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«La force du syndicat, ce sont les travailleurs et les travailleuses»

Joao de Carvalho Figueiredo au café du Rond-Point, à Genève.
© Thierry Porchet

Pour Joao de Carvalho Figueiredo, il est important que les militants soient nombreux à s’engager aux côtés des secrétaires syndicaux.

Nouveau président d’Unia Genève, le machiniste Joao de Carvalho Figueiredo veut en accentuer la dynamique militante.

«Lorsque je m’engage, je le fais à fond.» Le nouveau président d’Unia Genève, Joao de Carvalho Figueiredo, est un battant. Originaire de la région de Viseu, au Portugal, ce machiniste dans la construction est installé en Suisse depuis 2008. «La crise nous a poussés à partir, nous avions de la famille ici et j’ai trouvé un premier emploi en Valais. C’était un peu difficile, je me suis retrouvé seul dans un studio à Anzère, tandis que ma compagne est restée au Portugal avec nos deux enfants, mon dernier n’avait que 1 an.» Dans son pays natal, Joao Figueiredo effectuait de la gestion comptable dans un bureau. Il s’est reconverti dans le bâtiment et a fait fonctionner la centrale qui fournit le béton à ses collègues maçons. «La construction, c’est dur, car nous sommes dehors toute l’année: l’été durant les grosses chaleurs et l’hiver lorsqu’il gèle.»

C’est le comité du gros œuvre qui a désigné le centraliste béton pour se présenter à la tête d’Unia Genève. Elu fin juin, il succède à Xavier Henauer.
Joao Figueiredo n’est pas du genre à se tourner les pouces. Au Portugal, dans son village, il a été le responsable du groupe de scouts et membre du comité directeur du club de foot. Il est aujourd’hui président de l'assemblée de Casa Benfica de Genève, la maison des supporters du club de foot de Lisbonne, et vice-président de l'association culturelle luso-suisse Laços. Il est aussi conseiller des communautés portugaises, un organe consultatif du Gouvernement portugais, et siège à la commission cantonale de formation professionnelle de la construction. Entre autres. «Je n’arrive pas à rester sans rien faire, je suis toujours en mouvement, j’ai besoin de faire quelque chose en dehors de mon travail dans le bâtiment», explique-t-il, un sourire aux lèvres, attablé au café du Rond-Point.

«Nous sommes un syndicat de lutte»

Il s’est arrêté quelques instants de distribuer des tracts aux passants sur la plaine de Plainpalais balayée par la bise. C’est samedi, et Unia est présent dans cinq lieux de la cité pour donner des informations sur les votations du 22 septembre. «Nous essayons toujours d’aller sur le terrain afin que les travailleurs puissent rencontrer des secrétaires syndicaux et des militants. Pour moi, il est important que les militants, qu’ils viennent de la construction, de l’industrie, du tertiaire, des groupes femmes, migration et retraités, soient nombreux à s’engager aux côtés des secrétaires syndicaux. Notre but, c’est la défense des travailleurs et nous sommes un syndicat de lutte, que cela soit dans le domaine du travail ou sur le plan politique. Même si je n’ai pas le droit de vote, la réforme de la LPP me concerne et je veux que ceux qui bénéficient de ce droit votent dans le bon sens.»

Unia Genève s’était engagé à fond en faveur de l’initiative «Une vie ici, une voix ici… Renforçons notre démocratie», notamment en tenant des stands de campagne chaque jour durant deux mois et en organisant un débat, réunissant militants du syndicat et universitaires, auquel avait participé Joao Figueiredo. Mais le texte, proposant d’accorder le droit de vote et d’éligibilité dès huit ans de résidence, a été rejeté par 60% des votants le 9 juin dernier. «Malheureusement, nous n’avons pas réussi.» Pas de quoi démoraliser le syndicaliste: «Il faut rester optimiste dans la vie.»

«Les jeunes vont se réveiller un jour»

Ce samedi 21 septembre, Joao Figueiredo sera à Berne pour la manifestation salariale. Il est prévu qu’il monte à la tribune, sur la place Fédérale, pour prononcer un discours en français et en portugais. «Il y a beaucoup de Portugais dans la construction, mon numéro n’est pas secret, il y a des gens qui m’appellent, je fais un peu la liaison.» Les syndicats et la Société suisse des entrepreneurs ont entamé des négociations salariales au début du mois. L’année passée, la faîtière patronale avait refusé toute augmentation salariale et rompu les négociations. «Certaines entreprises ont accordé des augmentations individuelles, d'autres pas. Le problème, c’est que le coût de la vie augmente pour tout le monde.» Afin de compenser le renchérissement, les syndicats revendiquent 250 francs en plus pour tous chaque mois.

Après quoi s’ouvriront les négociations pour le renouvellement de la Convention nationale, qui échoit fin 2025. «Ça va être dur, il faut commencer à mobiliser dès à présent, ce n’est pas à deux mois de l’échéance qu’on va pouvoir le faire.» Il regrette le manque d’implication de la jeunesse. «Les plus de 50 ans sont syndiqués, mais lorsqu’on descend sur l’échelle des âges, il y a de moins en moins de membres. La force du syndicat, ce sont les travailleurs: plus nous avons de membres, plus nous sommes forts. Les jeunes n'ont pas encore compris que les anciens ont obtenu le 13e salaire, la retraite anticipée ou le panier en imposant un rapport de force aux patrons. Mais ils vont se réveiller un jour.»

Vidéo: Thierry Porchet