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Faillite trouble pour Perfumes Planet

La dizaine de magasins de Suisse romande fermeront prochainement. Des salaires restent impayés, le patron vide le stock

Plusieurs dizaines de milliers de francs de salaires impayés viennent grever le budget des employés dans le cadre de la faillite de Perfumes Planet SA. Alors que le dépôt de bilan a été déposé le 7 mai au tribunal, le patron aurait vidé illégalement le stock de plusieurs de ses boutiques. Ce dernier dispose curieusement d'une autre société, «Planète parfum», dotée de près d'un demi-million de francs. Où ira le stock de cosmétiques et de matériel de la société en faillite?

Les menaces du patron de Perfumes Planet se sont concrétisées: «Si vous ne faites pas davantage de chiffre d'affaires, vous ne serez pas payés», avait-il assuré à certains de ses employés ces derniers mois, selon plusieurs d'entre eux. Il s'était cependant bien gardé d'évoquer des difficultés financières - pourtant colossales selon les chiffres communiqués par la direction de la société à Unia - ni un risque de faillite. Et c'est bien ce qui s'est passé. Le 7 mai, l'entreprise demandait le dépôt de bilan. Or, bon nombre d'employés n'ont pas reçu leurs salaires ces derniers mois. Rien que pour les boutiques de Neuchâtel, La Chaux-de-Fonds et Bienne, Unia compte environ 30'000 francs d'arriérés non payés, sans compter les droits aux vacances et aux heures supplémentaires. Deux employées de la boutique de Lausanne ont également fait appel au syndicat pour réclamer plusieurs mois de salaires en souffrance.

Combien d'emplois en jeu?
L'entreprise Kodi SA, gérant les magasins Korres de Suisse romande, et appartenant au même patron, Gilles Pagnier, aurait également fait faillite. Le nombre de collaborateurs concernés par les licenciements des deux marques n'est pas connu. Contacté, le patron de l'entreprise n'a pas répondu à nos appels. Plusieurs dizaines d'emplois seraient concernés dans les magasins de Genève, Nyon, Rolle, Fribourg, Neuchâtel, Yverdon, Bienne, Lausanne, Villeneuve, Sion et Bâle, et dans les bureaux de Genève.

Où va le stock invendu?
Echaudées par des propos jugés insultants de leur patron, notamment au sujet de leurs qualités professionnelles, et par le retard dans le paiement des salaires, deux vendeuses avaient démissionné avec fracas de la boutique de Neuchâtel le 30 avril dernier (voir l'ES du 5 mai). Ce magasin a ensuite été mis sous scellés par l'Office des poursuites et faillites car le bailleur de l'arcade n'avait pas non plus perçu son loyer. Depuis, presque toutes les boutiques de Suisse romande ont été fermées. La semaine passée, le patron aurait voulu récupérer le stock de certains de ses magasins. Une pratique pourtant illégale puisque la marchandise restante devra être vendue sous le contrôle de l'Office des faillites pour honorer les dettes existantes, dont les salaires. Le magasin d'Yverdon a ainsi été vidé le 25 mai. Celui de Genève l'aurait été quelques jours auparavant selon une vendeuse. Le patron aurait eu moins de chance dans d'autres villes où des scellés avaient déjà été posés. Que fera-t-il de cette marchandise dont il n'a pas droit de disposer? Les spéculations vont bon train d'autant que Gilles Pagnier possède d'autres sociétés à vocation similaire: Readis SA et... Planète Parfum! Une dernière société au nom similaire, domiciliée à Genève, qui est dotée d'un capital de 475'000 francs d'après le Registre du commerce. Le plus étrange, c'est que Perfumes Planet, la société propriétaire des boutiques, a été créée en juillet 2007, soit la même date à laquelle Planète Parfum a été transformée en société anonyme. Or, à notre connaissance, cette dernière ne dispose d'aucun magasin en Suisse, et est dotée d'un capital supérieur à la première.

Est-ce un cas d'abus?
Ces éléments sont troublants. Le syndicat a en effet observé plusieurs cas de chefs de PME qui accumulent des dettes envers leurs employés et leurs fournisseurs, jusqu'à plusieurs centaines de milliers de francs, puis font faillite. Ces mêmes patrons continuent ensuite la même activité avec une autre société, laissant leurs créances à la charge de la collectivité. Et certains s'enrichissent de la sorte! Or, les dispositifs judiciaires sont largement insuffisants pour empêcher ces manœuvres.
Dans le cas qui nous concerne ici, le Tribunal d'arrondissement du Nord vaudois à Yverdon devra examiner la demande de mise en faillite le 8 juillet. Il lui appartiendra de décider si une enquête devra être menée sur la base des éléments existants...


Christophe Koessler