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Inimitable coiffeur...

Coiffeur atypique, imitateur de stars féminines et fan de Marilyn Monroe, Ted Rota s'est construit un nom sur ses trois passions

Au quotidien, l'homme est coiffeur. Et propose, dans son salon à La Neuveville, dans le Jura bernois, un service original à des prix imbattables. Pas de shampoing ou de coloration mais des coupes, brushings ou chignons à une clientèle de fidèles mais aussi de curieux attirés par le décor de l'enseigne: un espace rempli d'effigies et de photographies de Marilyn Monroe, icône qui occupe, dans la vie de Ted Rota, depuis les prémices de l'adolescence déjà, une place hors pair. Durant son temps libre, le jeune quinquagénaire se produit souvent en spectacle ou dans des fêtes privées, se glissant alors dans la peau de stars féminines avec un talent et une aisance qui ont, comme sa passion pour l'actrice et chanteuse américaine, contribué à sa notoriété. Capable d'incarner une soixantaine de vedettes, le transformiste a construit son répertoire sur la base de ses coups de cœur. «J'imite des personnes que j'aime», précise Ted Rota citant quelques-unes d'entre elles comme Amy Winehouse, Cher, Mylène Farmer ou encore Dalida. Une liste où le nom de Marilyn Monroe a disparu. L'artiste a cessé de l'interpréter à 36 ans, à l'âge où la jeune femme devait décéder dans des circonstances qui demeurent mystérieuses. Mais si elle ne retrouve pas de nouvelles vies sur les scènes de Ted Rota, elle continue à emplir son existence.

Une amie de toujours
Photos, livres, posters, disques, cartes postales, statues... L'appartement du coiffeur, sis au-dessus de son salon, regorge de milliers d'objets dédiés à l'une des plus célèbres blondes de la planète. Pas un pan de mur où Marilyn n'apparaît. Aucun bibelot ou presque, à l'exception de magnifiques bouddhas, qui ne lui rendent éloge. Rude concurrence pour les deux chiens et trois chats qui partagent aussi l'espace de Ted Rota. Pour le Neuvevillois, l'histoire de cet engouement débute à l'âge de onze ans, au visionnement du film Rivière sans retour dans lequel elle joue. «J'ai été subjugué. C'est comme si j'avais retrouvé une amie, une amie que j'avais toujours connue», tente d'expliquer le fan qui entame alors une recherche effrénée d'images et d'articles relatifs à Marilyn. «Je suis assez extrême quand j'aime quelque chose. Il me faut tout.» Petit à petit, l'homme crée une extraordinaire collection - même s'il n'apprécie pas le mot - qu'il continue aujourd'hui à alimenter mais de manière plus sélective. Les représentations préférées de son icône? Celles qui la montrent au naturel, sans grand renfort de fard ni dans des postures sophistiquées. Celles qui laissent affleurer toute sa sensibilité... De quoi toucher l'âme tendre de l'aficionado qui va aussi profiter d'un travail alimentaire pour étoffer sa collection.

Friteuses complices
Avant de se lancer dans la coiffure, Ted Rota, titulaire d'un diplôme de commerce, s'interroge sur la voie professionnelle à emprunter. Il n'a pas envie d'être employé de bureau et, encore indécis, propose avec succès ses services à l'entreprise Frifri, spécialisée dans la vente de friteuses professionnelles. Chargé de leur expédition dans le monde entier, le jeune homme glisse dans les paquets un petit mot pour inviter leurs destinataires à participer à sa collection en lui envoyant des cartes postales ou autres. «J'ai alors reçu pas mal de trucs», sourit-il et de préciser que son patron était plus ou moins au courant de la démarche mais, l'appréciant, fermait les yeux... Une source qui sera tarie un an et demi plus tard: conquis par un stage de coiffeur, le collaborateur de Frifri change de cap et décide d'effectuer un CFC dans ce domaine. Tout en poursuivant ses activités artistiques.

Au nom de l'amour fou...
Parallèlement à cette formation puis, ultérieurement, à son travail, l'homme qui a fait de la danse classique, du ballet jazz et des claquettes, crée des chorégraphies pour une troupe de transformistes. Un remplacement au pied levé d'un artiste le propulse sur le devant de la scène. Ses interprétations, d'abord de Marilyn puis de Sophia Loren et de tant d'autres, rencontrent un large écho dans les médias romands et français. Qui s'intéressent aussi à ses milliers de Marilyn et à sa «boîte à coupes», un autre plaisir du coiffeur. «J'adore mon travail, son aspect artistique, social, les contacts avec les clients», affirme Ted Rota qui place l'amitié et «l'amour fou» en tête de liste de ses valeurs. Au sommet du bonheur. «Je ferai tout pour les gens que j'aime. C'est eux qui me font avancer», relève-t-il encore, heurté par l'égoïsme et la liberté de façade d'un monde «où rien ne doit dépasser du moule». Où la différence génère encore trop souvent rejet et méchanceté même si lui dit ne pas avoir eu à en souffrir, probablement aussi protégé par sa notoriété. Quant à ses rêves, il en nourrit un en particulier: se rendre sur la tombe de Marilyn Monroe. Logique, il l'a pour toujours dans le cœur et dans la peau. Et aussi au sens propre du terme, lui qui s'est fait tatouer sur le corps plusieurs portraits de l'immortelle idole... Inimitable. 


Sonya Mermoud