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Actionnaires des TL interpellés

Une action s'est déroulée jeudi dernier devant l'assemblée des actionnaires des TL en défense de la liberté syndicale

La lutte se poursuit pour le retrait de l'avertissement avec menace de licenciement donné à un délégué syndical des Transports publics lausannois. La direction évoque un cas personnel, alors que le syndicat SEV affirme haut et fort qu'il s'agit d'une grave remise en cause des droits syndicaux et d'une atteinte à la liberté d'expression.

«Ils veulent jouer la personne, mais à travers Aïssam, c'est le syndicat qu'ils visent!» Johan Pain, président de la section SEV des Transports publics lausannois (TL), affirme clairement l'enjeu que représente à ses yeux l'avertissement avec menace de licenciement reçu par son collègue Aïssam Echchorfi en décembre dernier. Un avertissement motivé par des messages envoyés par sms ou mails par le syndicaliste, membre du comité de la section SEV-TL, à des collègues pour les inciter à se mobiliser afin d'améliorer les conditions de travail (voir L'ES du 20 avril 2011).
Le 4 mai dernier, une pétition munie d'un millier de signatures a été remise à Anne-Marie Depoisier, présidente du conseil d'administration des TL et députée socialiste. Le lendemain, le comité de direction de l'entreprise devait se réunir, mais n'a pas donné suite à la pétition exigeant le retrait de l'avertissement. Raison pour laquelle des syndicalistes du SEV et de l'Union syndicale vaudoise ont décidé d'interpeller les actionnaires de l'entreprise, jeudi passé, avant leur assemblée annuelle se tenant dans les locaux des TL à Perrelet. Ils souhaitaient attirer leur attention sur l'attaque à la liberté syndicale ayant cours au sein de cette société, appartenant à presque 100% à la collectivité publique.
«Nous avons été délogés de l'entrée et du parking par la sécurité, ce qui montre bien l'état d'esprit régnant dans l'entreprise», remarque Johan Pain. Un tract est distribué, mais par cet éloignement, peu d'actionnaires le recevront. Il y est rappelé que sur le millier de salariés des TL, 459 sont membres du syndicat SEV. Et que pour ce dernier, les sanctions à l'égard de leur délégué sont infondées et ne concernent que «son engagement syndical et sa liberté d'opinion, droit fondamental reconnu par la Constitution».

Droits fondamentaux en question
Venu soutenir le syndicaliste, Eric Voruz, conseiller national socialiste, fustige le comportement de l'entreprise. «Il existe une convention collective aux TL, qui garantit le partenariat social. Le fait d'avoir donné un avertissement à ce délégué syndical est inadmissible, d'autant plus que la protection des délégués est très légère en Suisse. Les élus prêtent serment devant la Constitution et tous ceux qui sont au conseil d'administration des TL doivent la faire respecter. Sinon, où va-t-on? Et quel signal donne-t-on au privé?» Pour Jean Christophe Schwaab, représentant de l'Union syndicale suisse, l'avertissement donné à Aïssam «montre aussi que la loi doit être changée, et vite, pour mieux protéger les délégués syndicaux. Cette situation illustre encore que la répression antisyndicale n'est pas le fait uniquement de licenciements mais passe par des mesures d'intimidation qui foulent au pied les droits fondamentaux.» Il appelle également les notables vaudois siégeant au conseil d'administration à faire respecter les droits syndicaux, fondement même de la démocratie.
A la sortie de l'assemblée, Christian Fankhauser, secrétaire syndical SEV mandaté par sa section pour y participer, raconte: «Le cas de Aïssam a été évoqué dans les divers. Le directeur a dit qu'il s'agissait d'un collaborateur qui a refusé un avertissement et a saisi les Prud'hommes pour cela, ce qui est faux car le seul recours possible pour un avertissement est la direction. Si le tribunal a été saisi, c'est parce que des données privées, sms, mails, ont été trouvées dans son dossier personnel, ce qui est illégal.» Le syndicaliste a pu intervenir et a notamment dénoncé le fait que le directeur venait de donner le nombre de collaborateurs des TL ayant signé la pétition en faveur de leur collègue, preuve qu'ils ont été recensés... Mais la discussion en restera là.

« Comportement syndical pas normal... »
Interrogée le lendemain sur cette question, la présidente du conseil d'administration n'a pas souhaité s'exprimer, indiquant qu'il s'agissait d'un problème opérationnel relevant de la direction. Le directeur, Michel Joye, explique à l'Evénement syndical que, pour les TL, «il s'agit d'une affaire de personnel, avec un collaborateur pour lequel nous avons un souci de comportement. Or le syndicat nous fait un procès d'intention en disant qu'il s'agit d'une affaire de liberté syndicale.» Il rappelle la grande culture de dialogue social au sein des TL. Mais lorsqu'on lui demande d'être plus précis sur les griefs reprochés à Aïssam Echchorfi, alors que son travail de conducteur de bus n'a jamais été remis en cause et que l'avertissement est basé sur son activité syndicale, le directeur lève un coin de voile: «Nous n'avons pas affaire à un comportement syndical normal», lâche-t-il.
Hier, mardi, alors que ce journal était sous presse, une première rencontre entre la direction des TL et le SEV devait se tenir. L'Office de conciliation a aussi été saisi par l'entreprise. Mais Johan Pain avertit déjà que d'autres actions sont prévues si l'avertissement n'est pas retiré. 


Sylviane Herranz