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Serveur, pas porteur d'assiettes

La formation Progresso permet au personnel non qualifié de l'hôtellerie restauration d'acquérir un 1er certificat

Il existe une porte vers la qualification dans l'hôtellerie restauration. Les employés sans diplôme - du service, de la cuisine et de l'intendance - peuvent obtenir un certificat Progresso en cinq semaines. Un chemin qui peut mener par la suite au CFC. Reportage lors d'un cours dans le canton de Neuchâtel.

«Je vous conseille ce Pinot Gris. Il est un peu sucré, avec une pointe d'acidité qui se marierait très bien avec votre foie gras.» Juliana, 25 ans, sert désormais ses clients avec de nouveaux atouts. Connaissance des produits, bonne tenue et phrasé expert en font désormais une employée plus à l'aise, davantage valorisée, et très intéressante pour ses patrons actuels et futurs. Certains l'ont compris en conseillant leurs salariés - serveurs, cuisiniers ou personnel de ménage - de suivre la formation Progresso mise sur pied par Hotel & Gastro formation. Les employeurs ont tout à y gagner et rien à débourser pour les cours. Ils reçoivent même une indemnité de 500 francs par semaine pendant l'absence de leur travailleur grâce au fonds de la convention collective de travail. Les cours se déroulent sur cinq semaines en tout, réparties sur un délai de deux ans. La formation est gratuite pour le personnel.

Une équipe gagnante
C'est en général avec enthousiasme que le personnel suit ce cursus, comme en témoignent les six participants au dernier cours consacré au «service», qui s'est tenu fin février au restaurant La Croisée, à Malvilliers (Neuchâtel). «Je suis là pour le plaisir d'apprendre, c'est une passion», témoigne Victoria Lei, serveuse de 19 ans. Le lendemain matin, cette jeune chinoise d'origine préparera le petit-déjeuner pour le reste de l'équipe. Au menu, plusieurs mets de son pays. Une tradition dans les cours Progresso: chaque participant contribue de manière originale aux cours selon son parcours et ses intérêts. Ce qui renforce l'esprit d'équipe. Dominique Vuillerme, le formateur, insiste sur ce point: «Pendant ces deux premières semaines de cours, on forme une brigade et une famille. On s'instruit, on mange et on dort sur place.»

Le bal des assiettes
A 11h, ce mardi 23 février, impossible d'interrompre les serveuses et serveurs en action, tous tirés à quatre épingles. La mise en place des tables semble requérir la plus haute concentration. Il faut dire que les standards sont ceux d'un établissement haut de gamme: serviettes en éventail, chemins de table, décoration florale (préparée la veille), multiplications des verres et des couverts. Puis, vient le moment de la dégustation des vins. Des crus locaux. Il conviendra d'en choisir un pour le suggérer à table. A l'heure du dîner, deux des élèves s'attablent, pendant que les autres entament la ronde des plats. Un tournus est organisé. «Serveur, ce n'est pas porteur d'assiettes», souligne bien à propos Didier, 25 ans.

Prendre confiance
Aujourd'hui, le service se fait «au guéridon», soit à partir d'une petite table à roulettes sur laquelle les plats sont déposés. Toutes les opérations se déroulent devant le client. On découpe la viande, on place les aliments dans les assiettes. C'est loin d'être un jeu d'enfant après seulement 6 jours de formation. La voix se fait parfois chevrotante, la main mal assurée. Une tomate cerise s'échappe pour rouler sur la table... Beaucoup d'enseignements sont à mettre en pratique: découpe de la viande, service «à droite» et «à l'anglaise», présentation des mets et des vins, suggestions, tenue, sourire... Tout cela avec tact et élégance!

Faire du chiffre
Les employés apprennent aussi à savoir «vendre». «Quand vous servez rapidement, vous avez le temps de demander si le client veut une seconde bouteille d'eau ou un autre café», explique Dominique Vuillerme. Un aspect hautement apprécié par les patrons. Tout comme la rapidité, la qualité de l'accueil et du service fait revenir les clients. «On se rappelle tous quand on a été mal servi, et on y revient rarement. Le contraire est aussi vrai.» C'est ainsi que se constitue une clientèle fidèle. Autre apport: la créativité. De nouvelles idées, le souci d'apporter un petit plus à l'établissement... Les serveurs reviennent dans leur restaurant respectif avec du sang neuf. «Mais attention, je leur dis de ne pas vouloir tout révolutionner!», ajoute le professeur.

Tremplin vers le CFC
Pendant l'après-midi, dans la salle de cours, le formateur souligne les failles: «La petite brioche devait être servie avec le foie gras et non pas avant», remarque-t-il. «Vous espacez trop les aliments sur l'assiette. Au centre, il n'y avait rien!»
Au final, après avoir suivi leurs cinq semaines de cours, les participants passeront des examens écrits et oraux. Et les exigences sont élevées! Le programme se calque sur le contenu pratique des cours du Certificat fédéral de capacité (CFC). Mais on ne peut rattraper en quelques semaines trois ans d'apprentissage. Pour acquérir un CFC, s'ils le souhaitent, les candidats devront passer par le processus de validation des acquis, en s'adressant aux Offices cantonaux de formation professionnelle et devront sans doute suivre quelques cours complémentaires! En attendant, grâce à Unia, qui s'est battu pour cela, le certificat Progresso leur permettra d'obtenir une paie plus élevée de 200 francs par mois dès 2012.

Christophe Koessler