Détresse psychique pour deux tiers des jeunes en apprentissage
63% des sondés ont évoqué les longues journées de travail, les vacances insuffisantes et la peur du surmenage scolaire.
Selon une récente étude de WorkMed, 61% des jeunes en apprentissage souffrent de problèmes psychologiques. L’USS commente l’enquête et réclame davantage de vacances.
Comment les jeunes se sentent-ils dans leur apprentissage? Quels sont les facteurs qui leur font du bien? Qui leur pèsent? Qui les aident en cas de difficultés? Voilà les questions auxquelles a répondu une vaste étude menée par WorkMed. Ce centre de compétences en psychiatrie du travail s’est focalisé sur l’état de santé des apprentis et leurs façons de gérer stress et défis comme les éléments favorisant des développements positifs. La recherche a été menée auprès de quelque 45000 jeunes de toute la Suisse, intégrés dans des entreprises de différentes tailles comptant entre 10 et 250 employés. Elle a aussi pris en compte les caractéristiques personnelles (attitudes et comportement) et biographiques des sondés – expériences familiales, scolaires, situation sociale, relations amicales et loisirs. Il ressort de ses conclusions que 61% des personnes interrogées souffrent de problèmes psychologiques et qu’environ la moitié des cas devraient être traités plus activement. Des résultats jugés inquiétants par l’Union syndicale suisse (USS) qui a appelé à agir rapidement face à la souffrance bien réelle des apprentis.
Large soutien pour davantage de vacances
«La première étape consiste à rallonger les vacances pendant l’apprentissage – cinq semaines, c’est bien trop peu», a noté la faîtière syndicale, soulignant que les conclusions de l’enquête corroborent celles d’Unia, qui avait mené l’an dernier sa propre recherche. Dans ce contexte, une lettre ouverte réclamant huit semaines de vacances a été adressée au Conseil fédéral. Ce texte, qui a reçu l’appui de la Commission de la jeunesse, des syndicats et du Conseil suisse des activités de jeunesse, a déjà été signé par plus de 143000 personnes.
Revenant sur les points saillants de l’étude susmentionnée, l’USS note que 60% des participants interrogés rencontrant des troubles psychiques ont souligné que leurs conditions d’apprentissage ont déclenché ou aggravé leurs problèmes. La moitié d’entre eux estime que cette situation les perturbe dans leur formation. «L’enquête est on ne peut plus claire: les souffrances psychiques constituent une raison essentielle des abandons en cours d’apprentissage.»
Un apprenti sur cinq songe à arrêter
L’USS relaye aussi d’autres soucis majeurs évoqués par 63% des sondés: les longues journées de travail, les vacances insuffisantes et la peur du surmenage scolaire. Autre sujet de préoccupation: le manque de compréhension des entreprises formatrices lors d’erreurs ou de difficultés des jeunes. Les facteurs clés de réussite sont, quant à eux, liés à l’estime et au soutien de l’équipe et à une ambiance de travail agréable. Des critères aussi retenus pour recommander à d’autres jeunes la société qui les accueille. La recherche a également mis en évidence des abandons plus fréquents dans les micro-entreprises, sachant qu’un apprenti sur cinq envisage d’interrompre son parcours. Dans ce cas, la raison la plus fréquemment citée (63%) porte sur des problèmes avec la personne formatrice.
En dépit du stress psychique rencontré, l’USS a par ailleurs retenu que 78% des interviewés concernés n’ont pas bénéficié du moindre entretien dans leur entreprise, ni à l’école professionnelle.
Nécessaire aide
«Seuls 8% ont parlé soit à l’autorité de surveillance de l’apprentissage, soit à l’office cantonal de la formation professionnelle. De même, seuls 2% ont recouru aux offres de conseil de leur école professionnelle ou de leur entreprise formatrice.» Les éléments qui font dans ce contexte la différence? La gratuité des prestations, la confidentialité et la garantie de l’anonymat. La rareté des structures aptes à satisfaire ces exigences poussent l’USS à plaider en faveur d’un accès facilité des syndicats aux écoles professionnelles. Avec l’idée, entre autres, qu’ils puissent aider les apprentis à faire valoir leurs droits.
L’USS insiste encore sur l’importance pour les jeunes de bénéficier d’un soutien de leurs instructeurs et d’évoluer dans une bonne ambiance afin de limiter les problèmes psychiques. Dans ce contexte, l’organisation estime que les milieux économiques, le monde politique et la société auraient tout intérêt à améliorer les conditions offertes aux apprentis. «Cela implique aussi de donner des marques de reconnaissance et d’estime concrètes et tangibles aux apprentis qui en font beaucoup et dont un grand nombre sont au bord de l’épuisement.» Et l’USS d’appuyer sur la nécessité d’introduire huit semaines de vacances qui constitueraient, selon elle, une première étape concrète pour renforcer l’apprentissage. Cela «afin qu’en Suisse, le modèle à succès de la formation professionnelle ait encore de beaux jours devant lui».