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L’aide humanitaire crie famine

Le mois dernier a été cruel pour la famille Banat, relate le magazine en ligne The Electronic Intifada. Vivant à Beit Lahiya, dans le nord de Gaza, cette famille palestinienne a reçu un appel téléphonique lui demandant d’évacuer immédiatement leur maison, car elle allait être bombardée par l’armée israélienne. Leur maison a effectivement été détruite, le couple et leurs huit enfants sont désormais contraints de loger dans un entrepôt. Encore plus dur, ils ont appris au même moment que le Programme alimentaire mondial (PAM) allait mettre fin à l’aide alimentaire qu’ils reçoivent. Depuis sept ans, la famille peut compter chaque mois sur un panier du PAM composé de produits essentiels comme de la farine, du sucre, du sel et de l’huile. «Il nous est impossible de survivre sans cette aide», a déclaré le père de famille, Ammar. Cet ouvrier agricole n’est embauché qu’épisodiquement pour une journée de travail rétribuée 8 dollars seulement.

Faute d’avoir trouvé 51 millions de dollars, le PAM doit suspendre son aide à environ 200000 Palestiniens. D’autres coupes, susceptibles d’affecter 100000 autres bénéficiaires, sont attendues en août, à moins que le déficit de financement ne soit comblé. Aux quatre coins de la planète, la plus grande organisation humanitaire du monde, qui secourt plus de 100 millions de personnes, est obligée de revoir à la baisse son aide à des millions de réfugiés et de sans-emplois. Elle doit choisir entre diminuer les rations ou restreindre le nombre de bénéficiaires. Choix cornélien. L’agence onusienne en est réduite à solliciter la générosité du public et le soutien de personnalités, telle Vanessa Paradis. Plus globalement, c’est l’ensemble de l’aide humanitaire qui fait face à un manque de ressources. La pandémie, la crise climatique, la hausse des prix et les guerres ont fait exploser les besoins. Pour y répondre, l’ONU nécessitait, en 2022, 41 milliards de dollars. Elle en a récolté 30 milliards. Cette année, ce sont 56 milliards qu’il s’agit de trouver et, à l’heure actuelle, plusieurs programmes essentiels cherchent encore des financements. Des dizaines de millions de personnes sont menacées de mort.

Une réforme du système humanitaire s’impose donc d’urgence. Son financement repose aujourd’hui aux trois quarts sur les contributions d’une poignée d’Etats et, pour le reste, sur des dons récoltés par les ONG. Or, ces pays contributeurs orientent leurs dons vers des crises auxquelles ils donnent la priorité. Si les moyens convergent heureusement en Ukraine, des millions de Yéménites ou de Syriens, par contre, abandonnés, crèvent de faim. C’est ignoble si l’on songe que les Etats, qui ont claqué 2240 milliards de dollars en 2022 en dépenses militaires, dont 82 milliards pour les armes nucléaires, se montrent incapables de réunir une somme qui correspond à la moitié du chiffre d’affaires d’une seule entreprise comme Nestlé. Si les contributions étatiques doivent augmenter, il faudrait aussi exiger des multinationales et des sociétés cotées en Bourse de passer à la caisse. Les dividendes versés aux actionnaires ont atteint un record dans le monde en 2022: 1560 milliards.