Aller au contenu principal
Menu

Thèmes

Rubriques

abonnement

L'AVS au rabais passe à la trappe

Le Parlement vient de rejeter la 11ème révision de l'assurance vieillesse

La 11e révision de l'AVS est enterrée pour la seconde fois, après le rejet par le peuple en 2004. L'âge de la retraite des femmes à 65 ans n'est pas pour demain... Soulagement des syndicats. Mais la question de la retraite anticipée n'avance pas. Le dossier semble plus que jamais bloqué.

Les syndicats n'auront pas à lancer le référendum contre la 11e révision de l'AVS. En comptant sur l'Union démocratique du centre (UDC) pour avaliser leur projet antisocial et discriminatoire envers les femmes, les partis bourgeois se sont mis le doigt dans l'œil. Vendredi dernier, les députés UDC ont voté en bloc contre la révision, prétextant qu'elle n'allait pas assez loin dans la baisse des prestations et les économies à réaliser! En réalité, l'UDC craignait - à un an des élections fédérales - de perdre des voix auprès d'une grande partie de ses électeurs âgés, qui ne voient pas d'un bon œil que l'on s'attaque à leurs retraites. «L'analyse a montré que la base de Blocher a refusé la précédente révision antisociale de l'AVS, en 2004, ainsi que la réforme des rentes du deuxième pilier en mars de cette année», explique Andreas Rieger, coprésident du syndicat Unia.

Femmes dans la ligne de mire
La gauche et les syndicats avaient bien sûr d'autres raisons que celles de l'UDC pour rejeter cette 11e révision bis. A commencer par l'augmentation de l'âge de la retraite pour les femmes. Un report de 64 à 65 ans souhaité par le Conseil fédéral uniquement pour des raisons d'économie. Sans prise en compte de la situation défavorisée des employées en matière de sécurité sociale et d'emploi tout le long de leur vie. Ce sont en effet les femmes qui fournissent la majeure partie du travail non rémunéré au service de la famille et de la société, ce qui ne leur permet pas de se constituer une rente solide. Sans compter que le salaire de la gent féminine demeure plus bas que celui des hommes (19%), les handicapant ainsi encore davantage lors de leur retraite.

Préretraite insuffisante
Cette hausse de l'âge de la fin du travail n'était pas non plus compensée par une possibilité réelle de prendre une retraite anticipée sans perte de rente. Si la moitié des 800 millions de francs dégagés devait servir à faciliter le départ du travail avant 65 ans, le mécanisme prévu s'avérait largement insuffisant. Ces 400 millions n'auraient profité temporairement qu'aux salariés disposant d'un revenu compris entre 40000 et 61500 francs. Et même pour ceux-ci le taux de réduction de leur rente prévu (1,7% par année) ne leur permettrait pas d'obtenir une pension suffisante, estime l'Union syndicale suisse. Cerise sur le gâteau: ce soutien à la préretraite n'aurait duré que dix ans! La nouvelle mouture de la loi aurait donc représenté une pure perte pour les salariés au bout de quelques années. D'autant que les rentes devaient de surcroît ne plus augmenter au même rythme que le coût de la vie dans les cas où le montant des réserves de la caisse AVS tombait au-dessous de 70% du total des rentes. Une éventualité qui a bien des risques de se produire...

Horizon bouché
L'enterrement de la 11e révision semble reporter aux calendes grecques la résolution des questions des préretraites et du financement de l'AVS. D'ici quelques années toutefois, plusieurs scénarii sont possibles. L'UDC pourrait, en alliance avec la droite, remettre l'ouvrage sur le métier après les élections fédérales et proposer une loi attaquant de front les prestations de l'AVS. Elle se heurterait cependant au risque d'un référendum victorieux de la gauche. Les partis bourgeois préféreraient donc peut-être se concentrer sur un seul thème à la fois: l'augmentation de l'âge de la retraite des femmes ou la hausse des cotisations. Autre possibilité: une alliance entre le centre droit et la gauche pour mettre sur pied un véritable mécanisme de préretraite durable, assorti d'une nouvelle source de financement, comme une augmentation des cotisations touchant en priorité les plus hauts revenus. «Avec 1200 millions de francs, nous avions calculé en 2004 qu'une retraite anticipée viable serait possible», rappelle Andreas Rieger. Mais un référendum de la droite sur une telle révision ne serait alors pas exclu. Le blocage paraît donc durable...


Christophe Koessler