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Le patriarcat tue encore

Ni una mas, écrivait Susana Chávez en 1995 dans un de ses poèmes. Littéralement, «Pas une de plus», pour dénoncer les meurtres massifs de femmes au Mexique au siècle dernier. Ni una mas est devenu un slogan, repris dans le monde entier pour lutter contre les féminicides. Trente ans plus tard, et à la veille de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes du 25 novembre, le constat est aussi alarmant que désespérant. Le patriarcat continue de tuer, au Mexique, en Suisse et partout ailleurs. Des femmes meurent chaque année, dans tous les pays, assassinées par leur conjoint ou ex-conjoint. 

Malgré le manque global de données sur les violences sexistes et sexuelles (VSS), les études et enquêtes qui existent confirment l’ampleur du phénomène. Elles nous apprennent que, depuis le début de l’année, 26 féminicides ont été recensés en Suisse. Qu’à Genève, 80% des victimes majeures de violences domestiques prises en charge par le réseau en 2023 étaient des femmes. Et une femme sur dix a déjà quitté son emploi à la suite de violences. Que si on est une personne LGBTQIA+ ou racisée, on est davantage exposées aux VSS dans le cadre professionnel et dans l’espace public, et si on est les deux, eh bien, c’est encore pire. On sait aussi que les auteurs de ces violences sont presque toujours des hommes et qu’ils sont connus des victimes, à savoir des conjoints ou des membres de la famille. En France, les féminicides ont augmenté de 11% en 2024 selon les statistiques officielles et moins de 2% des affaires de viols aboutissent à une condamnation. Dans l'Union européenne, une femme sur trois a subi des violences physiques, des violences sexuelles ou des menaces durant sa vie d’adulte et une femme sur cinq a subi des violences domestiques. Enfin, dans le monde, en 2020, un féminicide avait lieu toutes les 11 minutes. 

Les VSS s’inscrivent dans un continuum. Quelle que soit la forme qu'elles prennent, ces violences ne sont jamais anodines. Ce ne sont pas des faits isolés. Elles sont un fléau structurel, le fruit d’une société patriarcale et sexiste d’un autre temps. Y mettre un terme relève de l’action et de la responsabilité collectives. Tout le monde doit s’y mettre, y compris les hommes. Surtout les hommes. Le chantier paraît pharaonique, surtout à l’ère de la montée des idées d’extrême droite, des discours masculinistes et du gel des financements des associations de soutien aux victimes. Mais des progrès sont possibles. Ce 25 novembre, les associations féministes, les communes, le monde de la culture et les syndicats s’engageront en Suisse romande à visibiliser le thème des violences faites aux femmes. Pour sensibiliser, prévenir et mobiliser.