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Ressac violet

Discrimination salariale. Double journée. Violence domestique. Harcèlement et sexisme ordinaire. Un an après la gigantesque vague féministe qui a déferlé sur la Suisse, les femmes sont redescendues dans la rue. Certes sans bénéficier de la même visibilité que lors de la Grève historique du 14 juin 2019, pandémie de coronavirus oblige, mais portée par ce même élan créatif et déterminé en faveur de l’égalité. Et pour cause. En dépit d’exigences pour le moins légitimes, peu d’améliorations sont intervenues. Et ce, même en regardant le verre à moitié plein. Une moitié qui se traduit par un nombre record d’élues au parlement fédéral l’automne dernier et l’adoption d’un congé paternité qui devra toutefois encore être confirmé en raison d’un référendum. Un dernier petit pas bien loin d’une dispense parentale, nettement préférable. Autre avancée qui aurait dû couler de source depuis longtemps, la récente acceptation par le Conseil national du mariage pour tous. Autant dire que les progrès se révèlent pour le moins timides. Voire anecdotiques. Sur le front de l’emploi, les travailleuses touchent toujours des salaires inférieurs de 640 francs en moyenne par rapport à leurs homologues masculins occupant une même fonction. Un scandale que la Loi sur l’égalité révisée, qui entrera en vigueur ce 1er juillet, ne changera guère. Un tigre de papier se bornant à exiger des grandes entreprises de procéder à des contrôles, sans prévoir de sanctions. Bien insuffisant pour corriger une injustice enracinée dans une économie tirant clairement parti de cette situation. Et alors que les femmes réclament aujourd’hui encore plus fortement que hier une revalorisation des métiers dits féminins dont chacun a pu mesurer le caractère essentiel durant la crise sanitaire. En particulier dans la vente, les soins, le nettoyage. Au lendemain des applaudissements aux balcons, l’heure n’est plus aux remerciements mais aux actes. Les conditions de travail et les rémunérations doivent être à la hauteur des acclamations. Sachant aussi l’incidence des bas salaires le plus souvent conjugués au féminin sur les rentes vieillesse. Selon l’Union syndicale suisse, ces dernières se révèlent en moyenne inférieure d’un tiers de celles des hommes. Double pénalité et durant l’activité professionnelle et à la retraite. Autre impératif: la reconnaissance et le partage des tâches domestiques et de care. Le travail éducatif, l’aide aux proches ne s’apparentent en rien à des loisirs. La charge mentale ne peut être supportée seule par les femmes qui continuent à réclamer davantage de temps, de respect et d’argent d’autant plus vigoureusement que la crise sanitaire a encore exacerbé la question. Comme elle a mis en lumière la situation d’employées de maison, dont une grande majorité de migrantes, confrontées à une précarité particulièrement choquante. Elles non plus ne sont pas oubliées dans la lutte en cours. Autre bataille encore loin d’être gagnée, celle contre les violences domestiques et le droit inaliénable des femmes à disposer librement de leur corps. A l’autodétermination sexuelle. Un dernier point qui passe par une réforme du Code pénal suisse et la possibilité de punir tous les actes sexuels non consentis. Autant dire que plusieurs 14 juin seront encore nécessaires pour que le modèle patriarcal et de classe entame une mue en profondeur. La vague violette se doit de perdurer.