Fribourg: mettre fin au remboursement de l’aide sociale
Face à l’augmentation de la précarité à Fribourg, 58 associations se sont unies et ont proposé des solutions concrètes. Au nom d’un droit à la dignité pour tous
La crise sanitaire aggrave fortement la situation des plus démunis. Fortes de ce constat, 58 associations actives dans l’aide aux personnes précarisées ou vulnérables ont uni leurs efforts pour réclamer un droit à la dignité pour tous. Une revendication assortie de différentes propositions détaillées mercredi dernier lors d’une conférence de presse en présence de représentants d’organisations parties prenantes de la démarche. Parallèlement le collectif Dignité Fribourg a envoyé un courrier aux autorités politiques leur demandant d’agir urgemment pour lutter contre la pauvreté et réduire les inégalités sur la base de ses requêtes. Et non sans rappeler leur devoir en la matière. Il a aussi réalisé un site internet présentant les axes de sa mobilisation et rédigé un Manifeste et une pétition afin «d’engager et d’encourager le dialogue citoyen» et sensibiliser l’opinion publique à la fragilité de certaines situations induites par le manque d’aides étatiques. De courtes vidéos de femmes et d’hommes touchés par la problématique et aux parcours de vie pluriels ont été mises en ligne. Des situations aggravées ou nouvellement créées par les effets de la pandémie. Ces témoignages illustrent comment l’existence de tout un chacun, indépendamment de l’âge et des expériences acquises, peut basculer. «La précarité, précise l’alliance, n’est pas seulement financière ou alimentaire. Elle est complexe, multifactorielle et concerne aussi les domaines de la santé physique, mentale, de l’éducation et la garde d’enfants, de l’acquisition des compétences de base, du travail, de la participation citoyenne, des relations sociales, de l’habitat et de la stabilité du séjour.»
Le poids des dettes
Parmi les solutions prioritaires «réalistes et réalisables» préconisées, le collectif demande au Canton de renoncer à exiger le remboursement de l’aide sociale alors que la loi ad hoc est en cours de révision. Selon les organisations, cette nécessité de restitution enferme les ex-bénéficiaires dans une précarité accablante et potentiellement de longue durée. Elle aurait aussi pour effet de dissuader les ayants-droit à recourir à ce soutien, car les dettes leur barreraient alors l’accès à certaines prestations comme le logement ou le permis de séjour. Pour l’alliance, cette obligation va à l’encontre d’une démarche de réinsertion efficace. Cette dernière précise encore que Fribourg est le dernier canton romand à exiger ce remboursement, le Valais s’apprêtant à y renoncer.
Le droit à l’alimentation figure également au rang des revendications majeures, avec un nombre croissant de personnes et de familles ne parvenant plus à se procurer de la nourriture de base. La création d’une banque alimentaire permettrait de pallier le problème et offrirait de surcroît une réponse au gaspillage de denrées tout en favorisant le partage et l’intégration sociale. «A ce titre, elle est un outil de développement durable complet.»
Prestations complémentaires nécessaires
Le collectif Dignité Fribourg recommande par ailleurs l’introduction de prestations complémentaires (PC) pour les familles qui, bien que disposant d’un revenu d’une activité lucrative, peinent à joindre les deux bouts. Et se situent dans la classe moyenne inférieure, juste au-dessus du droit à l’aide sociale. «Ces PC familles sont assorties d’une prise en charge des frais de garde et des frais de maladies.» Grâce à ce soutien financier, les bénéficiaires n’ont pas besoin de recourir à l’assistance publique et peuvent maintenir, voire augmenter, leur temps de travail.
La question de l’inclusion numérique a également retenu l’attention des associations. Ces dernières s’inquiètent d’une digitalisation galopante, notamment la dématérialisation des services publics, propre à renforcer l’exclusion sociale des personnes moins formées ou éloignées de l’écrit. Maintenir des guichets physiques, encourager l’acquisition de compétences ou encore rédiger certains textes dans un langage simplifié font partie des mesures proposées.
Impliquer les personnes concernées
Les signataires du Manifeste réclament en outre un accès à un logement décent pour tous avec une adaptation des loyers aux bas coûts des charges hypothécaires. Et l’appui de différentes instances impliquées dans le domaine. Il faut aussi, selon eux, renforcer l’intégration sociale des personnes isolées par le biais de structures et projets sociaux pérennes.
Enfin, le collectif demande que les personnes concernées par les dispositions de prévention et de lutte contre la pauvreté soient impliquées dans les décisions prises. «L’implication des bénéficiaires engendre des mesures plus efficaces et plus adaptées, une compréhension mutuelle renforcée, une société plus inclusive.» Un gage de qualité et de pertinence pour une action sociale efficace...
Informations et pétition sur: dignite-fribourg.ch
Témoignages filmés sur: dignite-fribourg.ch/temoignages