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Dumping record sur le chantier de la tour Roche

Après une semaine de négociations avec Unia le groupe a versé un acompte de 500'000 francs aux travailleurs lésés

Depuis août 2013, environ une trentaine d'employés de façade ont été payés le tiers de ce que prévoit la convention collective de travail avec les frais de détachement. Ce cas de dumping salarial est le fait d'une entreprise polonaise mandatée par la société allemande Josef Gartner GmbH en charge des travaux de façade de la nouvelle tour de Roche à Bâle. Les travailleurs, dont plusieurs avaient suspendu les travaux, ont été partiellement indemnisés la semaine dernière.

Le chantier du groupe pharmaceutique Roche bat tous les records. Celui de la plus haute tour habitable du pays, soit 41 étages sur une hauteur de 178 mètres, dont la construction devrait être achevée d'ici septembre 2015. Et celui du dumping salarial estimé à plus d'un million de francs. Après une semaine de négociation avec le syndicat Unia, Roche a décidé de verser un montant rétroactif de 500000 francs à une trentaine de travailleurs. «Pour son image, il se devait de répondre rapidement à ce grave problème de dumping», estime Hansueli Scheidegger, coresponsable d'Unia Suisse du Nord-Ouest. De nouveaux contrats de travail respectant la Convention collective de travail de la construction métallique de Bâle ont été en outre établis par la société Gartner Switzerland AG en charge des travaux de façade qui a sous-traité à une entreprise polonaise.
«Le versement de Roche n'entre pas dans le cadre de la responsabilité solidaire, car c'est Gartner qui a mandaté l'entreprise polonaise ayant exploité ses travailleurs, et établi de faux papiers et de fausses déclarations de salaires. A mon avis, Gartner n'est pas de bonne foi et les différents chantiers de ce groupe, partout en Suisse, devraient faire l'objet de contrôles», souligne le syndicaliste. Dans son communiqué, Unia ajoute que s'il s'avérait que Gartner était au courant des procédés de ses sous-traitants, «il ne serait plus acceptable que ladite société puisse encore obtenir des travaux issus du marché suisse».

Douze francs de l'heure
Ce sont les employés du sous-traitant polonais qui ont interpellé Unia pour dénoncer leurs conditions de travail. Soit des semaines de 50 à 60 heures, des tarifs horaires de 12 francs net y compris les vacances, le non-remboursement des frais liés à leur situation de travailleurs détachés et des frais de déplacement, le non-paiement du 13e salaire, des suppléments pour les heures supplémentaires et du soir... Entre autres. «C'est déjà un travail dangereux lorsque les conditions sont respectées. Ici, le nombre d'heures quotidiennes, de 9 à 12 heures, six jours sur sept, ajoutait encore à la dangerosité du métier», souligne Hansueli Scheidegger. Depuis le début des travaux en août 2013, le manque à gagner des travailleurs dépasse le million de francs, selon Unia.
La moitié des employés ont donc suspendu les travaux pendant toute la durée des négociations. Et ont repris le travail la semaine dernière après avoir reçu ce premier acompte par Roche.

Une initiative contre le dumping
«Nous sommes contents d'avoir trouvé une solution. Mais tous les problèmes ne sont pas résolus. Roche continue à croire les entreprises qui disent respecter les conventions collectives, sans jamais le vérifier directement auprès des travailleurs», dénonce Hansueli Scheidegger. Dans le cas précis, Unia demande que le solde des salaires impayés soit calculé et versé au plus vite à chaque travailleur et que l'entreprise polonaise soit sanctionnée par «une peine conventionnelle sévère». De manière plus générale, Unia relève: «Le cas de la tour Roche n'est que la pointe de l'iceberg à Bâle. Cet incident montre bien que les mesures actuelles ne suffisent plus à maîtriser le dumping salarial.» D'où le lancement prochain d'une initiative populaire cantonale contre le dumping salarial qui exige des autorités de «suspendre les travaux, en cas de soupçon fondé de dumping salarial». Une telle initiative a été lancée en avril par Unia dans le canton de Zurich où en moins de deux jours 7000 signatures ont été récoltées.


Aline Andrey