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Le «Gazacide» de l’intérieur

Palestiniens faisant la queue pour obtenir de l'eau potable au milieu de destructions.
© EPA Haitham Imad / Keystone

Des Palestiniens déplacés font la queue pour obtenir de l’eau potable à Khan Younès. Selon les Nations Unies, les 90% de la population gazaouie ont dû quitter leur domicile depuis le début du conflit.

Le journaliste Rami Abou Jamous publie, depuis l’enclave, un livre personnel qui raconte l’enfer d’un peuple: «Gaza, Vie. L’histoire d’un père et de son fils».

Il y a quelques jours encore, Rami Abou Jamous alertait sur France 24 que la déportation du peuple palestinien était le but ultime du Gouvernement israélien. Il le pressentait dès le début de cette guerre devenue un «Gazacide», selon ses mots. Triple lauréat du Prix Bayeux, le journaliste gazaoui intervient aussi régulièrement sur la RTS et dans le magazine Orient XXI. Dans son livre Gaza, Vie. L’histoire d’un père et de son fils, publié aux Editions Stock au printemps, écrit avec la collaboration de la reporter Lilya Melkonian, il témoigne de manière plus personnelle. Il raconte son parcours, le quotidien de sa famille, son épouse Sabah, son fils Walid, ses voisins...

Entre les bombardements, les morts par dizaines de milliers, les déplacements forcés, la recherche de nourriture et d’eau, les prix qui explosent, les problèmes sanitaires, le manque d’intimité, la fatigue et la peur omniprésentes, il tente de préserver l’innocence et la joie de son petit garçon de 3 ans. Alors, le père applaudit quand les bombes tombent, faisant croire à son enfant à un feu d’artifice. Et la tente qui leur sert de refuge de fortune devient une villa qu’il baptise «La Fierté». «Je sais que les mois qui viennent seront particulièrement difficiles, alors j’essaie de cacher derrière un voile d’optimisme les humiliations que les Israéliens nous font subir», écrit Rami Abou Jamous.

Témoigner coûte que coûte
Au moment de l’attaque du Hamas contre Israël, l’auteur confie: «Je suis horrifié. Tout cela va signer la fin de Gaza. Mon sang se glace. Ce que vient de faire le Hamas, c’est notre Pearl Harbor, ensuite ce qui nous attend sera la bombe atomique, je sais que l’armée israélienne ripostera intensément et sans pitié.»Depuis, Rami Abou Jamous documente tout, avec son téléphone portable pour seul outil de travail. Il évoque l’histoire de cette petite fille de 6 ans, Hind Rajab, qui a vu sa famille être tuée par un char. Seule survivante, elle a réussi à appeler une ambulance du Croissant-Rouge, pulvérisée à quelques mètres d’elle par ces mêmes militaires israéliens. Mais la tragédie se poursuit...
Si son livre est un modèle de résilience, il ne cache pourtant pas l’horreur en cours: «Il y a quelque temps, j’ai assisté à l’une des scènes les plus violentes de toute ma vie: un père portait le corps décapité de son fils. Il était sous le choc, et répétait: “Je n’ai pas trouvé la tête de mon fils, je n’ai pas trouvé la tête de mon fils!”»
Terrible, son témoignage se veut aussi un cri de liberté et de dignité. Quitter Gaza n’a pas été une option pour lui et sa famille, malgré l’insistance de ses confrères en France et de ses frères aux Etats-Unis. Pour expliquer sa position, Rami Abou Jamous cite un proverbe arabe: «L’enfer ensemble, c’est le paradis.» Il ajoute: «En tant que journaliste, ma conscience ne supporterait pas le poids de la culpabilité de quitter mon pays.» Il y a quelques jours, il était encore en vie, son épouse et son fils aussi. Jusqu’à quand? Alors que les Palestiniens sont affamés et chassés de leur territoire.
«Quelle que soit l’issue de cette guerre, rien ne sera plus jamais comme avant pour nous tous Gazaouis. La vie ne reprendra pas son cours. Tout a été détruit: les immeubles, les infrastructures, les écoles, les hôpitaux, et surtout les gens. Nous sommes tous détruits de l’intérieur.» Et de dénoncer: «Sous les yeux du monde entier, en toute impunité, le “Gazacide” a lieu, sans que personne ne réagisse.» Publié en avril, son livre fait déjà partie de la lourde mémoire d’un peuple.

Gaza, Vie. L’histoire d’un père et de son fils. Rami Abou Jamous, avec la collaboration de Lilya Melkonian, Editions Stock, avril 2025. 

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