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Pour une politique industrielle éco-sociale et des emplois durables

Plus de 1000 représentants du personnel ont réclamé à Berne une économie constructive libérée de l'emprise des spéculateurs

La Suisse doit d'urgence se doter d'une politique industrielle éco-sociale orientée vers des emplois durables: telle était la revendication principale de la 2e Journée nationale de l'industrie qui s'est déroulée à Berne le 31 mai dernier, avec la participation de plus de 1000 représentants du personnel et membres de commissions d'entreprise.

«Ne broyons pas du noir, construisons des emplois verts!» et «Construisons ensemble l'avenir de notre place industrielle!» C'est autour de ces slogans que plus de 1000 représentants du personnel, syndicalistes et membres de commissions d'entreprise se sont réunis pour une Journée nationale de l'industrie le 31 mai dernier, à l'appel d'Unia, sous une vaste tente dressée par le syndicat non loin du Palais fédéral. Une proximité qui ne devait rien au hasard. Et pour cause, ce rassemblement syndical coïncidait avec l'ouverture de la session des Chambres fédérales dans laquelle les élus de droite volaient une fois de plus au secours des banquiers en refusant une commission d'enquête sur l'affaire UBS. «Ces parlementaires-là s'alignent derrière la finance. Nous sommes ici pour leur rappeler que ce pays n'appartient pas aux banquiers, pour leur dire qu'il est temps de s'occuper sérieusement de notre avenir industriel», a martelé, du haut de la tribune, Corrado Pardini, responsable du secteur industrie d'Unia et animateur de la manifestation, en préambule aux interventions de plusieurs orateurs.

Reconversion éco-sociale
«Le Gouvernement et le bloc bourgeois du Parlement misent tout sur la place financière helvétique. C'est stupide et objectivement faux. Nous devons au contraire replacer le travail au cœur des préoccupations de ce pays, a plaidé le coprésident d'Unia, Renzo Ambrosetti. Il s'agit aujourd'hui de réinventer notre manière de produire, de voyager, de transporter, de consommer.» Cette réorientation donne lieu à une révolution industrielle mondiale: «La reconversion écologique crée des millions de nouveaux emplois en Allemagne, en Scandinavie, en Chine, en Inde et au Brésil. Partout, sauf en Suisse.» Porteuses d'avenir industriel, les technologies vertes sont en pleine expansion. «En Allemagne, elles contribuent déjà à 10% du produit intérieur brut, contre 3% seulement en Suisse. Ces nouveaux marchés se chiffrent en milliards de francs.» Abondant dans ce sens, Corrado Pardini a loué les vertus du «pacte pour une Suisse productive», lancé par Unia et consistant à soutenir la reconversion éco-sociale de l'industrie au moyen de crédits et leasing préférentiels alimentés par les caisses de pension et garantis par la Banque Nationale, «de quoi créer rapidement 120000 emplois».

Revaloriser la Suisse du travail
Les politiciens proches des thèses syndicales se sont également relayés à la tribune. Parmi eux, la conseillère nationale Suzanne Leutenegger Oberholzer a fustigé la Berne fédérale «qui privilégie les requins de la finance mais laisse tomber l'industrie». Christian Levrat, président du Parti socialiste suisse, a demandé pour sa part que l'on «revalorise la Suisse qui travaille par rapport à la Suisse qui spécule». Il faut «placer la politique industrielle avant la finance». Il a également plaidé pour les industries «cleantech». «La Suisse peut et doit retrouver son rôle de leader. Il n'est pas normal, par exemple, que l'Autriche produise 55 fois plus d'énergie solaire que nous.» Quant à Ueli Leuenberger, président des Verts, il a rappelé que «l'économie de marché capitaliste mondialisée n'a fait qu'exacerber les problèmes et à conduit un petit nombre de personnes à devenir toujours plus riches et un grand nombre à s'appauvrir toujours plus», tout en provoquant des catastrophes pour l'environnement. Pour lui, «ni la crise financière, ni la crise climatique, ni la crise mondiale des ressources et le problème de la famine ne trouveront d'issue sans une réforme en profondeur de l'économie».
A l'issue de la journée, après l'intervention de plusieurs représentants du personnel et de la syndicaliste Silke Treusch à la tribune, les participants ont adopté une résolution demandant la création de dispositions légales pour protéger les membres des commissions du personnel et les délégués syndicaux contre les licenciements abusifs à caractère antisyndical.


Pierre Noverraz

 

 

Ce qu'ils en disent...

Propos recueillis parmi les membres des commissions d'entreprise et représentants du personnel qui participaient à cette Journée nationale de l'industrie

Nicolas Gojani, mécanicien
«La crise continue à frapper très fort l'industrie des machines et l'horlogerie, en particulier la sous-traitance. Cela débouche sur du travail précaire, des licenciements, des délocalisations. Il faut que l'Etat soutienne les usines, et mène une politique industrielle porteuse d'avenir.»

Viviane Keller, employée de l'horlogerie
«L'engagement de la Confédération et des cantons est insuffisant. Il faut mettre l'accent sur le développement d'industries novatrices au lieu de privilégier constamment la finance. Une journée comme celle-là renforce notre détermination et notre esprit de solidarité pour atteindre ce but.»

Sergio Marquez, ouvrier de fonderie
«Il faut aider les entreprises à innover avec une priorité à celles qui sont conventionnées. C'est l'avenir. Mais les autorités aident bien davantage les banques que les entreprises. Il faut changer cela. Il s'agit aussi de mieux protéger les membres des commissions d'entreprise.»

Inan Vurucu, ex-horloger
«Il y a toujours plus de licenciements, de violations des droits sociaux et de démantèlements. Cette crise, ce sont les capitalistes qui l'ont créée, et ils veulent que ce soit nous qui la payons. Il faut refuser cela et exiger une politique industrielle axée sur le travail plutôt que le capital.»