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Enfin une protection pour les travailleurs temporaires!

La CCT pour les temporaires est sous toit. Elle entrera en vigueur dès qu'elle sera déclarée de force obligatoire

Après près d'une année de négociations intensives entre le syndicat Unia et Swissstaffing, l'organisation faîtières des entreprises de location de services, la toute nouvelle convention collective des travailleurs temporaires est sous toit. Le comité central d'Unia, comme les instances de Swissstaffing, devaient donner leur feu vert ce début de semaine. L'entrée en vigueur de la convention est espérée pour le début de l'an prochain, dès que le Conseil fédéral l'aura déclarée de force obligatoire. Le point avec Renzo Ambrosetti, coprésident d'Unia, principal artisan de cette nouvelle convention.

A l'heure où le travail intérimaire connaît une forte croissance dans notre pays - le nombre d'heures a quadruplé en 15 ans et atteint aujourd'hui 2% de l'emploi total - cette CCT innove par son aspect transversal. Jusque-là, les CCT étaient conclues par branches ou par entreprises. Au contraire, cette CCT couvrira quelque 260000 travailleurs exerçant plus de cent métiers différents. Principal artisan de cette nouvelle convention, Renzo Ambrosetti livre ses commentaires.

Quelle est l'importance de cette nouvelle CCT?
Cette convention va améliorer de façon sensible les conditions de travail de beaucoup de personnes et permettra, ce qui est important, de les contrôler. Aujourd'hui, nous ne pouvons contrôler le travail intérimaire que dans les branches où il existe des CCT obligatoires. Ailleurs, tout est permis. On sait très bien qu'il y a beaucoup d'abus dans les branches non couvertes par une convention avec force obligatoire, que ce soit en matière de dumping salarial, de temps de travail ou d'absence d'indemnités en cas de maladie. Cette CCT offre une protection pour ces salariés.

Quels en sont les principaux acquis?
Il faut d'abord dire que là où il existe des CCT de force obligatoire, ou d'importantes CCT non obligatoires comme dans les machines, l'horlogerie, la chimie, les dispositions plus favorables aux travailleurs doivent primer. Une liste des conventions qui ont la primauté est annexée à la nouvelle convention. Si par exemple les salaires usuels sont plus élevés ou la durée de travail plus basse, ces pratiques doivent s'appliquer aux temporaires.
La nouvelle convention fixe des salaires minimaux, selon les régions. La dérogation prévue pour le sud du Tessin et une part du Jura permettra d'atténuer le choc. Au Tessin par exemple, on trouve des salaires de 2000 à 2300 francs par mois. Le 13e salaire est aussi un acquis important. Dans l'hôtellerie par exemple, où il n'est toujours pas accordé dès le 1er jour, les temporaires en bénéficieront.

Quelles sont les autres avancées?
Outre l'horaire de travail et les vacances, la convention prévoit des mesures de formation et de perfectionnement. Un fonds paritaire, financé par des contributions de solidarité, permettra de gérer cette formation et de contrôler l'application de la convention, qui fixe aussi des amendes en cas de violation. Par ailleurs, les indemnités en cas de maladie seront financées par un fonds social, alimenté par des primes des travailleurs et des entreprises. Le 2e pilier sera aussi obligatoire pour la grande majorité des travailleurs, quel que soit leur salaire.

Y a-t-il des mesures visant à transformer le travail temporaire, utilisé sur la longue durée par certaines entreprises, en emploi fixe?
Il n'y a pas de clause à ce sujet, mais en renchérissant le travail intérimaire, il deviendra moins attractif et certaines entreprises réfléchiront à engager elles-mêmes le personnel dont elles ont besoin.

La déclaration de force obligatoire est-elle une condition au soutien, par l'USS, du vote sur la poursuite de la libre circulation?
Cela pourrait être un argument important lorsque l'on se prononcera sur le mot d'ordre de vote. Car le but de cette convention est de combattre le dumping. Elle va dans le sens du renforcement des mesures d'accompagnement. Mais il est clair que l'on aborde un terrain nouveau, et que l'on prend aussi des risques. Mais comme pour les autres CCT qui ont été améliorées au fil du temps, nous devons commencer par le début, avec l'objectif de l'améliorer ensuite.

Les syndicats ont toujours lutté contre le travail temporaire. La CCT ne légitime-t-elle pas cette forme de précarisation?

Il est vrai qu'il y a 10 ans, les syndicats voyaient les entreprises temporaires comme des marchands d'esclaves. Et ces entreprises voyaient les syndicats comme le diable. Notre but reste de limiter le travail temporaire. Mais vouloir l'empêcher, c'est comme lutter contre des moulins à vent. On ne peut pas fermer les yeux sur un phénomène et crier au loup sans s'impliquer pour améliorer les conditions de travail de ces salariés. C'est ce que l'on fait avec cette convention, comme on tente de le faire ailleurs en Europe. En Autriche par exemple, une telle convention existe déjà depuis quelques années. D'autre part, avec la demande de déclaration de force obligatoire, les grandes entreprises de travail temporaire entendent également lutter contre celles qui pratiquent systématiquement les abus, pour notamment préserver leur image.
Pour moi, cette convention est un succès. C'est un début et le temps et l'histoire nous diront si c'est positif, ce que je pense.

Propos recueillis par Sylviane Herranz



La nouvelle CCT en bref

Salaires minimaux:
- Régions économiquement fortes (Arc lémanique, Berne, Bâle, Zurich):
Non qualifiés: 3200 francs + 13e salaire
Qualifiés: 4300 francs + 13e salaire
- Régions économiquement faibles*:
Non qualifiés: 3000 francs + 13e salaire
Qualifiés: 4000 francs + 13e salaire
* Dérogation possible pendant 2 ans pour les régions frontalières du Tessin et du Jura ouest: -10% la première année et -5% la 2e année.

Vacances:
4 semaines et 5 semaines dès 50 ans et pour les moins de 20 ans

Horaire de travail:
42 heures

Assurance maladie:
dès la 13e semaine dans l'entreprise, droit à des indemnités durant 720 jours

2e pilier:
obligatoire dès le 1er jour pour les travailleurs ayant des obligations familiales et pour les travailleurs ayant un contrat de plus de 3 mois.

Absences de courtes durées:
réglementées pour mariage, décès, déménagements, etc.