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Non à une réforme des retraites sur le dos des femmes

La Conférence des femmes d'Unia réprouve la réforme de la prévoyance vieillesse

Pas question de relever l'âge de la retraite des femmes ni de supprimer la rente de veuve pour les femmes sans enfant, ni de privilégier le 2e pilier au détriment de l'AVS: telles sont les positions adoptées par la 7e Conférence des femmes d'Unia. Face à la réforme de la prévoyance vieillesse 2020 mijotée par le Conseil fédéral, les déléguées opposent l'initiative syndicale AVS+, plus juste et plus équilibrée.

Le thème de la retraite a occupé une place centrale dans la 7e Conférence des femmes du syndicat Unia qui s'est déroulée les 29 et 30 août derniers, à Saignelégier. Et pour cause, la réforme 2020 préparée par le Conseil fédéral sous le pilotage d'Alain Berset est particulièrement défavorable aux femmes.

Les femmes discriminées
Ce constat repose sur au moins trois faits attestés par les chiffres. Primo, le relèvement à 65 ans de l'âge de la retraite des femmes prévu par cette réforme se solderait par une perte de rente de 1,1 milliard de francs par année pour les femmes. Secundo, la suppression de la rente de veuve pour les femmes sans enfant représente une économie de 400 millions de francs sur le dos des femmes. Et tertio enfin, la baisse importante du taux de conversion minimal des caisses de pension touche surtout les femmes. En effet, la catégorie des revenus modestes à laquelle elles appartiennent le plus souvent, verra ses rentes diminuer, malgré une augmentation massive des prélèvements sur des salaires déjà peu élevés. «Cela viendra gonfler le 2e pilier et affaiblir l'AVS. Pour nous, les travailleuses, ce sont là de sombres perspectives», déplorent les déléguées dans le préambule d'une résolution qu'elles ont adopté à l'unanimité.
Ce projet fédéral de réforme est d'autant plus choquant qu'aujourd'hui déjà, les femmes perçoivent des rentes AVS nettement moins élevées que les hommes, du fait des discriminations salariales et des répartitions inégales des tâches dans la société et la famille. «Les femmes gagnent en moyenne un cinquième de moins que les hommes par heure de travail fourni, cela parce qu'elles touchent un salaire moins élevé pour le même travail et parce que les "métiers typiquement féminins" sont moins bien rémunérés que les "métiers typiquement masculins". De plus, les femmes fournissent bien davantage de travail non rémunéré que les hommes, notamment en s'occupant des enfants, des soins dispensés aux proches et des travaux familiaux inhérents à la vie quotidienne. Ce travail est estimé globalement à 80 milliards de francs par année. Le fait qu'il n'en soit pas tenu compte représente une perte considérable dans les rentes perçues par les femmes.
Lorsque le Conseil fédéral entend porter la retraite des femmes à 65 ans, il ferme les yeux sur une évidence: seulement 40% des femmes de plus de 60 ans exercent une activité professionnelle. Il a reconnu qu'un relèvement de l'âge de la retraite pour les hommes était aujourd'hui incompatible avec la situation du marché du travail. Pourquoi n'a-t-il pas fait le même constat pour les femmes?
Les déléguées constatent que les rentes AVS actuelles sont trop faibles pour assurer les besoins de la vie, raison pour laquelle elles estiment «important de percevoir également des prestations de la caisse de pension». Mais ces dernières leur sont largement défavorables et elles déplorent que la réforme fasse la part belle au 2e pilier, au détriment de l'AVS.

Pierre Noverraz

 


La résolution
Les déléguées ont adopté à l'unanimité une résolution dans laquelle elles déclarent vouloir «lutter résolument contre la réforme des rentes 2020». En voici les conclusions:
- Pas d'augmentation de l'âge de la retraite des femmes!
- Pas de suppression de la rente de veuve pour les femmes sans enfant!
- Développement rapide de l'AVS selon le modèle de l'Union syndicale suisse (AVS+)!
- Des rentes AVS suffisantes pour assurer le minimum vital de chacune et chacun!

 

Deux jours de réflexion et d'engagement
Suivie par plus d'une centaine de déléguées, la 7e Conférence des femmes a été ouverte par Ursula Mattmann Alberto, présidente du groupe des intérêts femmes à Unia, laquelle a notamment plaidé pour un ferme rejet de l'initiative Ecopop. «On cherche des boucs émissaires et ce sont toujours les étrangers qui en font les frais, comme on l'a vu dans le vote du 9 février. Les associations patronales portent une grande part de responsabilité. Elles ont davantage investi d'argent dans leur campagne contre le salaire minimum que dans cette initiative.» Emilie Moeschler, secrétaire régionale d'Unia Transjurane, région organisatrice de la conférence, a rappelé que «nous vivons encore et toujours dans un monde patriarcal qui nuit aux femmes et aux hommes aussi, d'ailleurs. Parce que trop de discriminations persistent et se reproduisent. La ministre jurassienne Elisabeth Baume-Schneider, adressant aux déléguées les salutations de son gouvernement, a rappelé que le Jura avait été le premier canton, en 1979, à se doter d'un Bureau de l'égalité sous le nom initial de Bureau de la condition féminine. Déplorant la persistance du fossé entre les lois sur l'égalité et la réalité quotidienne, elle a préconisé l'instauration de «contrôles plus systématiques de l'application de l'égalité salariale». Cet appel était en phase avec la volonté exprimée par les déléguées, lesquelles ont demandé une loi plus contraignante et la création d'une autorité étatique habilitée à effectuer des contrôles dans les entreprises. Pour appuyer ces revendications, Corinne Schärer, du comité directeur d'Unia, et Anja Peter, secrétaire nationale Unia à l'égalité, ont appelé à participer à la grande manifestation nationale des organisations féminines qui aura lieu le 7 mars 2015 à Berne.
En l'espace de deux jours, cette 7e Conférence des femmes, a abordé plusieurs sujets à travers différents ateliers consacrés notamment à la prévoyance vieillesse, à la mobilisation syndicale «Unia Forte Feminista», aux valeurs féminines, à l'égalité et à la réponse à donner après le vote du 9 février contre l'émigration. S'agissant de ce dernier thème, Vania Alleva, coprésidente d'Unia, a rappelé la nécessité d'un syndicat fort et solidaire. «Nous lutterons de toutes nos forces contre les quotas d'admission et les statuts de séjour discriminatoires pour les personnes migrantes.»
PN



Regards de participantes

L'Evénement syndical a demandé à quelques participantes ce qu'elles pensaient de cette 7e Conférence des femmes.

Ursula Cuagnier, Genève, travailleuse de l'industrie
«Dans mon atelier consacré à l'émigration, j'ai appris beaucoup de choses sur les dangers d'Ecopop, sur les statuts des saisonniers et les enjeux après le vote du 9 février dernier. Ce type de rencontre nous permet de mieux nous connaître et de renforcer le rôle des femmes dans le syndicat.»

Gabrielle Putzschler, Neuchâtel, employée dans une boulangerie
Cette syndicaliste est connue pour s'être battue contre le mobbing. «Je suis militante car ce que j'ai vécu dans ma vie professionnelle m'a montré que si l'on n'est pas syndiqué, on n'a pas de poids. Dans cette conférence, on s'aperçoit que nous avons tous les mêmes problèmes et que nous partageons la même envie de les résoudre ensemble et de nous défendre. C'est aussi un moment de partage convivial.»

Nicole Valiquer, secrétaire syndicale Unia, Genève
«Cette conférence est importante pour développer les relations entre les militantes des différentes régions. Cela nous permet d'échanger nos expériences et de resserrer nos liens autour de ce qui nous unit.»


Propos recueillis par PN