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Un homme de poigne

Ouvert au dialogue, Alain Carrupt, nouveau président du Syndicat de la communication, est aussi prêt à la lutte s'il le faut

C'est un homme de poigne et de convictions qui a succédé, le 1er juillet, au bouillant Christian Levrat à la tête du Syndicat de la communication. Alain Carrupt, 53 ans, est engagé sur le terrain syndical depuis 30 ans. D'abord comme «milicien», lorsqu'il débute en tant que secrétaire des télécommunications aux PTT à Sion. Actif dans l'Association des fonctionnaires du télégraphe et du téléphone (ASFTT), l'un des cinq syndicats qui fonderont, 20 ans plus tard, le Syndicat de la communication, il en deviendra président central en 1988. En 1994, son engagement lui vaut d'être nommé secrétaire central de l'Union PTT. «J'ai eu la chance de faire de ma passion ma profession», commente ce Valaisan de Chamoson, qui s'est ensuite établi avec sa famille dans le canton de Fribourg pour être plus proche de son lieu de travail. Sa passion, c'est cet engagement de tous les jours pour ses collègues, pour les membres du syndicat. Une passion fondée sur deux valeurs: le respect et la solidarité.

Respect et solidarité
Le respect et la solidarité sont aussi le fil rouge de l'action du nouveau président du Syndicat de la communication, élu le 21 juin dernier. Dans le discours qu'il a adressé ce jour-là aux délégués au Congrès, Alain Carrupt a rappelé que ces deux valeurs sont indissociables: «Le meilleur moyen de faire avancer le respect, c'est la solidarité. Et la solidarité est au cœur du mouvement syndical depuis toujours.» Il a également fustigé la globalisation sauvage et le néolibéralisme «qui balaient trop souvent le respect des personnes et mettent à mal leurs droits». Il a dénoncé aussi ces groupes d'investisseurs qui «n'hésitent pas à vider des entreprises de leur substance pour du profit à court terme», avant de passer à une autre proie, «sans respect aucun pour les membres du personnel et leur famille, qu'ils livrent à leur sort». Epris de justice sociale, il a dénoncé cette course effrénée au profit maximal, qui génère licenciements, restructurations, délocalisations et dégradation massive des conditions de travail, ainsi que la flexibilisation à sens unique, qui transforme les employés en de «véritables esclaves modernes».

La grève est un droit!
Face à cette dérive, Alain Carrupt oppose une volonté de lutter par tous les moyens, et par la grève s'il le faut. «Je suis ouvert à la discussion, mais s'il n'y a pas de volonté de partenariat social, ou s'il n'y a pas de respect des employés, nous ne devons pas hésiter à faire grève, nous ne devons pas en avoir peur, la grève est un droit, c'est l'ultime recours», explique celui qui a mené la grève des travailleurs d'Orange à Bussigny, en 2003. La première grève du marché libéralisé des télécoms, contre la fermeture du site et le licenciement de plus de 200 employés. Une grève dure, qui s'est étendue sur 12 jours et demi, et qui a notamment permis au Syndicat de la communication de devenir un acteur incontournable dans le secteur.

Droits collectifs
Cette année-là, Alain Carrupt avait été élu vice-président du Syndicat de la communication et responsable de la branche des Télécommmunications. Il négociera avec de nombreux opérateurs mais, regrette-t-il, surtout des accords sociaux lors de restructurations. Et c'est avec une grande satisfaction qu'il parle de la première CCT signée en 2007 avec un cablo-opérateur privé, Télégenève, puis de l'accord salarial conclu avec Cablecom. Aujourd'hui, face à des «pique-assiette» comme Tele 2, «une caricature de l'ouverture des marchés, un opérateur qui vient ici faire des bénéfices, n'investit rien, sous-traite une grande partie de ses activités à des vendeurs payés une misère, puis rapatrie ses bénéfices dans son pays», Alain Carrupt va mener le combat pour qu'il existe, dans toute la branche, une réglementation collective, d'abord par des CCT d'entreprises puis par une CCT de branche. Ce même combat, il le mènera également dans le secteur postal, voué à une concurrence effrénée, engendrant une forte pression sur les conditions de travail à la Poste. «Si on touche à ces conditions de travail, il y aura de la bagarre», avertit-il.

Défis majeurs
En parallèle, le nouveau président va devoir faire face à deux autres défis majeurs: le combat contre la libéralisation totale de la Poste et la privatisation de Swisscom. Des combats qu'il entend mener avec les membres du syndicat, mais aussi main dans la main avec Christian Levrat, élu en mars à la tête du Parti socialiste suisse.
Autre défi, la fusion de son syndicat avec le Syndicat des services publics et Comedia. Après l'échec, l'année dernière, de la fusion avec le SEV, Alain Carrupt reste convaincu qu'un rapprochement de plusieurs syndicats est nécessaire pour améliorer la capacité de mobilisation et surtout être plus proche des membres. Et de préciser: «Une fusion ne peut avoir qu'un seul but: améliorer la défense des gens que l'on représente. Un tel projet doit passer par la base, et ne doit pas être un passage en force», dit le syndicaliste, toujours guidé par le respect des membres, à qui il appartient de définir la ligne du syndicat.

Sylviane Herranz