Un outil pour renforcer la protection des conditions de travail
Le Canton du Valais va introduire un badge électronique visant à améliorer et à simplifier le contrôle des activités sur les chantiers. Explications de Blaise Carron, secrétaire régional d’Unia Valais.
Au début de l’année, l’Etat du Valais déploiera un système d'eBadges. Ce nouvel outil a été développé pour améliorer et simplifier le contrôle des activités sur les chantiers, en particulier dans les marchés publics. Il participe à la lutte contre le travail au noir – un fléau estimé dans le canton à 1,2 milliard de francs par an, selon les autorités valaisannes – et la concurrence déloyale engendrée par le dumping salarial et social. Secrétaire régional d’Unia Valais, Blaise Carron juge très positivement le projet et espère qu’il sera étendu à d’autres secteurs.
Quels sont les objectifs poursuivis par l’introduction de l’eBadge?
Du point de vue d’Unia, l’objectif de l’eBadge est double. Il a non seulement pour but de renforcer la protection des conditions de travail et salariales des travailleurs de la construction et de l’artisanat du bâtiment, mais doit également nous assurer que les entreprises se conforment à l’ensemble des législations sociales ainsi qu’aux normes de sécurité sur les chantiers. L’eBadge permet également d’intensifier la lutte contre la concurrence déloyale en excluant de facto les entreprises scélérates de certains marchés publics ou parapublics.
Quels sont les acteurs à l’origine de cette initiative?
Le projet a été mené par l’ensemble des commissions paritaires de l’artisanat du bâtiment (électricité, technique et enveloppe du bâtiment, menuisiers, plâtrerie-peinture, nettoyage, construction métallique, etc.) et du secteur principal de la construction (y compris le carrelage) réunies au sein de l’Association pour le renforcement des contrôles sur les chantiers et l’Etat du Valais. Avec un tel instrument, une première en Suisse, le Valais se place à la pointe des cantons cherchant à protéger au mieux les salariés. Dans ce sens, Unia a évidemment joué un rôle très actif pour arriver à ce résultat. Nous considérons en effet qu’il est de notre devoir de pouvoir protéger au mieux tant la sécurité matérielle que physique du personnel œuvrant dans les secteurs concernés.
Comment fonctionne l’eBadge? A qui est-il destiné?
Ce badge réunit aussi bien les données des commissions paritaires que de l’Etat et de la Suva. Les informations récoltées par les commissions paritaires portent sur le respect des conventions collectives et salariales, celles de l’Etat concernent en particulier tout ce qui touche aux cotisations sociales, aux normes de sécurité sur les chantiers et au paiement des impôts à la source. En fonction de ces données, chaque entreprise et chaque salarié disposera d’un statut (rouge ou vert). Le statut vert signifie que tout est en ordre, les salariés savent alors que leur employeur est correct. Les entreprises qui voudront soumissionner pour des marchés de gré à gré ou sur invitation devront pouvoir faire valoir ce même statut.
La protection des données est-elle garantie? De quelle manière?
C’est une question majeure à laquelle nous avons accordé une grande importance durant tous nos travaux qui ont conduit à la finalisation de l’eBadge. Pour cette raison, nous avons intégré dans notre démarche le préposé cantonal à la protection des données et à la transparence qui a validé tout le processus et le résultat final. Les données sont bel et bien sécurisées et protégées conformément à la législation en vigueur. Ce point, capital, doit être souligné.
Quels avantages présente ce système pour les travailleurs? Pour les entreprises?
Avec ce badge les travailleurs savent si leur employeur respecte non seulement les conventions collectives et les salaires mais également toutes les législations sociales et normes sécuritaires. Dans l’état actuel de pénurie de main-d’œuvre, ils pourront choisir une entreprise cochant toutes les cases. Pour les sociétés, ce badge démontrera leur sérieux et leur permettra d’intensifier la lutte contre la concurrence déloyale. Il valorisera les entreprises vertueuses. En outre, elles devront disposer d’un badge vert pour soumissionner à certains marchés publics et parapublics cantonaux et communaux. Vu l'assurance que donne ce badge aux salariés comme aux adjudicateurs, je suis persuadé qu'il va se répandre très rapidement. Chaque employé voudra en effet savoir si son entreprise remplit les conditions pour obtenir un badge vert ! Les privés qui auront des travaux à faire faire seront également très intéressés à les confier à des entreprises correctes.
Le badge électronique est obligatoire pour l’attribution des marchés publics de gré à gré et sur invitation dans le secteur de la construction. Sera-t-il étendu?
C’est évidemment ce que nous souhaitons. Nous espérons que les privés se l’approprient et l’exigent lorsqu’ils feront des travaux de construction et d’artisanat du bâtiment pour leur propre compte. Cet outil devrait être étendu à d’autres secteurs d’activité dans lesquels les salariés subissent nombre d’infractions, comme dans l’hôtellerie-restauration notamment. A terme, nul ne devrait travailler en Valais en l’absence d’un badge vert. Ce système devrait même servir de modèle à l’ensemble des branches. Chaque employé travaillant en Suisse devrait pouvoir bénéficier du même type de sécurité.
Quand le système sera-t-il opérationnel? Quelles sont les prochaines étapes?
A partir de janvier 2025 commenceront l’automatisation de la récolte des données et les inscriptions des entreprises et des adjudicateurs. Dès juillet, l’eBadge sera pleinement opérationnel avec le début des contrôles sur le terrain.