Aller au contenu principal
Menu

Thèmes

Rubriques

abonnement

Vers la mobilisation

La consultation des ouvriers du second oeuvre romand a démarré

La Convention collective romande du second œuvre arrive à échéance fin 2010 et sera renégociée prochainement. Dans cette perspective et pour définir les revendications, les secrétaires syndicaux se rendent sur le terrain pour consulter les ouvriers. Reportage à Martigny.

Quelles sont les priorités des travailleurs? C'est avec cette question que les secrétaires syndicaux d'Unia arpentent les menuiseries et les chantiers de Suisse romande ces dernières semaines. But de l'opération: connaître les revendications des ouvriers du second œuvre en vue de renégocier la Convention collective romande du secteur qui arrive à échéance fin 2010. Qu'ils soient syndiqués ou non, tous les travailleurs reçoivent un questionnaire auquel ils répondent par écrit lors de la visite d'Unia. A Martigny, Serge Aymon, responsable du second œuvre pour le Valais, a pour mission de récolter 250 de ces fascicules dûment remplis. En tout, près de 1000 feuillets devraient être rassemblés dans tout le canton, dont 400 en allemand pour le Haut-Valais. Un bon échantillon sur les quelque 4000 menuisiers, plâtriers peintres et poseurs de sol valaisans. Les questionnaires seront tous envoyés à Berne, avant d'être dépouillés, puis leurs résultats présentés lors de la Conférence professionnelle du second œuvre romand qui se tiendra le 8 mai prochain à Lausanne.

Retraite anticipée
Jeudi dernier, l'accueil était chaleureux au cœur de la zone industrielle de Martigny. Cinq ouvriers sont réunis par Serge Aymon dans un gigantesque atelier de fabrication de fenêtres. Tout de suite, la discussion s'anime: «A 62 ans, c'est clair, moi, je m'en vais!», s'exclame en riant Roger, menuisier, 50 ans. L'amélioration du régime de retraite anticipée, permise par la CCT, apparaît en effet d'emblée comme l'une des revendications prioritaires, soulevée à plusieurs reprises lors des visites d'Unia cet après-midi-là. Celle-ci ne figure pourtant pas parmi la liste de priorités possibles proposées par le syndicat dans son questionnaire... Peut-être parce que le régime actuel prévu par la CCT s'avère déjà très favorable comparé à ce qui existe dans les autres secteurs: soit une retraite à 62 ans, avec un minimum de 3500 francs net et un maximum de 4500 francs par mois. Mais son amélioration semble nécessaire: «Quand on a donné 40 ans de travail dans la construction, c'est déjà pas mal», explique Thierry, ébéniste de 34 ans. Autre revendication centrale? La hausse des salaires, notamment des minima inclus dans la CCT. Là, c'est la grogne, car les négociations salariales ont échoué en 2010. Il n'y aura pas d'augmentation des paies cette année. «Pourtant, tout augmente», ne cessent de répéter les travailleurs rencontrés. Pour le reste, les ouvriers présents assurent bénéficier de conditions de travail correctes et se montrent satisfaits du travail d'Unia. Il faut dire que le syndicat était intervenu avec succès en faveur de trois d'entre eux lors de la faillite de leur ancien employeur, qui avait laissé trois mois d'arriérés de salaire en souffrance. De quoi expliquer la convivialité de l'accueil!

Congé paternité et revalorisation
Retour en ville de Martigny. Sur le chantier d'une magnifique piscine publique, au centre-ville, une dizaine d'ouvriers prennent leur pause. A peine le secrétaire syndical a-t-il annoncé le motif de sa visite qu'un jeune menuisier l'interrompt: «Le congé paternité! C'est très important! Aujourd'hui c'est la honte», s'exclame Cesar, 27 ans, qui sera tout bientôt papa pour la première fois. Or à la naissance de son enfant, il n'aura droit qu'à deux jours d'absence. «C'est insuffisant. Les premiers mois sont essentiels pour que le père puisse créer des liens avec l'enfant», commente-t-il.
Pour ses deux collègues, en revanche, la priorité va à la revalorisation des salaires des ouvriers non diplômés, mais pourtant qualifiés par leur pratique professionnelle: «On nous confie parfois la responsabilité d'un chantier. Mais aucune bonification salariale en vue. Je fais même le travail des gars qui ont un CFC quand ils n'y arrivent pas», assure un ouvrier, qui préfère garder l'anonymat. A nouveau, le thème de la retraite revient sur les lèvres. Lorsqu'un ouvrier doute de l'importance d'être syndiqué, Serge Aymon tranche: «80% des maçons sont membres d'un syndicat. Résultat: ils ont pu obtenir la retraite à 60 ans.» Plus loin, dans un couloir, deux plâtriers peintres posent pinceaux et rouleaux pour saisir les stylos Unia tendus par le syndicaliste. Thierry, 28 ans, insiste sur les salaires minimaux, puis enchaîne à son tour sur le congé paternité: «Mon frère a eu une petite fille. J'ai vu que c'était compliqué!»

Primes maladie et repas
Rentrés au syndicat, une pile d'une centaine de questionnaires remplis depuis quelques jours nous fait de l'œil. Et si on analysait un petit échantillon? Sur 30 feuillets pris au hasard, trois questions se profilent d'emblée, sans surprise: l'augmentation des salaires réels et minimaux arrive en tête, suivi de la participation des employeurs au paiement des primes d'assurance maladie (déjà prises en charge partiellement grâce à la convention dans certains cantons) et de la hausse des indemnités pour les repas de midi (lorsque le chantier se situe loin de l'entreprise). Viennent ensuite très nettement le congé paternité, puis le durcissement des sanctions à l'encontre des employeurs lors de dumping salarial. «Si les syndicats ne se démenaient pas, les employeurs embaucheraient des personnes de l'extérieur qu'ils paieraient moins», résumait Cesar, le jeune menuisier, quelques minutes plus tôt. 


Christophe Koessler