Aller au contenu principal
Menu

Thèmes

Rubriques

abonnement

Les maçons se mobilisent pour une hausse de 150 francs

Indécente, la proposition patronale de relèvement de 26 francs soulève la protestation sur les chantiers de tout le pays

Un peu partout en Suisse, les travailleurs de la construction ont observé la semaine dernière des pauses de protestation pour revendiquer 150 francs d'augmentation par mois. Ils rejettent avec indignation la proposition patronale de ne leur accorder que 26 francs.

La campagne syndicale pour une augmentation de salaire de 150 francs par mois dans le secteur principal de la construction est lancée. La semaine dernière, dans l'ensemble du pays, les travailleurs, avec le syndicat Unia, ont mené des actions de protestation sur plus de cent chantiers. Plus de 3000 ouvriers ont manifesté leur réprobation et leur colère face à la proposition du patronat. Et pour cause, la Société suisse des entrepreneurs (SSE) s'est contentée de ne proposer que 0,6% d'augmentation pour tout le monde, avec une rallonge à titre individuel de 0,4%, pour quelques privilégiés. En clair, les salaires les plus bas n'augmenteraient que de 26 francs en 2011!
Pour Unia et les travailleurs, cette proposition exprime non seulement un manque de considération des ouvriers, une absence de reconnaissance de leur travail, mais elle se révèle aussi totalement injustifiable sur le plan des réalités économiques. En effet, le secteur de la construction affiche une santé resplendissante. Les carnets de commandes sont pleins et les perspectives sont bonnes, de l'aveu même des entrepreneurs. De plus, au cours de ces dix dernières années, selon les chiffres de l'Office fédéral de la statistique, les prix dans la construction ont augmenté d'environ 17,5%, alors que la progression des salaires se révélait nettement inférieure. Un fait qui ajoute encore un supplément de légitimité aux revendications syndicales.

«26 francs, c'est n'importe quoi»
En Suisse romande, des pauses syndicales ont été observées par des centaines de travailleurs sur plusieurs dizaines de chantiers. Ces assemblées de protestation étaient pour la plupart accompagnées d'un échange convivial autour de cafés-croissants à la pause de 9 heures ou de grillades à celle de midi.
L'Evénement syndical a suivi l'une de ces actions, à Boudry dans le canton de Neuchâtel. Vers 9 heures, un groupe de permanents d'Unia, drapeaux au vent, débarque sur le vaste chantier d'un dépôt industriel. Les ouvriers présents se pressent dans la cantine où les syndicalistes leur servent du café et du gâteau aux amandes. «Vingt-six francs, c'est n'importe quoi, on se fiche carrément de nous, autant ne rien nous donner, ce serait la même chose», tonne un maçon. «Franchement, 150 francs, c'est encore trop peu. Ce qu'on réclame, ce n'est pas un cadeau, c'est un juste salaire pour notre boulot», ajoute son collègue. Le secrétaire syndical Fabien Vuillème appelle les travailleurs à participer aux prochaines assemblées cantonales de la construction et des métiers du second œuvre. Les ouvriers procèdent ensuite au vote d'une résolution dans laquelle ils revendiquent, à l'unanimité, une augmentation de 150 francs dès le 1er janvier 2011.

«On gagnait mieux notre vie il y a 10 ans»
Le grutier et machiniste Philippe Lebrun, occupé sur ce chantier, accepte de nous détailler les raisons pour lesquelles il soutient cette revendication. «La crise, on ne l'a pas vue passer sur les chantiers. Au contraire, il y a toujours plus de travail et tout doit aller sans cesse plus vite, surtout avant l'hiver. A Bienne où j'ai aussi travaillé tout récemment, on n'a par exemple jamais eu autant de gros travaux. C'est presque incroyable. Alors, quand certains entrepreneurs disent qu'ils ne gagnent pas assez et qu'il est impossible de donner davantage aux ouvriers, je n'y comprends plus rien. Les 26 francs qu'on nous propose, c'est pire que des miettes, c'est une misère. Qu'est ce que vous voulez qu'on puisse faire avec ça alors que tout augmente, les assurances, l'essence, la nourriture. Je peux vous assurer qu'on gagnait mieux notre vie il y a dix ans!» Un constat qui a valeur de plaidoyer pour une augmentation digne de ce nom.


Pierre Noverraz