permettre aux entreprises d’embellir leur résultat d’analyse sans avoir mis en place la moindre mesure pour l’égalité, au pire de camoufler des discriminations». Quoi qu’il en soit, il s’agit d’une «énième tentative de nier l’existence des inégalités salariales entre hommes et femmes ainsi que le bien-fondé de toute mesure visant à les corriger». L’inégalité salariale est pourtant bien réelle. Les derniers chiffres de l’Office fédéral de la statistique montrent que l’écart salarial moyen entre les femmes et les hommes s’élève toujours à environ 17,5% dans le secteur privé, dont près de la moitié ne peut pas s’expliquer objectivement. Les femmes en Suisse continuent donc de gagner moins pour un travail équivalent.
«Ils souhaitent ici adapter la méthodologie des analyses avec des critères non pertinents, afin que les différences de salaire disparaissent statistiquement, s’indigne la syndicaliste. Pourtant, le bilan intermédiaire de la révision de la LEg était clair: un cinquième des entreprises n’a pas procédé aux analyses, un tiers d’entre elles ne les a pas fait vérifier et la moitié n’a pas publié les résultats. Les employeurs ne respectent même pas les exigences de base de la loi, et ils voudraient la contourner plus encore.»
Aller plus loin
La véritable urgence pour Unia, c’est que la Loi sur l’Egalité (LEg) soit révisée, renforcée et surtout appliquée, afin que l’égalité salariale ancrée dans la Constitution soit respectée. Les revendications syndicales sont les suivantes: mettre en place des analyses salariales régulières obligatoires pour toutes les entreprises, quelle que soit leur taille. Organiser des contrôles par les pouvoirs publics et des sanctions efficaces à l’encontre des entreprises qui n’agissent pas contre les discriminations salariales. Et enfin, que les résultats soient clairement communiqués au personnel.