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Réglementer le travail sur appel

Un rassemblement contre le travail sur appel était organisé samedi dernier à Berne par l’Alliance contre la ségrégation sociale. Fondée en 2016 par des associations de défense des chômeurs, cette coalition s’engage contre les contrats de travail à «zéro heure». En Suisse, le droit n’impose pas de mentionner un temps de travail minimal dans le contrat, ce qui offre aux employeurs une grande flexibilité et prive les travailleurs et les travailleuses employés sur appel de nombreux droits dans leur emploi, mais aussi en cas de chômage, de maladie et d’accident. Ils seraient plus de 200000 dans ce cas, selon l’Alliance (un peu moins pour les autorités), dans des branches comme l’hôtellerie-restauration, la logistique, le nettoyage, la sécurité ou le marketing. La jurisprudence a bien prévu des garde-fous: si le volume du travail varie, l'employeur ne peut pas du jour au lendemain ne plus appeler son collaborateur et le priver de toute rémunération, l’employé a droit, jusqu'à l'échéance du contrat, à son salaire calculé sur la moyenne des salaires perçus. Ça, c’est en théorie, car dans les faits, les travailleurs peinent souvent à connaître et à faire valoir leurs droits.

La crise du Covid-19 a bien mis en évidence la vulnérabilité des personnes dépendant de ce statut. «Lorsque les clients annulent, on n’a plus rien. Durant le confinement, j’ai des collègues qui n’ont touché que 80 francs par mois», témoigne à L’Evénement syndical Judith, femme de ménage genevoise employée d’une plateforme. A la demande des syndicats et devant l’ampleur d’un phénomène qu’il jugeait au départ marginal, le Conseil fédéral a élargi le cercle des ayants droit à l’indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail (RHT). Les travailleurs sur appel n’avaient en effet pas accès à la RHT si leur taux d’occupation fluctuait de plus de 20%. Cette avancée sur le chômage partiel ne supprime cependant pas les barrières que l’assurance leur oppose par ailleurs. L’Alliance contre la ségrégation sociale demande à supprimer ce critère de fluctuation pour s’en tenir aux modalités communes à tous les salariés, soit la perception d’un salaire mensuel d’au moins 500 francs durant le délai-cadre de cotisation.

L’Alliance contre la ségrégation sociale veut aussi que le contrat de travail mentionne un temps de travail minimal. Dans un postulat intitulé «Réglementer le travail sur appel» et présenté l’année dernière au Conseil des Etats, l’ancien sénateur genevois Robert Cramer avait repris ces deux revendications. Interrogé par la Chambre des cantons, le conseiller fédéral Guy Parmelin ne voyait pas alors l’utilité d’agir en ce sens. Contre son avis, une majorité a approuvé le postulat Cramer en septembre 2019. Le Conseil fédéral a deux ans pour pondre un rapport et formuler des propositions, qui devront encore repasser devant le Parlement… aussi vite que possible, mais aussi lentement que nécessaire.