La Suisse est l’un des pays les plus durement frappés par la guerre commerciale de Trump. Mais les syndicats refusent que l’on fasse payer la facture aux salariés.
Alors qu’elle vient de célébrer le 1er Août, la Suisse n’est pas à la fête. Avec 39% de droits de douane sur les exportations helvétiques dès le 7 août, tel qu’annoncé le 31 juillet par l’administration Trump, notre pays est l’un des plus durement touchés dans la guerre commerciale déclenchée par le président des Etats-Unis. C’est un véritable coup de massue au cœur de l’été.
Tandis que le Conseil fédéral espère encore trouver une marge de négociation dans les jours qui viennent, le président de l’Union syndicale suisse (USS), Pierre-Yves Maillard, ne cache pas ses inquiétudes pour l’industrie d’exportation et l’emploi en Suisse: «Nous demandons au Conseil fédéral de tout mettre en œuvre pour obtenir au cours des jours à venir une meilleure solution pour notre pays, en informant rapidement et en priorité les partenaires sociaux de ses intentions.»
Prolongation des RHT en discussion
L’USS se met en outre à disposition pour un dialogue entre partenaires sociaux et avec le Conseil fédéral sur les éventuelles mesures internes à prendre. La faîtière soutient notamment une prolongation supplémentaire du droit à l’indemnité pour une réduction de l’horaire de travail (RHT). Celui-ci vient déjà d’être allongé par le gouvernement à 18 mois à compter du 1er août, mais une proposition de le porter à 24 mois, émanant des partenaires sociaux de l'industrie, dont Unia, est en discussion au Parlement. «Dans tous les cas il n’est pas envisageable de prendre des mesures unilatérales au détriment des salariés», prévient Pierre-Yves Maillard.
C’est aussi l’avis d’Yves Defferrard, membre du comité directeur d'Unia et responsable de l'Industrie: «L’annonce de ces droits de douane ne peut pas être un prétexte pour délocaliser des entreprises ou licencier du personnel. Les employeurs ne doivent pas abuser de la situation. Cela s’est déjà vu par le passé. Avec le franc fort, certains en ont profité pour dégraisser et accroître au passage les profits des actionnaires. Nous allons être très vigilants là-dessus.»
Ne pas céder à la panique
Pour le syndicaliste, il n’y a toutefois pas de raisons de paniquer à ce stade: «Il ne faut surtout pas céder à d’éventuelles pressions des patrons en acceptant une dégradation des conditions de travail. Trump est tellement imprévisible que personne ne peut dire s’il ne va pas changer d’avis d’ici au 7 août. S’il maintient les droits de douane à 39%, ce n’est évidemment pas une bonne nouvelle pour notre industrie d’exportation, mais la vie ne va pas s’arrêter pour autant, rassure Yves Defferrard. Après tout, les Etats-Unis ne représentent que 20% du total de nos exportations. On peut probablement trouver de nouveaux débouchés. La Suisse a déjà surmonté d’autres crises.»
Solenn Ochsner, responsable du secteur de l'industrie à Unia Neuchâtel, estime que dans le domaine de l'horlogerie et du luxe, il est peut-être possible de contourner cette taxation: «Des sociétés suisses pourraient par exemple créer des maisons-mère en Europe afin de ne payer que les 15% de droits de douane imposés par l'administration Trump à l'Union européenne. Ce qui est sûr, c'est que les entreprises horlogères ne vont pas installer des usines aux Etats-Unis, car elles ont besoin d'une main-d’œuvre très spécialisée qu'elles ne trouveront pas sur place.»