Aller au contenu principal
Menu

Thèmes

Rubriques

abonnement

Les maçons genevois prêts à débrayer

Face au refus des employeurs d'ouvrir des négociations conventionnelles les syndicats genevois appellent à la grève

Le début de la campagne des travailleurs du bâtiment genevois pour une meilleure Convention nationale aura été agité. Les syndicats ont retrouvé le lieu de leur action cadenassé par l'entreprise principale du chantier. Ils ont finalement pu exposer leurs revendications, notamment pour Genève, à savoir une hausse des salaires, une limitation du travail temporaire et la création d'un fonds intempéries. Au vu de la pression exercée par les patrons, la bataille s'annonce corsée. Un préavis de grève a été voté.

Le 14 octobre, les syndicats genevois de la construction, Unia, Sit et Syna, ont organisé une action pour dénoncer le refus de la Société suisse des entrepreneurs (SSE) de négocier en vue du renouvellement de la Convention nationale du secteur. Depuis le mois de février, les syndicats implorent la SSE de se mettre autour de la table afin d'améliorer la protection des travailleurs mais aussi de garantir des conditions économiquement viables pour la retraite anticipée à 60 ans. Cependant, celle-ci se montre fermée à tout dialogue social.

Chantier cadenassé
Les patrons vont même plus loin. Alors que l'action, prévue sur le chantier public de la Ville de Genève d'Artamis, avait été avalisée par le maître d'ouvrage, les syndicats et les travailleurs (environ 80 personnes) ont été empêchés d'y accéder. «L'idée était de faire une conférence de presse suivie de grillades, rapporte Umberto Bandiera, secrétaire coresponsable du gros œuvre à Unia. On a retrouvé le chantier complètement bloqué par des cadenas; cela nous a beaucoup surpris car ce n'est pas la tradition qu'on a à Genève.»
Sans parler des pressions qui auraient été faites sur les travailleurs afin qu'ils ne participent pas à cette action et qu'ils ne parlent pas aux syndicats... «La direction de l'entreprise principale a débarqué sur le chantier, et après avoir mis les choses à plat, ils nous ont laissés poursuivre notre action», ajoute le syndicaliste.

Enjeux nationaux
Les représentants des travailleurs Unia, Sit et Syna ont, à cette occasion, rappelé les revendications nationales pour le secteur, à savoir l'assainissement du fonds pour la retraite anticipée afin d'éviter des baisses des rentes de 600 à 1000 francs par mois, la création d'un fonds intempéries pour protéger les maçons en cas de mauvaises conditions météorologiques, l'augmentation des salaires, une meilleure protection contre les travailleurs âgés et les délégués syndicaux et de meilleurs outils pour lutter contre la sous-enchère salariale.

Spécificités genevoises
Les travailleurs du bâtiment genevois ont également des exigences locales, regroupées déjà depuis le 18 septembre dans une résolution. «Nous demandons l'augmentation de tous les salaires de 150 francs par mois pour faire face au coût de la vie élevé à Genève», exige Umberto Bandiera, qui rappelle les hausses des primes maladie à venir dans le canton et donc les répercussions sur le pouvoir d'achat des maçons. Des solutions locales sont également attendues concernant le fonds intempéries et la question des intérimaires. «Il y a de plus en plus de travailleurs temporaires sur les chantiers. On a vu récemment des chantiers du Ceva où un employé sur deux était intérimaire, ce qui contribue à la précarisation de l'emploi. Aujourd'hui, les chiffres sont difficiles à donner car les agences ne communiquent pas mais nous estimons que 30% des travailleurs sur les chantiers genevois ont ce statut. Nous, les syndicats, voulons limiter cette part à 10%.»

Fortes pressions
Et pour se faire entendre, les maçons genevois ont voté un préavis de grève générale pour le 11 novembre. D'autres actions auront également lieu ces prochaines semaines. «Nous sommes en train de préparer le terrain mais nous sommes confiants: une bonne mobilisation est à prévoir», se réjouit le secrétaire syndical. Et ce malgré de grandes entreprises qui prennent la voie de la confrontation et de la répression. «Les représentants de la SSE genevoise se sont toujours montrés ouverts et prêts à chercher des solutions, mais les employeurs ont une attitude très rigide et cela crée un état de tension. C'est le jeu, on s'y attendait, mais pas autant! On va devoir jongler avec cette ambiguïté...»
Les discussions entre la SSE cantonale et les syndicats se poursuivent néanmoins, même si cette première se retrouve tiraillée entre les directives du siège qui interdisent les accords cantonaux et une culture du partenariat social genevois.
«Quoi qu'il arrive, il nous faut impérativement régler la question nationale afin d'éviter un vide conventionnel», conclut Umberto Bandiera.

Manon Todesco