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Trois femmes sur quatre ont subi des violences sexistes ou sexuelles dans la rue

femmes manifestant avec des pancartes.
© Thierry Porchet

Les violences sexistes et sexuelles étaient au coeur des manifestations du 14 juin 2025, comme ici, à Genève.

L’Etat de Genève publie une enquête fouillée qui révèle l’ampleur des violences de genre dans le canton. Et en tire des enseignements sur les actions à mener.

Révéler la partie immergée de l’iceberg. C’est le but de l’enquête sur les violences de genre que l’Etat de Genève a rendue publique ce 24 juin – justement intitulée «Iceberg». Selon le Bureau de promotion de l’égalité et de prévention des violences (BPEV), jamais en Suisse on n’a produit une analyse aussi fouillée de ce phénomène, des contextes dans lesquels il survient ou encore de ses conséquences. «Jusque-là, nous n’avions pas de vision globale de l’ampleur des violences sexistes et sexuelles, remarque Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat chargée du Département des finances, des ressources humaines et des affaires extérieures. Or, si on veut les combattre, il est essentiel de les connaître.»

L’éventail des situations étudiées depuis 2011 par l'Observatoire genevois des violences domestiques est plus restreint, et il ne recense que les cas pris en charge par les institutions spécialisées ou par la police. Mais beaucoup de victimes ne font pas appel à elles. Savoir pourquoi était d’ailleurs l’un des objectifs de l’enquête.

Les personnes LGBTIQ+ très touchées

Sur 10 000 personnes sollicitées – hommes, femmes, personnes LGBTIQ+ – 4291 ont répondu au questionnaire. «C’est un taux de participation assez exceptionnel pour ce genre d’enquête, souligne Davy-Kim Lascombes Trinh, chargé de projets au BPEV. Cet échantillon est tout à fait représentatif de la population.» Parmi la masse des données récoltées et mises en ligne, notons le fait que 77% des femmes affirment avoir déjà subi des violences sexistes ou sexuelles dans l’espace public, le lieu où celles-ci se produisent le plus souvent, devant les espaces privés. Un chiffre qui s’élève même à 85% pour les personnes lesbiennes, gays ou bisexuelles. Ces dernières sont les plus touchées dans tous les contextes, en particulier dans le cadre de la formation ou sur internet.

Cela peut être lourd de conséquences. Une femme sur dix a déjà quitté son emploi après avoir subi des violences de genre sur son lieu de travail, et une sur trois a modifié son comportement dans l’espace public. «On évite de sortir à certaines heures ou dans certains lieux, souligne Emilie Flamand, directrice du BPEV. Mais ces stratégies d’évitement ne font que reporter la responsabilité sur les victimes.» Il y a aussi des répercussions sur la santé mentale, surtout quand ces violences se produisent dans l’espace privé, ce qui concerne une femme sur cinq. 

«Les violences sexistes et sexuelles trouvent en partie leur origine dans des normes sociales qui les justifient, déplore Emilie Flamand. Par exemple, parmi les jeunes hommes de 18 à 24 ans, seuls 37% rejettent l’idée que dans le couple, l’homme a naturellement plus d’autorité que la femme. C’est pourquoi il faut intensifier les mesures de prévention dès le plus jeune âge.»

Recours trop rare aux aides

Hélas, la majorité des victimes ne fait appel à aucune aide. Seule une minorité se tourne vers les dispositifs institutionnels, privilégiant alors les professionnels de la santé. Le plus souvent, c’est aux proches qu’on se confie après une agression à caractère sexuel. Cela s’explique entre autres par le sentiment que les actes subis ne sont pas si graves ou s’arrêteront vite, ou que demander de l’aide ne sert pas vraiment à grand-chose. La peur des représailles est aussi dissuasive, en particulier dans l’espace privé, quand l’auteur des violences est le plus souvent une personne connue.

«Même si l’Etat ne reste pas inactif, il reste encore du pain sur la planche, note Nathalie Fontanet. Nous devons davantage sensibiliser les jeunes hommes, qui ont une vision conservatrice sur les relations de couple, mais aussi les victimes et leurs proches, pour les aider à reconnaître que la violence de genre n’est pas normale et doit être signalée. La détection de celle-ci et sa prise en charge peuvent encore être améliorées, notamment en perfectionnant la formation des professionnels de la santé. Au cours de la dernière année, trois quarts des jeunes femmes ont subi de la violence de genre dans l’espace public. C’est un chiffre proprement inacceptable en 2025!»

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