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Des cadeaux fiscaux aux gros actionnaires ? Non merci !

La réforme de l'imposition des entreprises est un affront aux contribuables modestes. Un référendum la combat.

Exonérer d'impôt le 40% des dividendes des actionnaires possédant au moins 10% du capital de l'entreprise, c'est l'incroyable cadeau que le Parlement fédéral a entériné en mars dernier. Un référendum lancé par la gauche et soutenu par les syndicats combat aujourd'hui cette loi injuste qui revient à alléger les charge des plus riches pour déplacer le fardeau fiscal sur les épaules des contribuables les plus modestes.

La droite de ce pays ne se prive jamais d'agiter le spectre du déficit des finances publiques. En chœur, les conseillers fédéraux Merz, Couchepin et Blocher n'ont cessé d'entonner le refrain éculé des caisses vides, de plaider pour des économies, de réclamer des coupes claires dans les budgets de la santé, des retraites et de l'ensemble des services publics. Leur credo: serrez-vous la ceinture. Mais de quelles ceintures parlent-ils? Sans doute celles des contribuables lambda mais manifestement pas celles des grandes fortunes, des grands actionnaires. A ces barons de la finance, on se garde bien de demander le moindre effort supplémentaire, si petit soit-il, mais on les gratifie au contraire de multiples cadeaux, au motif que cela favoriserait la croissance, ce qui n'a pourtant jamais été démontré. Parmi ces cadeaux, citons notamment les 460 millions de la première réforme sur l'imposition des entreprises en 1998, les 500 millions de deux révisions de la TVA et 1,06 milliard généré par les différentes révisions du droit de timbre (transactions bancaires). Et cette liste est loin d'être exhaustive à en croire l'addition faite par les auteurs de l'ouvrage «Kassenkampf», édité par Attac, aboutissant à un total de 3,84 milliards de francs en l'espace de ces 20 dernières années!

Injustice
Et voilà qu'aujourd'hui, comme si tous ces cadeaux ne suffisaient pas, la majorité de droite des chambres fédérales remet la compresse. Le 23 mars dernier en effet, le Parlement a adopté une nouvelle loi «sur l'amélioration des conditions fiscales applicables aux activités entrepreneuriales et aux investissements». Si ce libellé est aussi pompeux et ambigu, c'est sans doute parce qu'on veut nous faire croire que le but est d'améliorer la compétitivité des entreprises en gommant une prétendue double imposition. En réalité, on aurait gagné en clarté si cette loi avait été intitulée «cadeaux fiscaux aux gros actionnaires». Car c'est bien de cela qu'il s'agit. Explications: avec cette loi, les dividendes des actionnaires ne sont plus imposés que sur 60% de leur valeur, pour autant que le bénéficiaire possède au moins 10% du capital de l'entreprise et que ce capital soit partie intégrante de sa fortune privée. Autrement dit, 40% de ces dividendes ne sont plus soumis à l'impôt! Cette réforme concerne également les cantons, lesquels pourront choisir leur taux d'imposition, quitte à se montrer plus généreux que la Confédération, s'ils le souhaitent.
Les concepteurs et partisans de ce nouveau privilège fiscal prétendent n'avoir d'autres intentions que de favoriser l'investissement par le biais de cet allègement. Faux. «Ce ne seront pas les entreprises qui verront leurs impôts allégés, mais leurs gros actionnaires», constate Hans Jürg Fehr, président du PS suisse.

Un trou à combler
Alors que les gros actionnaires ne payeront des impôts que sur 60% des revenus qu'ils tirent de leurs actions, les vendeuses, les maçons, les mécaniciens resteraient imposés jusqu'au dernier centime de leur salaire. Le manque à gagner provoqué par cette réforme est estimé à plus de 2 milliards de francs par année. Ce trou devra être comblé par les contribuables moins fortunés. Un scandale.
Dans un appel urgent appelant à signer le référendum lancé contre cette réforme par les partis de gauche et les syndicats, Unia souligne également l'aspect antisocial de cette loi, notamment en matière de financement équitable des retraites. «Les riches se soustraient au financement de l'AVS. En effet, plutôt que de se verser un salaire soumis aux cotisations AVS, ils se rétribuent en dividendes qui, eux, échappent à ces cotisations. L'AVS, les cantons, les communes et la Confédération perdront ainsi jusqu'à deux milliards de francs. Avec comme conséquences des mesures d'économie, par exemple sur les écoles, les crèches et les infrastructures publiques.»
Outre son côté indécent à l'heure où l'on réclame des économies dans le domaine de l'AI, de l'AVS et des services publics, cette loi est également contraire à la Constitution fédérale, laquelle précise que les personnes et les sociétés soumises à l'impôt doivent être traitées de manière égale, sans avantages ni désavantages et que l'imposition doit se faire en fonction de la capacité économique: «Celui qui possède ou gagne beaucoup doit payer davantage, celui qui possède ou gagne peu doit payer moins.»

Le message est clair. Signez et faites signer le référendum. Il s'obtient sur le site de l'USS, www.uss.ch ou d'Unia, www.unia.ch.
Dernier délai pour le renvoi des signatures: 15 juin 2007.

Pierre Noverraz



La Suisse généreuse avec les gros revenus

Le fisc suisse est décidément généreux à l'égard des personnes fortunées d'ici et d'ailleurs. Selon le journal Angles d'Attac, 3600 personnes bénéficient en Suisse de forfaits fiscaux qui leur permettent d'échapper aux impôts dans leur pays d'origine. Ces pratiques, au demeurant parfaitement légales, ont été largement médiatisées, notamment avec le cas de Johnny Hallyday.
Même si ces 3600 cas représentent une somme considérable, cela reste peu de chose à comparer avec les économies que réalisent les entreprises étrangères qui s'établissent dans certains cantons qui leur offrent des avantages fiscaux, ou alors avec les milliards générés par l'évasion fiscale qui n'est pas considérée par le droit suisse comme un délit punissable.
Enfin, la Suisse reste l'un des derniers pays du monde à ne pas pratiquer l'imposition sur les gains en capital. Autrement dit, si un spéculateur achète une action d'une valeur de 1000 francs pour la revendre 2000 francs cinq ans plus tard, il ne payera pas le moindre impôt sur ce bénéfice net de 1000 francs. Appelé à corriger cette injustice par le biais d'une initiative de l'Union syndicale suisse, le peuple suisse avait voté non le 2 décembre 2001... Il est bon, à cet égard, de se souvenir que les partis de droite et le grand patronat avaient faussé toute la campagne, en faisant croire aux gens modestes que l'imposition des gains en capitaux allait grever la petite épargne et assombrir les perspectives économiques.

PN