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La CCT des échafaudeurs s’améliore

Les représentants des échafaudeurs à la conférence de branche du 9 novembre.
© Thierry Porchet

Les représentants des échafaudeurs à la conférence de branche du 9 novembre.

Lors de leur conférence de branche, les échafaudeurs ont accepté une nouvelle convention collective de travail (CCT) qui comprend plusieurs avancées notables, mais des revendications subsistent.

Une minute de silence. En préambule à la conférence de branche des échafaudeurs, le 9 novembre à Berne, un hommage a ainsi été rendu aux travailleurs victimes d’accidents mortels sur les chantiers durant l’année, avec une pensée particulière pour le drame de Prilly.

«C’est un métier qui connaît chaque année des accidents mortels», déplore Simon Constantin, membre de la direction du secteur de la construction d’Unia, devant une assemblée d’échafaudeurs réunis pour se prononcer sur une nouvelle convention collective de travail (CCT). 

Le responsable fait le topo des treize séances de négociations qui ont eu cours cette année. Il rappelle les revendications articulées en fonction des points prioritaires révélés lors d’une enquête menée en 2023. Les priorités des 479 travailleurs y ayant répondu: un meilleur salaire, des équipes de trois, l’interruption du travail en cas d’intempéries et une pause payée.

«En début d’année, les patrons avaient de fortes attentes: du travail sur appel, sortir les magasiniers et les chauffeurs de la CCT, ne plus payer les 30 premières minutes de déplacement comme dans la Convention nationale du secteur principal de la construction (CN), des amendes en cas de non-respect des règles de sécurité, une diminution des indemnités accident à 80% pour les personnes avec plus de 5 ans d’engagement (jusqu’à présent payées à 90%) et 200 heures supplémentaires sans supplément par an. Heureusement, ces revendications patronales ont pu être repoussées et des améliorations ont été obtenues.»

Augmentation salariale automatique

Plusieurs avancées pour les travailleurs ont été obtenues, dont le mécanisme d’adaptation automatique des salaires au coût de la vie jusqu’à hauteur de 1,5% d’inflation (au-delà, l’adaptation doit être négociée). De plus, dès l’année prochaine, les échafaudeurs auront droit à une pause payée de 15 minutes comptant comme temps de travail. Il s’agit d’une réduction du temps de travail de 1h15 par semaine sans perte de salaire. Autre point positif: dès 2025, le travail du samedi sera rémunéré avec un supplément de 25%. 

Les travailleurs verront aussi une amélioration du contrôle du temps de travail avec l’introduction d’un calendrier permettant de planifier entre 37,5 heures et 45 heures par semaine. De plus, les soldes d’heures devront être donnés par écrit chaque mois, ce qui améliore le suivi du temps de travail.

Dans la salle, une question est soulevée concernant l’imposition des semaines de vacances, prenant pour exemple une entreprise vaudoise voulant fermer non seulement deux semaines en été, mais aussi deux en hiver. Une question non couverte par la CCT, mais par le Code des obligations. Selon le SECO, «l'employeur est compétent pour fixer les périodes de vacances. Il doit cependant tenir compte des désirs du travailleur dans la mesure compatible avec les intérêts de l'entreprise (art. 329c, al. 2 CO)».

Concernant les revendications restées en suspens, la question de l’assurance intempéries: «Les négociations avançaient bien jusqu’au moment de la question du financement. C’est là que ça a bloqué, regrette Simon Constantin. Nous n’avons pas progressé sur la question du travail par équipe de trois, ni sur la protection contre les licenciements. Par ailleurs, nous aurions voulu que le congé paternité soit payé à 100%.»

Au moment du vote, la nouvelle CCT – déjà acceptée par la partie patronale et Syna – passe la rampe à l’unanimité. Mais comme l’a souligné Nico Lutz, responsable de la construction à Unia, lors du mot qu’il a adressé aux participants en début de matinée: «Nous voulons plus, et vous méritez plus, donc il faut continuer à se battre!»

«Nous voulons plus, donc il faut continuer à se battre!»
Nico Lutz, responsable de la construction à Unia

La sécurité au cœur des discussions

Lors des discussions, la question de la retraite anticipée a notamment été soulevée. «C’est déjà difficile de travailler à 55 ou 60 ans, alors jusqu’à 65 ans… Et nos salaires ne nous permettent pas de partir plus tôt», explique Francis Torche, président du comité vaudois. 

Au même titre que dans la CN, les échafaudeurs devraient pouvoir se retirer plus tôt, avec des préretraites dignes. Mais c’est surtout sur la question de la sécurité et de trop nombreux temporaires non formés que les langues se délient.

José Sebastiao, secrétaire syndical responsable de la branche à Genève, s’insurge: «Sur le terrain, la responsabilité de la sécurité est transférée aux travailleurs, avec des amendes à la clé, alors que, lorsqu’on commence un chantier, il devrait déjà être fini! C’est scandaleux! Des équipes de trois amèneraient, elles, une sécurité supplémentaire.» 

«On ne nous offre qu’une paire de bottes par année, alors que la base de la sécurité, c’est les pieds», renchérit Balde Tcherno, échafaudeur. 

La question des temporaires, beaucoup trop nombreux, est également mise en exergue. «Parfois, il n’y a qu’un fixe pour plusieurs temporaires. Et on te dit de te démerder», soupire Julio Azedo, président du comité genevois. «Mais qui est responsable de ces temporaires qui n’ont pas reçu de formation harnais? En cas d’accident, c’est la faute à qui?»

«Les temporaires devraient être sensibilisés à la sécurité avant d’être sur le chantier», ajoute José Sebastiao. Et Simon Constantin de rebondir: «L’entreprise de location de service doit également s’assurer que le travailleur a reçu des EPI (Equipements de protection individuelle, ndlr). De manière générale, il s’agit de mettre en œuvre de nouvelles règles de sécurité avec la Suva.»

La Suva pointée du doigt

Pour Jean-Michel Bruyat, secrétaire syndical d’Unia Vaud en charge de la construction, la réglementation existante est insuffisante: «Quand on travaille avec un harnais, en cas de chute, le sauvetage doit se faire dans les dix minutes. C’est vital. On ne sait pas combien de collègues ont subi des conséquences a posteriori. Or, sans l’équipe de trois, un sauvetage aussi rapide est impossible. La Suva a émis cette recommandation, mais ne contrôle pas.» José Sebastiao ajoute: «Le thème de la sécurité n’est pas un choix, mais une obligation. Il y a chaque année des morts sur les chantiers, et la Suva ne prend pas ses responsabilités pour améliorer les règles.» 

D’autres problématiques sont mises en lumière, telles les entreprises d’autres corps de métier qui enlèvent les ancrages ou les mettent ailleurs pour accéder au bâtiment par les fenêtres; l’utilisation des escaliers réservés aux échafaudeurs ou encore la surcharge sur les ponts de service utilisés comme des espaces de stockage. 

Et Simon Constantin de résumer: «L’activité du syndicat se concentrera sur la question de la sécurité, de la formation des temporaires durant la durée de validité de la convention.»

Témoignages

Francis Torche, vice-président du comité vaudois: «Au vu du rapport de force, le boulot a été bon pour cette nouvelle CCT.» 

Hugo Pereira, président du comité vaudois: «Les négociations, c’était chaud, très dur. Notre boulot n’est pas facile, et on aimerait s’approcher petit à petit du salaire des maçons. Mais jusqu’ici, la différence reste grande.»

Julio Azedo, président du comité genevois: «Cela fait 34 ans que je monte des échafaudages. Avant, j’avais envie d’aller travailler. Maintenant, je me lève avec la boule au ventre. Quand j’arrive au boulot, on me dit que je dois m’occuper de deux, trois, quatre temporaires qui n’ont souvent pas de formation, ni de harnais, ni de marteau, ni de clé. Quand je demande, qui est responsable en cas d’accident? On me répond: “Si t’es pas content, tu rentres à la maison!“ Les gars ont peur de venir au syndicat, mais seul je ne peux rien faire. Je me bats pour mes collègues.»

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