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Vers un #MeToo africain?

Est-ce que la parole serait en train de se libérer contre les violences faites aux femmes en Afrique? Il se pourrait bien! Depuis plusieurs semaines, une vague #MeToo déferle sur le Cameroun: des dizaines d’accusations d’agression sexuelle contre l’homme d’affaires Hervé Bopda inondent les réseaux sociaux, sur lesquels il est présenté comme «le plus grand violeur de l’histoire du pays». Si bien que l’ouverture d’une enquête a été demandée pour les faits «d’outrage à la pudeur, harcèlement sexuel, viols, menaces, séquestrations et violences sur plusieurs victimes». Rien que ça. Le hashtag #StopBopda a depuis vu le jour et a été repris plus de 100000 fois sur X (l’ancien Twitter), soutenu notamment par des artistes, des sportifs et des influenceurs très populaires sur le continent africain. Qui est cet Hervé Bopda? Son père récemment décédé, Emmanuel, a fait fortune dans l’immobilier et lui a hérité d’une partie de ce patrimoine industriel. A 45 ans, il est présenté comme un jet-setteur aux méthodes de caïd, mais aussi proche du gouvernement… Il a fini par être arrêté, après une courte traque, par les forces de l’ordre.

De l’autre côté du continent, au Kenya, une grande marche a eu lieu fin janvier pour dénoncer les violences faites aux femmes. Et pour cause, rien que durant ce premier mois de l’année, on décomptait déjà 16 féminicides dans le pays. Au minimum 152 en 2023 et 725 en 2022… Et ces chiffres sont sans doute la pointe de l’iceberg, de nombreux crimes passant au-dessous des radars des statistiques officielles… La goutte d’eau qui a fait déborder le vase? Le meurtre mi-janvier de Rita Waeni, une étudiante de 20 ans, retrouvée décapitée et démembrée. Un fait divers sordide qui a mis le feu aux poudres et poussé des centaines de personnes à manifester à Nairobi. «Arrêtez de nous tuer!» scandait la foule, en mouvement vers le Parlement. «Etre une femme ne devrait pas être une condamnation à mort» ou encore «Le patriarcat tue», pouvait-on lire sur les pancartes. Le problème, c’est le manque de moyens, mais aussi le manque d’intérêt pour les violences sexistes et sexuelles. Mais la donne pourrait changer maintenant…

Pas besoin d’aller si loin. Nos voisins français ont amèrement recensé 103 femmes assassinées par leur (ex-)conjoint en 2023. A peu près la même chose en Espagne et en Italie. On peut toujours faire pire. Au Mexique, on parle de 10 féminicides par… jour! En Suisse, il s’agit plutôt d’une vingtaine de femmes tuées chaque année. Une vingtaine de trop, évidemment. Mais si la Suisse annonce des statistiques moins catastrophiques que le reste de l’Europe, une étude du Bureau fédéral de l'égalité, publiée fin 2021, montre toutefois une particularité helvète. Nous sommes en effet le seul pays d’Europe où le nombre de femmes victimes d'un homicide a dépassé celui des hommes au cours des dernières années. Ici et ailleurs, il reste encore beaucoup de travail…