Quand Macron pantoufle
En France, le pantouflage désigne le fait, pour un haut fonctionnaire, d'aller travailler dans une entreprise privée, puis de rejoindre – éventuellement – de nouveau l’Etat. Selon Vincent Jauvert, auteur de La mafia d’Etat paru l’année dernière aux Editions Seuil, la caste des hauts fonctionnaires devenus des dirigeants fortunés de grandes entreprises privées n’a jamais été aussi puissante que depuis l’élection d’Emmanuel Macron. Ce grand reporter à L’Obs explique que, dix-huit mois après la nomination du gouvernement d’Edouard Philippe, 40 conseillers ministériels avaient déjà pantouflé, ce qui est énorme. Pour lui, l’indécent n’est pas que des responsables publics partent dans le privé, mais qu’ils s’occupent des affaires publiques et du lobbying pour le compte de ces entreprises, en monnayant leur connaissance de l’Etat. Vincent Jauvert ajoute que l’exemple vient d’en haut, puisque les quatre plus hauts responsables de l’Etat durant le quinquennat Macron sont des adeptes de ce système: «Emmanuel Macron, inspecteur des Finances, a travaillé chez Rothschild, et Edouard Philippe, membre du Conseil d’Etat, a fait du lobbying pour Areva et a été avocat dans un cabinet anglo-saxon. Le secrétaire général de l’Elysée, Alexis Kohler, et le directeur de cabinet du Premier ministre, Benoît Ribadeau-Dumas, sont eux aussi des énarques qui ont pantouflé dans le privé.»
Pantoufler, c’est très juteux
Cette collusion est très rentable:
• Alors qu’il était président du conseil de surveillance de Renault, Louis Schweitzer touchait 200000 euros par année, tout en percevant une «retraite-chapeau» de 900000 euros et une retraite de la fonction publique, car il avait été directeur de cabinet de Laurent Fabius!
• Le rail est aussi intéressant. Président de la SNCF, Guillaume Pepy percevait 450000 euros. Montant auquel se sont ajoutés des centaines de milliers d’euros comme administrateur de Suez (groupe de l’eau), puis comme président du comité stratégique du groupe Lagardère!
• Après avoir été secrétaire d’Etat au Commerce extérieur, Anne-Marie Idrac a siégé dans cinq conseils d’administration, qui lui ont rapporté 375000 euros de jetons de présence en 2019! Même à ce niveau-là, les femmes touchent moins, mais les smicards aussi: 19237 euros brut par année en 2022…