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Les maçons genevois prennent le pont

Mobilisation sur le pont du Mont-Blanc.
© Olivier Vogelsang

Dans la ville du bout du lac, le cortège s'est étiré sur plusieurs kilomètres tout au long de la journée.

A Genève, le soleil juste levé, à 7h30, les travailleurs de la construction commencent à affluer sur la place Lise-Girardin, près de la gare. Café, croissants et sono sont en place. Les collègues se retrouvent, les traits tirés mais le sourire aux lèvres. Les casquettes imprimées d’un «Grève» sont distribuées, comme les drapeaux, que certains auront la mission de faire flotter tout au long de ce parcours de plusieurs kilomètres.

Le cortège s’élance vers 8h15. Sur la banderole de tête, on peut lire «Non à la flexi-précarité!»  Le ton est donné. Déterminés, les maçons réveillent la ville à coups de sifflets en descendant vers le lac. Ils atteignent le pont du Mont-Blanc, bercés par le soleil. Les syndicats Unia, Sit et Syna estiment que près de 2000 personnes ont répondu présentes, «malgré les menaces de leurs employeurs» (voir ici).

Nico Lutz, membre du comité directeur d’Unia, a fait le déplacement depuis Berne pour apporter son soutien aux grévistes. «Nous ne sommes pas d’accord avec les attaques frontales du patronat. Ils veulent plus de flexibilité alors qu’il y en a déjà trop. Quant aux salaires, vous méritez tous une augmentation, surtout dans ce contexte d’inflation, mais les employeurs ne vous en accorderont une que si nous acceptons leurs conditions, et aujourd’hui, on leur répond Non!»

Pour les syndicats, c’est une question de respect et de dignité. «Cette Convention nationale dite moderne, on n’en veut pas, car elle va détruire tous les acquis», poursuit José Sebastiao, responsable du secteur à Unia Genève. «Contrairement à ce que le patronat a pu dire dans les médias, les maçons veulent travailler et ils aiment leur métier, mais ils veulent aussi une convention digne de ce nom et nous nous battrons pour l’avoir.»

Hommage émouvant

Pour les syndicats, la convention telle qu’imaginée par les employeurs est une mise en danger supplémentaire des travailleurs, avec des cadences de travail infernales durant les beaux jours et les risques d’accident qu’on connaît. Pas question de transiger sur la santé des travailleurs, scandent-ils haut et fort. Afin de rendre hommage aux maçons décédés sur les chantiers depuis le début de l’année – un toutes les deux semaines en Suisse – une minute de silence a été observée sur le pont. Moment suspendu, et émouvant.

Toujours sur le pont, rebaptisé «Pont des maçons» par José Sebastiao, les syndicats ont tenu une courte conférence de presse. «La flexibilité est déjà très grande aujourd’hui, avec la possibilité de travailler le samedi», rappelle Thierry Horner, du Sit. «Avec leur CN moderne, il s’agira de faire porter le risque entrepreneurial aux travailleurs, et c’est parfaitement scandaleux.» Et José Sebastiao d’ajouter: «Ce que veut le patronat, c’est faire travailler les maçons comme des forcenés pendant neuf mois à la belle saison, et ensuite, on les renvoie à la maison l’hiver quand il fait froid, qu’il neige ou qu’il pleuve pour qu’ils, je cite, profitent de leur famille et dévalent les pistes de ski. Ce n’est ni plus ni moins qu’un retour déguisé au statut de saisonnier...»

Patrons pointés du doigt

Le cortège repart, déterminé et bruyant, direction la Vieille-Ville. Malgré le contexte difficile, le moment de cohésion entre les travailleurs est beau. Houspillés par certains passants, mais aussi encouragés par d’autres, ils se dirigent jusqu’aux locaux du Groupement genevois d’entreprises (GGE), l’une des associations patronales du secteur du gros œuvre. Une pause est marquée sous leurs fenêtres. «Le GGE, complice de la SSE, a déposé une plainte contre cette grève, et ce matin, nous sommes là!» lance un collègue du Sit, provoquant des huées dans la foule. «La grève est votre droit absolu», reprend Syna. «Si les patrons poursuivent le bras de fer, nous serons prêts à mener le combat jusqu’au bout!»

Les manifestants ont ensuite poursuivi leur route jusqu’à la Fédération genevoise des métiers du bâtiment, et après un repas bien mérité, ils ont terminé leur parcours devant les bureaux de la section genevoise de la Société suisse des entrepreneurs (SSE). La mobilisation a pris fin vers 17h.

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