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Après la vague verte, retour de la realpolitik…

Le vert du renouveau commence déjà à se tamiser. Et à laisser la place aux couleurs automnales et à celles de la realpolitik… La Suisse a connu un dimanche électoral de tous les superlatifs. Avec une poussée historique des Verts, portés par le mouvement de la grève pour le climat. Avec le succès des femmes, poussées par celle du 14 juin. Avec des partis traditionnels et gouvernementaux qui prennent l’eau. Et une abstention à la hausse, de 3,4% pour atteindre 54,9%. Bien que le Parlement fédéral ne soit pas encore au complet, des seconds tours pour le Conseil des Etats sont encore programmés, il reste clairement à majorité bourgeoise. Le curseur s’est un peu déplacé sur la gauche. Mais les partis dits centristes restent tous bien implantés à droite, tel le Parti démocrate chrétien. C’est de ses rangs par exemple que provient une attaque majeure contre le droit des travailleurs, visant à flexibiliser le temps de travail et imposer des semaines de 67 heures...

La majorité de droite est encore en place. Les patrons le savent bien, même si certains de leurs éminents représentants à Berne ont mordu la poussière. Comme le président de l’Union suisse des arts et métiers, l’UDC fribourgeois Jean-François Rime, ou son directeur, Hans-Ulrich Bigler du PLR. Ainsi, Economiesuisse, dès l’élection terminée, a appelé à de nouvelles alliances pour défendre le climat et renforcer la compétitivité du pays. Sauf que, jusqu’à preuve du contraire, la compétitivité économique ne peut guère se conjuguer avec la préservation de l’environnement… Trois jours après ce dimanche particulier, c’était au tour de l’Union patronale suisse (UPS) de dévoiler son cahier de revendications. Pardon, son «catalogue d’exigences» en 10 points pour le marché du travail et la politique sociale. Un catalogue présenté à l’occasion du cinquième anniversaire de l’antenne romande de l’UPS, et motivé par l’objectif de «maintenir un marché du travail flexible et ouvert».

Les patrons s’adressent au nouveau Parlement pour lui demander «de faire preuve de sa volonté de réforme». Et ils donnent le ton. Ils remettent en cause les mesures étatiques prises dernièrement, comme l’instauration d’un salaire minimum à Neuchâtel ou encore le congé paternité. Il faut stopper cette «fièvre normative» qui a agité la Berne fédérale, disent-ils, et s’opposer à toute nouvelle intervention de l’Etat pouvant attenter à la flexibilité du marché du travail. Il faut aussi s’opposer à toute forme de congés payés imposés par la loi, réformer l’enregistrement du temps de travail, et conclure l’accord-cadre avec l’Union européenne. Parmi les points relevant des assurances sociales, l’UPS ne veut plus de hausse des cotisations salariales, ce qui nuirait «gravement à la compétitivité» de l’économie helvétique. Elle revendique également la retraite à 65 ans pour les femmes, puis un relèvement progressif de l’âge de la retraite pour tous dès 2027. Et exige encore la réforme rapide du 2e pilier, avec l’abaissement du taux de conversion et la concrétisation du compromis des partenaires sociaux. Enfin, les patrons s’en prennent aux plus fragilisés en réclamant des «mesures d’allégement» dans l’assurance invalidité.

Un vaste programme, nous rappelant que les questions sociales, «oubliées» de la campagne électorale, vont vite ressurgir sur le devant de la scène. Et que les mobilisations devront se poursuivre, dans la rue et les entreprises.