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Le travail n’est plus ce qu’il était

Couverture livre
©DR

La couverture du livre collectif.

Le politologue Bruno Palier et une trentaine d’autres auteurs auscultent les profonds changements de l’activité professionnelle dans le livre Que sait-on du travail?.

Essor du télétravail, délocalisation des emplois, augmentation du travail précaire, développement des discriminations sociales: en l’espace de quelques décennies, la nature du travail a profondément changé. C’est ce que démontrent le politologue Bruno Palier et une trentaine d’autres auteurs dans Que sait-on du travail?.
Groupées dans une «somme» de près de 600 pages, les réflexions des contributeurs concernent en premier lieu la France, mais pour l’essentiel, elles valent pour l’ensemble du monde occidental.

Télétravail: c’est bien, mais pas trop
S’il est souhaité par les personnes salariées, notent les chercheurs, le télétravail est plus souvent défavorable aux femmes (car se combinant aux tâches éducatives et domestiques) qu’aux hommes. Et il n’est finalement bénéfique que quand il ne devient pas une forme de travail à plein temps. Il doit rester combiné à du travail en présentiel, histoire de rester en contact avec ses collègues, tant pour des raisons professionnelles que sociales et syndicales.
En raison du rôle toujours plus important des robots et des ordinateurs, capables d’effectuer des tâches répétitives, les postes intermédiaires (situés entre les cadres et les ouvriers ou employés) tendent à disparaître, au profit des emplois très bien rémunérés et ceux qui sont très mal payés. Cette érosion des «emplois du milieu» contribue au creusement des inégalités. Les activités mal rémunérées sont souvent exercées par des personnes à statut précaire, comme celles qui sont au service des autres.

Femmes et immigrés discriminés
Les femmes ont aujourd’hui des taux d’emploi analogues à ceux des hommes, mais Bruno Palier et ses collègues constatent qu’elles travaillent beaucoup plus souvent à temps partiel et sont moins payées que les hommes. De plus, leurs carrières sont souvent bloquées par un «plafond de verre» (niveaux supérieurs pas accessibles à certaines catégories), en particulier lorsqu’elles sont cadres. Autres discriminations, celles qui touchent les immigrés. Ceux-ci sont concentrés dans les métiers où les conditions de travail sont difficiles et les rémunérations faibles: agents d’entretien, employés de maison, ouvriers non qualifiés du bâtiment, agents de gardiennage, employés de l’hôtellerie-restauration. Les immigrés comptent nettement plus d’ouvriers (29% contre 19% pour les nationaux) et nettement moins de professions intermédiaires (17% contre 27%).

Automobile: le drame des délocalisations
Branche industrielle particulièrement importante en France, le secteur automobile a perdu 130’000 emplois entre 2004 et 2020, soit 40% de ses effectifs, et emploie aujourd’hui 175’000 salariés. Les autres pays européens qui produisent des voitures ont connu des évolutions assez proches. Ce phénomène tient surtout à plusieurs vagues de délocalisations afin de conquérir les marchés émergents. La production des constructeurs d’Europe de l’Ouest s’est déplacée vers l’Europe de l’Est et la Turquie dans un premier temps, puis vers l’Afrique du Nord. Autant de pays où les salaires sont aussi nettement moins élevés. Cette réorientation géographique est allée de pair avec une dégradation des conditions de travail, en raison surtout de l’intensification des flux tendus, c’est-à-dire de la mise en place d’usines plus flexibles et plus résistantes aux crises. En d’autres termes, ne produisant que ce que le marché demande et en supprimant les stocks intermédiaires et le gaspillage.

Les salariés résistent
Bruno Palier et ses coauteurs notent toutefois que «les salariés ne sont plus prêts à tout accepter, qu’il s’agisse des conditions de travail, du sens de celui-ci, voire de son impact social et environnemental», comme l’a montré le combat contre la réforme des retraites en 2023. A l’époque, certains ont tenté de faire croire que les Français se sont opposés au relèvement de l’âge de la retraite parce qu’ils auraient perdu le sens du travail et seraient davantage «flemmards». Or, les témoignages comme les données statistiques ont montré que l’intensification du travail, des conditions dégradées et des problèmes de santé conduisent beaucoup de Français à ne pas envisager de travailler plus longtemps. Selon les auteurs, cette tendance n’est pas spécifique à la France, comme en témoignent les mouvements sociaux déclenchés en 2022 et 2023 en Allemagne ou en Angleterre, tournant autour des rémunérations comme des conditions de travail en situation d’inflation prononcée. Une Europe des luttes sociales est-elle en train de se dessiner? Ce serait hautement souhaitable, non seulement pour des raisons sociales et économiques, mais aussi pour faire face à la menace que représente la montée de l’extrême droite, en Europe et dans le monde.

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