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CCT des machines: des salaires minimums pour combattre le dumping

Après 75 ans de refus, le patronat de l'industrie des machines cède aux revendications syndicales

La nouvelle convention collective de l'industrie des machines, des équipements électriques et des métaux (MEM) contient pour la première fois de son histoire des salaires minimaux. De quoi faire obstacle aux poussées de la sous-enchère salariale. Le texte de cette CCT devra être ratifié le 21 juin par l'assemblée des délégués.

«Un bastion idéologique contre le principe du salaire minimum est tombé. Swissmem, et derrière elle Economiesuisse et l'Union patronale suisse, ont dû reconnaître la nécessité de salaires minimums obligatoires. La ligne a désormais été franchie, on ne peut plus revenir en arrière.» C'est en ces termes que Corrado Pardini, responsable du secteur industrie d'Unia, qualifie le résultat des négociations de la CCT de l'industrie des machines, des équipements électriques et des métaux (MEM) intervenu la semaine dernière (voir notre précédente édition). Son collègue Pierluigi Fedele, également membre du comité directeur d'Unia abonde dans ce sens. «C'est une percée historique. Pendant 75 ans, le patronat de l'industrie MEM a toujours refusé d'introduire des salaires minimums dans la convention collective et pour la première fois, nous sommes parvenus à briser ce front du refus figé sur des positions idéologiques.»

Salaires différenciés
Daniel Heizmann, président de la conférence Unia de la branche MEM rappelle que «dans cette négociation, il s'agissait pour nous de mettre des limites au dumping salarial et d'ancrer le principe de salaires minimums dans la CCT». Ces seuils sont en effet destinés en premier lieu à combattre et à prévenir la sous-enchère salariale.
Les salaires minimums négociés sont différenciés selon les régions et la qualification. Ils s'échelonnent de 3300 francs (x13 mois) pour les non-qualifiés du Tessin et de l'Arc jurassien à 4150 francs (x13) pour les personnes qualifiées de la région zurichoise et du plateau romand (ZH, SH, AG, TG, SG, VD, GE). Au départ, Unia revendiquait des minima situés entre 4000 et 4600 francs. «Nous allons donc veiller à ce que ces salaires augmentent» indique Christian Gusset, responsable de la branche. Un propos que partage Pierluigi Fedele. «Comme dans toutes négociations, nous pouvions bien sûr souhaiter mieux. Mais il faut préciser que nous sommes tout de même parvenus à un très bon résultat si l'on se souvient que le patronat ne voulait même pas entendre parler de salaires minimums et que, lorsqu'il a commencé à enfin entrer en matière, il proposait par exemple des minima à 2600 francs, primes d'équipe comprises! De plus, les montants que nous avons obtenus ne servent pas qu'à prévenir le dumping. En effet, les salaires de l'industrie MEM ne sont en moyenne pas si élevés que certains le pensent. Au Tessin par exemple, 19% des travailleuses et travailleurs de la branche gagnent moins de 3000 francs par mois. Certains salariés de ce canton auront donc des augmentations de 15 à 20%.» A noter qu'en raison de cela, les patrons pourront échelonner ces augmentations jusqu'en juin 2018, à l'échéance de la durée convenue de la CCT. Le délai transitoire court jusqu'à 2016 pour les autres régions.

Examen le 21 juin
S'agissant de l'article 57 portant sur l'accroissement de la flexibilité horaire en cas de crise, son contenu est devenu plus restrictif car il prêtait le flanc à des abus manifestes. «Il donnait la possibilité aux employeurs d'exiger 100 heures de travail gratuites, ce qui n'est plus le cas», précise Pierluigi Fedele. Un autre article de la nouvelle CCT autorise cependant de porter de 100 à 200 le nombre d'heures supplémentaires que l'on peut reporter sur l'année suivante. «Mais à la différence de l'article 57, ce sont des heures payées et ces reports seront très rares si l'on se réfère à la situation actuelle de la branche.»
Parmi les autres points de la nouvelle CCT figure notamment l'élargissement de la période de consultation en cas de licenciement collectif. Elle passe de 12 à 18 jours ouvrables. De plus, les entreprises comptant plus de 250 salariés seront tenues de prendre en compte tous les licenciements intervenus dans les 90 jours précédant la consultation, afin d'éviter le saucissonnage des congés pour échapper à l'élaboration d'un plan social. Côté social, on notera encore l'introduction d'un congé de paternité de 5 jours payés ainsi que différentes mesures en faveur des apprentis et de la formation.
La nouvelle CCT est actuellement en phase de discussion par la base, dans les régions. Elle sera soumise à ratification par l'assemblée des délégués de la branche MEM d'Unia, le 21 juin prochain.


Pierre Noverraz