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Notre mode de vie anéantit nos efforts

La Confédération présente un bilan alarmant de l'état de l'environnement en Suisse...

Conservation des espèces, émissions de gaz à effet de serre et préservation des paysages sont autant de domaines où la Suisse écope d'un zéro pointé. Les organisations environnementales mettent en cause le manque de volonté politique de la Confédération. Les initiatives populaires commencent à pleuvoir... Dernière réaction en date, Moritz Leuenberger propose de taxer les carburants à partir de 2012...

«L'état général de l'environnement ne s'est pas sensiblement amélioré dans notre pays», conclut le rapport «Environnement Suisse 2007» de la Confédération, publié en juin par l'Office fédéral de l'environnement et l'Office fédéral de la statistique. Le constat est clair: «Dans le jargon fédéral, cela signifie que le bilan est mauvais», commente Walter Vetterli, responsable du programme Alpes pour le WWF Suisse. Même si les offices fédéraux mettent en avant les aspects positifs, l'arbre ne peut cacher la forêt. L'environnement continue à se dégrader fortement en Suisse. La cause? «Notre mode de vie et nos habitudes de consommation annulent les progrès réalisés en matière de protection de l'environnement et d'écoefficience», relèvent les auteurs du rapport.

Quelques avancées...
Mais ne boudons pas les modestes progrès: l'amélioration de la qualité de l'eau d'abord, notamment grâce à l'augmentation de la capacité des stations d'épuration. Puis la meilleure prise en charge des déchets. Près de la moitié de ces derniers est désormais collectée séparément et valorisée, l'autre incinérée «dans le respect de l'environnement», assure la Confédération. D'autre part, certains polluants atmosphériques ont diminué, entraînant une «nette» amélioration de la qualité de l'air ces 20 dernières années. Enfin, la part de la consommation des substances appauvrissant la couche d'ozone a baissé de 99% en Suisse entre 1986 et 2004.
Au passif, la liste est nettement plus longue. Le réchauffement climatique figure dans tous les esprits: la Suisse fait partie des mauvais élèves en matière de réduction des gaz à effet de serre. Pour respecter son engagement pris à Kyoto, le pays devrait réduire d'ici 3 ans ses émissions de 8% par rapport à celles de 1990. Or, en 2005, elles n'ont été diminuées que de 0,5%. De nouvelles mesures sont donc attendues (voir encadré)

50% des espèces sont menacées
Autre désastre peu connu: 30 à 50% de la faune et de la flore sont «plus ou moins gravement» menacées. L'extension de l'activité humaine, la pollution et la rareté des parcs nationaux et aires protégées - en comparaison européenne - en sont les causes principales. Or, «la Suisse a une responsabilité toute particulière en la matière», affirme Roman Hapka, secrétaire romand de Pro Natura. En raison de ses conditions climatiques dues aux différences d'altitude, elle accueille une diversité biologique peu commune à l'échelle du continent, avec 50000 espèces végétales et animales.
La pression de l'homme sur la nature et le paysage se révèle donc trop forte pour les analystes de la Confédération: «Le maintien des paysages et habitats naturels et la valorisation des sites d'intérêt naturel ne sont pas assurés.» Chaque jour 11 hectares de terres agricoles disparaissent irrémédiablement. Pour cette raison, Pro Natura vient de lancer une initiative pour la préservation des paysages (voir encadré). L'ONG dénonce aussi avec le WWF la faiblesse des mesures prises pour la renaturation des cours d'eau suisses, ce qui permettrait aussi de réduire les risques d'inondations dues aux débordements climatiques de plus en plus fréquents: «Le besoin de renaturation des cours d'eau a été calculé à 10000 kilomètres. Nous n'en sommes qu'à une vingtaine par année», déplore Walter Vetterli.

Air: 3700 morts par an
L'air que l'on respire a beau s'être amélioré, il reste de mauvaise qualité, et dangereux durant le smog hivernal ou estival. «Le niveau de pollution actuel entraîne en Suisse des affections des voies respiratoires, des maladies cardio-vasculaires et quelque 3700 décès prématurés par an, dont pas moins de 300 par cancer du poumon», informent les offices fédéraux. Il va sans dire que la nature est aussi fortement affectée par la contamination de l'air. Il y a des normes limites à ne pas dépasser, mais elles ne sont jamais respectées.

4000 sites contaminés
Les sols ne sont pas mieux lotis. L'agriculture intensive a endommagé une grande partie des terres. Du point de vue chimique, les valeurs indicatives limites sont dépassées pour 91% des sols. Le rapport indique qu'il y a 500000 sites pollués en Suisse, dont 3000 à 4000 sont contaminés (c'est-à-dire gravement pollués) et qui nécessitent un assainissement, prévu par un plan global. Coût de l'opération: 5 milliards de francs. Jusqu'à ce jour, seulement 200 sites ont été assainis. Celui bien connu de la décharge de l'industrie chimique bâloise de Bonfol débutera cet automne.
Pour Pro Natura et le WWF, ce triste état des lieux est aussi clairement le résultat d'un manque de volonté politique. «Il y a eu des coupes budgétaires importantes au Département de l'environnement, des pans entiers de son activité ont dû être mis en veilleuse», illustre Roman Hapka. Un manque d'ambition dans le domaine de l'environnement imputable également à une «certaine droite» qui refuserait toute contrainte. Et Walter Vetterli de renchérir: «C'est aussi le résultat d'un système libéral où l'Etat est peu interventionniste. Pourtant, des moyens plus importants pour l'environnement pourraient aussi être pourvoyeurs d'emploi.»

Christophe Koessler



Le thermomètre suisse s'affole...

L'augmentation des inondations, des tempêtes et des sécheresses est-elle due au réchauffement climatique? «Tout à fait plausible», selon le rapport de la Confédération... et les catastrophes pourraient bien aller en s'accélérant. En 30 à 40 ans, la température moyenne annuelle s'est élevée de 1,5% en Suisse, relèvent les dernières données récoltées sur cinq ans. Soit un accroissement 1,5 fois supérieur à celui enregistré pour l'hémisphère Nord! La Suisse se réchauffe donc plus que les autres pays! Son profil montagneux pourrait être à l'origine de l'explication.
Le recul des glaciers constitue le phénomène le plus spectaculaire de la monté des températures. Depuis le milieu des années 1970, le volume des glaciers alpins diminue de 1% par an. En une seule année, celle de la canicule en 2003, ces derniers ont fondu de 10%! Ce qui fait un total d'environ 40%!
Mais que fait la Confédération pour lutter contre le phénomène? Pas grand-chose en réalité. Le Parlement a refusé au printemps 2005 la taxe sur le CO2 sur les carburants pour lui substituer un «centime climatique», mesure minime, «dont on sait qu'elle ne répondra pas aux engagements de la Suisse en matière de réduction des émissions de CO2», déclare Roman Hapka, secrétaire romand de Pro Natura. Pour obliger la majorité politique de droite et le Gouvernement à prendre ses responsabilités, des organisations environnementales ont lancé, conjointement avec des parlementaires fédéraux, une initiative fédérale «pour un climat sain». Celle-ci prévoit d'inscrire dans la Constitution l'obligation de réduire de 30% les émissions de CO2 d'ici à 2020 par rapport au volume qu'elles atteignaient en 1990. L'initiative précise que cet objectif doit être mené à bien grâce à l'efficacité énergétique et les nouvelles énergies renouvelables, excluant ainsi implicitement le recours à l'énergie nucléaire. Le Syndicat des cheminots SEV soutient fortement la démarche. Les transports automobiles et routiers dégagent aujourd'hui 34% du total du CO2 émis sur le territoire suisse. Pour sa part, le Conseiller fédéral Moritz Leuenberger vient de réagir en proposant, le 16 août, une taxe sur le CO2 étendue aux carburants dès... 2012! Celle-ci devrait être à même de réduire les émissions de CO2 de 1,5% par an après cette date. Rappelons que l'objectif actuel fixé y est supérieur...

CK

Le texte de l'initiative peut être téléchargé à l'adresse: http://www.sev-online.ch/fr/info/politik/initiatives-referendums.php